Le parquet a requis mardi au Burundi cinq ans de prison contre le président de la principale coalition d’opposition, Léonce Ngendakumana, pour « dénonciation calomnieuse », a constaté un journaliste de l’AFP.

Egalement accusé de diffamation et de haine raciale, M. Ngendakumana est jugé pour le contenu d’une lettre envoyée en février au secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, dans laquelle il accusait le parti au pouvoir, le Cndd-FDD, de préparer un plan comparable à celui ayant débouché sur le génocide au Rwanda voisin en 1994.

Il comparait l’aile jeunesse du Cndd-Fdd – les « Imbonerakure » – à la milice Interahamwe qui fut l’un des bras armés du génocide rwandais, et une radio proche du parti au pouvoir à la radio rwandaise Mille-Collines qui relaya alors les appels aux massacres.

M. Ngendakumana est poursuivi pour avoir dans cette lettre « terni l’image du parti Cndd-FDD et de la radio Rema-FM », a déclaré le substitut du procureur Eric Ndikumana.

Dans ce courrier, M. Ngendakumana, président de l’Alliance démocratique pour le changement (ADC) qui regroupe neuf partis d’opposition, dénonce aussi « l’exploitation de la corde ethnique à des fins propagandistes » et évoque un risque de « génocide politico-ethnique au Burundi », selon des extraits lus par le procureur.

Le Cndd-FDD, du président Pierre Nkurunziza (au pouvoir depuis 2005), et Rema-FM sont parties civiles et ont réclamé respectivement 10 millions et 100 millions de francs burundais (6.000 et 60.000 dollars) de dommages et intérêts.

M. Ngendakumana, qui comparaissait libre, a dénoncé « un procès politique » et dit assumer le contenu de la lettre.

« (Nous) avons demandé au ministère public de contredire ce que nous dénoncions », a déclaré à la presse M. Ngendakumana, dénonçant des « exécutions extrajudiciaires », des « tortures », « les tentatives d’abroger la Constitution et l’accord d’Arusha » ayant mis fin en 2006 à 13 ans de guerre civile au Burundi.

La communauté internationale exprime depuis plusieurs mois ses inquiétudes sur les tensions croissantes dans le pays, sur fond de violence politique et d’entraves aux libertés, à l’approche des élections de 2015 dans ce petit pays des Grands Lacs.

Dans une note confidentielle qui avait fuité, l’ONU avait récemment fait état de distributions d’armes aux « Imbonerakure », ce que le pouvoir avait démenti.