Pascal Nyabenda, le président de l’Assemblée nationale, vient d’achever avec Agathon Rwasa une tournée dans trois pays de la région afin de débloquer le dialogue politique inter-burundais. Interview
Au lendemain de l’investiture express du président Nkurunziza pour un troisième mandat largement contesté, Pascal Nyabenda et Agathon Rwasa, respectivement président et vice-président de l’Assemblée nationale burundaise, ont mené une tournée régionale de près d’une semaine pour s’entretenir avec les autorités ougandaises, tanzaniennes et kényanes. Le président de la chambre basse burundaise livre à Jeune Afrique le bilan de cette série de rencontres officielles, qui s’est achevée dimanche 7 septembre.
Jeune Afrique : Dans quel cadre s’inscrit la tournée que vous venez d’effectuer dans les trois pays de la Communauté de l’Afrique de l’Est ?
Pascal Nyabenda : Pendant près d’une semaine nous nous sommes successivement entretenus avec Crispus Kiyonga, le vice-président ougandais, Jakaya Kikwete, le président tanzanien, et Uhutu Kenyata, le président du Kenya. Depuis que le dialogue inter-burundais a été suspendu, il fallait débloquer cette situation en rencontrant le médiateur ougandais et les chefs d’État de la région.
Quels sujets avez-vous abordés avec les autorités de ces pays ?
Nous avions le même message pour les trois chefs d’État que nous avons rencontrés. Avec trois points essentiels. Premièrement, nous voulions présenter nos remerciements parce qu’ils ont accompagné les Burundais pendant tout le processus électoral. Deuxièmement, il s’agissait de leur montrer nos avancées en matière politique et sécuritaire du pays. À cet égard, c’était aussi une occasion de leur présenter officiellement Agathon Rwasa, actuellement premier vice-président de l’Assemblée nationale, qui représente l’opposition et dont cinq fidèles sont membres du gouvernement. Troisièmement, nous voulions annoncer notre souhait de continuer le dialogue afin d’intégrer des personnalités qui le souhaiteraient au titre de l’article 129 de la Constitution.
Une partie de l’opposition, la société civile burundaise et la communauté internationale ne reconnaissent toujours pas les institutions issues des élections. Avez-vous un message pour eux ?
J’ai envie de leur rappeler que tous ceux qui étaient dans l’opposition lors des élections étaient derrière Agathon Rwasa. Donc c’est Rwasa qui a des hommes et des femmes sur le terrain. Je voudrais également ajouter que ce discours de non-reconnaissance est utilisé par ceux qui ont préparé le putsch avorté du 13 mai. Le problème que nous avons maintenant, c’est la gestion des putschistes.
Votre tournée survient au moment où certains membres de l’opposition, dont l’ancien président Sylvestre Ntibantunganya (1994-1996), ont été arrêtés par Interpol à l’aéroport de Bruxelles…
Il ne faut pas parler d’opposants. Il faut plutôt utiliser le terme putschistes. Nous n’arrêtons pas les membres de l’opposition, mais les personnes qui sont impliquées dans l’organisation et la mise en oeuvre du coup d’État. Et ceux-là ne sont pas concernés par le dialogue. Sur ce point, il faut être clair !
Lors de votre tournée, vous n’êtes pas allés rencontrer le président rwandais Paul Kagamé. Le Burundi est-il en froid avec le Rwanda ?
Bien sûr qu’il y a des problèmes entre le Burundi et le Rwanda. Peut-on ne pas parler de différend quand les personnes qui perturbent la sécurité déclarent qu’ils ont été militairement entraînés au Rwanda ? Dans le traité de la communauté est-africaine, il est strictement interdit qu’un pays membre puisse héberger des ennemis d’un autre autre pays. Mais cela ne va pas nous empêcher de rencontrer le président Kagamé.
Nadine Muhorakeye