B24 : Bonjour S.E le 2ème Vice-président de la République du Burundi. Selon vous, le Burundi est-il réellement au bord d’une guerre civile?
Non, le Burundi n’est pas du tout au bord d’une guerre civile. Il est vrai que certaines parties du pays, surtout 4 quartiers de la ville de Bujumbura, ont connu et continuent à connaître des troubles sécuritaires sporadiques depuis fin avril 2015. Des politiciens affamés du pouvoir sans assises populaires ont instrumentalisé surtout les jeunes désœuvrés pour saboter le processus électoral par des manifestations violentes qui ont culminé en une tentative de coup d’Etat et des attaques terroristes contre les forces de sécurité et de défense, mais tous ces actes sont voués à l’échec. Les institutions issues des élections de 2015 ont été mises en place conformément à l’esprit de l’Accord de Paix d’Arusha et la Constitution de la République du Burundi. Maintenant, la population burundaise, toutes ethnies confondues, cohabite pacifiquement et vaque quotidiennement à ses activités. La question de conflits ethniques n’est donc plus d’actualité. La population burundaise reste sereine et déterminée à lutter contre toute idéologie divisionniste.
B24 : Quel message adressez-vous à ceux qui véhiculent des rumeurs d’un génocide des tutsis en cours au Burundi?
Nous savons le sentiment qui les anime. Ils veulent toujours récolter là où ils n’ont pas semé! Qu’ils comprennent désormais que le Burundi d’hier n’est pas celui d’aujourd’hui! Jamais le génocide ne sera un fonds de commerce ici chez nous. La composition de nos forces de défense et de sécurité, des deux chambres du Parlement et de toutes les institutions étatiques conçue sur l’Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation et la Constitution de la République du Burundi, a renforcé l’unité et la réconciliation entre les Burundais. Le Peuple burundais a juré ne plus faire marche arrière pour retomber dans l’erreur du passé qui n’a satisfait que les intérêts égoïstes d’une clique de planificateurs au coût du sang des centaines de milliers de victimes innocentes de toutes les ethnies.
B24 : Pensez-vous que c’est le « 3ème mandat » qui est la cause de l’insurrection?
Pas du tout. La turbulence politico-sécuritaire que quelques parties du pays ont vécue depuis le début de l’insurrection en fin du mois d’avril 2015 n’a rien à voir avec la fantaisiste question de 3ème mandat. Il s’agit d’un plan de déstabilisation du pouvoir qui a été monté par les artisans du boycott électoral de 2010 pour détourner l’attention de la communauté internationale qui croyait déjà en un Burundi sécuritairement et politiquement stable, en vue de saboter le processus électoral de 2015. C’est ainsi que depuis 2012, certains leaders de l’opposition radicale ont lancé une campagne de désinformation, d’intoxication et de diabolisation du Gouvernement et du parti au pouvoir, en vue de les discréditer auprès de la communauté internationale. Ils ont appelé leurs fidèles à la désobéissance civile, à l’insurrection, au renversement du pouvoir par force et au terrorisme, tout cela pour contraindre le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple à dégager et laisser la place au Gouvernement de Transition dont l’objectif principal serait d’enterrer définitivement le système démocratique ‘‘un homme, une voix’’ au Burundi.
Par ailleurs, le Burundi a connu des attaques des groupes armés créés par les mêmes politiciens, longtemps avant les discussions sur la question du mandant présidentiel. Bref, l’histoire de mandat n’est qu’une invention pure et simple, ce n’est qu’une forêt qui cachait l’arbre. Ce n’est pas toute la communauté internationale qui est contre le Gouvernement du Burundi, ce n’est pas vraiment toute la communauté internationale qui veut piétiner la souveraineté de notre pays. Il s’agit de quelques puissances occidentales réunies au sein de l’Union Européenne, qui n’ont pas peut-être réussi à imposer leur diktat au pouvoir en place à Bujumbura, et qui par conséquent, lui sont devenus très hostile et essaient d’user de leurs positions au Conseil de Sécurité des Nations pour influencer les autres pays et organisations, en l’occurrence l’Union Africaine, sur la question du Burundi. Si toute la communauté internationale était opposée au Burundi, les résolutions de menace et d’intimidation contre le Burundi et son peuple n’auraient pas de difficulté à passer au Conseil de Sécurité des Nations Unies. Combien de fois ont-ils échoué? C’est parce qu’effectivement, il y a des pays qui comprennent notre cause et qui ne cessent de nous soutenir diplomatiquement. D’un côté oui, de l’autre non: B24 : Quel est l’impact de cette crise sur la vie économique du Burundi en général et sur le quotidien des ménages en particulier? On ne peut pas le nier, l’impact économique est là, que ce soit au niveau du pays ou au niveau familial. Avec la suspension des engagements de la part de certains partenaires au développement, certains projets en souffrent. La campagne de désinformation et de diabolisation en cours impacte négativement les investissements internes et étrangers et réduit l’afflux touristique. La violence et le terrorisme orchestrés par les insurgés dans certains quartiers de la capitale Bujumbura a sensiblement réduit l’activité économique, influençant par conséquent une baisse du revenu de l’Office Burundais des Recettes, OBR. Cependant, je ne suis pas de l’avis de ceux qui profitent de cette situation pour en faire une alerte globale, comme si le Burundi aller disparaitre ! Le Gouvernement continue à mener ses efforts pour parier à la situation et tous les indicateurs nous laissent croire que la situation continuera à s’améliorer davantage. Notons qu’à part les quatre quartiers de la capitale qui ont été la cible des insurgés, la situation n’a pas eu de répercussion sur les prix du marché. Par conséquent, la grande majorité des familles burundaises n’en ont pas souffert. Par ailleurs, aucun pays ou peuple au monde ne peut se développer à partir des aides étrangères seulement. Là, ils se trompent beaucoup car le Gouvernement n’est pas assis. Nous analysons et évaluons avec attention l’évolution de la situation macroéconomique de notre pays, et au besoin, nous arrêtons des mesures qui s’imposent pour que le fonctionnement de l’appareil étatique continue à la normale. Nous comptons par exemple renforcer les capacités de l’OBR, et cela nous privera de dépendre en grande partie de l’aide étrangère. Alors, concrètement, nous n’avons aucune inquiétude sur les salaires des fonctionnaires de l’état. Si le Gouvernement a pu payer les salaires du mois de décembre 2015 avant même la fête de Noël, qu’est-ce qui l’empêcherait d’honorer cet engagement dans les mois à venir alors que la situation sécuritaire s’améliore et que les performances de l’OBR sont déjà rassurantes? Le reste, ce n’est qu’une spéculation qui ne trompe personne. Nous appelons tous les fonctionnaires à continuer à vaquer quotidiennement à leurs occupations et nous les rassurons qu’il n’y aura aucune interruption de salaires. B24 : Quel est votre politique d’emploi à ces nombreux jeunes diplômés et chômeurs qui sont les cibles potentiels de la manipulation politicienne? En collaboration avec les associations des jeunes chercheurs d’emplois, les associations des employeurs, les universités, les confessions religieuses, etc., le Gouvernement du Burundi a élaboré et adopté sa Politique Nationale de l’Emploi (PNE) depuis 2014. Ensuite, un Office Burundais de l’Emploi et la Main d’œuvre (OBEM) a été mis en place en 2015 pour l’opérationnalisation de la PNE. Cet Office est chargé de l’encadrement et de la formation des jeunes à l’auto-emploi, car l’Etat n’est plus en mesure d’embaucher tous les jeunes qui complètent leurs études. Nous les appelons d’ailleurs au changement de mentalité, pour ne plus croire que l’Etat va leur donner de l’emploi. En complément, une Agence Burundaise pour l’Emploi des Jeunes a également été créée pour doter d’un Stage de premier emploi de 6 mois à 250 jeunes diplômés par an afin de les rendre compétitif sur le marché du travail. Nous avons aussi un Programme National de Volontariat des Jeunes qui aide les jeunes diplômés des provinces pilotes de Bujumbura, Ngozi et Gitega à acquérir de l’expérience professionnelle à travers le volontariat. La première promotion a vu la participation d’une centaine de jeunes volontaires en 2015, tandis que 150 autres sont en stage actuellement. Le Gouvernement du Burundi a également approché ses partenaires depuis 2013 pour appuyer sa politique d’emploi. Le Fonds International de Développement Agricole (FIDA) a répondu premier à l’appel à travers son Programme de Développement des Filières (PRODEFI). C’est ainsi que le projet « Emploi Jeunes Ruraux (EJR) » implanté dans deux provinces pilotes, Ngozi et Bubanza, est né. Il a déjà créé 6.214 emplois, mais son objectif est d’arriver à 20.000 emplois à la fin de 2016. Le FIDA a également financé un stage de premier emploi pour 100 jeunes diplômés. A cela s’ajoute des formations en entrepreneuriat à l’endroit des jeunes, à la fin desquelles les jeunes entrepreneurs sont dotés d’un appui de matériel afin de mettre en œuvre leurs projets et ainsi créer de l’emploi pour d’autres jeunes. Nous saisissons cette occasion pour lancer un appel aux autres Partenaires Techniques et Financiers de suivre l’exemple de ceux qui ont déjà manifesté leur appui au Gouvernement du Burundi pour que ces projets pour les jeunes arrivent dans toutes les provinces du pays. Bien plus, nous avons l’Agence Burundaise de Promotion des Investissements (API) qui accordent des facilités et avantages pour l’implantation de nouveaux projets d’investissement qui génèrent des milliers d’emplois. Le Président de la République l’a bien dit lors de l’émission publique qu’il a tenue en date du 30 décembre 2015. Les peuples rwandais et burundais sont des peuples frères qui ont toujours cohabité pacifiquement depuis l’existence de nos pays. Le Burundi n’a donc aucun intérêt à voir ses relations avec son voisin troublées. Mais depuis un certain temps, le Gouvernement du Burundi a justement constaté que le Rwanda est impliqué dans la perturbation de la sécurité intérieure du Burundi, notamment en entrainant et en armant militairement les réfugiés burundais pour attaquer notre pays. Nous l’avons dénoncé auprès de la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs (CIRGL) qui a par la suite recommandé l’envoi au Rwanda d’une équipe neutre en vue de mener des investigations sur notre plainte, mais le Gouvernement rwandais n’a manifesté aucune volonté de coopérer tel que demandé par la CIRGL. De notre côté, le Gouvernement du Burundi n’a aucune intention de nuire à ses relations d’amitié et de coopération avec le Rwanda. B24 : Que pensez-vous de ceux qui disent que le Burundi était en avance en matière de démocratie par rapport aux autres pays de la région, mais qu’il est malheureusement gangrené par la mauvaise gouvernance et la corruption? Ceux qui disent que le Burundi était en avance en matière de démocratie par rapport aux autres pays de la région ont tout à fait raison. Peut-être que vous seriez tentés de croire que certains pays de la région sont plus avancés que le Burundi, du fait que certains d’entre eux sont « stables » depuis plusieurs années, d’autres, comme la République Unie de Tanzanie, n’ont jamais connu de guerre civile ni de coup d’Etat depuis leur indépendance. Mais malgré les problèmes que le Burundi a connus, notre pays est resté exemplaire sur plusieurs aspects de la démocratie. A côté du fait que depuis 2005, il est dirigé par des institutions démocratiquement élues, le Burundi est le seul pays de la région où la liberté d’expression et d’association sont totales. Parfois des gens vont même au-delà des limites et se permettent d’insulter publiquement les dirigeants du pays sans aucune inquiétude. La presse indépendante et la société civile burundaise sont parmi les plus actives du continent africain. A cela s’ajoute la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme (CNIDH) et l’Institution de l’Ombudsman qui jouent un rôle prépondérant pour le respect des droits de l’homme. Concernant la mauvaise gouvernance et la corruption dont on parle, elles ne sont pas aussi alarmantes que nous le lisons dans les médias. Il est vrai que les deux restent de grands défis à relever, mais l’intensité avec laquelle ils sont parlés n’est qu’une suite logique de la campagne de diabolisation entretenue par certains membres de l’opposition radicale, de la société civile et de la presse farouche au Gouvernement du parti CNDD-FDD qu’ils détestent depuis le temps de la lutte armée. C’est aussi le résultat du manque d’amour de la patrie chez certaines gens qui décident de salir sciemment l’image de leur patrie lors des enquêtes internationales menées par leurs mentors pour un agenda obscur. Sinon, le Gouvernement n’a jamais croisé les bras devant ces défis. Des institutions spécialisées dans la lutte contre la corruption ont été créées et sont à l’œuvre. C’est le cas de la Brigade, le Parquet et la Cour Spéciale Anticorruption, l’Inspection Générale de l’Etat, l’Office Burundais des Recettes, etc. A cela s’ajoute la transparence dans l’utilisation du budget de l’Etat et la gestion de la chose publique, la diminution remarquable des marchés gré-à-gré, la suppression de tous les comptes des services de l’Etat qui étaient éparpillés dans les Banques Commerciales pour garder un seul compte du trésor public logé dans la Banque Centrale, pour ne citer que cela. Nous sommes conscients que des efforts supplémentaires doivent être fournis en vue d’éradiquer définitivement ces fléaux. L’avenir du Burundi et de sa population dans le cours et long terme est prometteur. Des indicateurs de développement sont visibles partout dans le pays. Le Burundi est entrain de réaliser des projets d’investissement de grande envergure sur les fonds propres au Gouvernement ou à travers les travaux communautaires. Il s’agit notamment de la construction des infrastructures socio-communautaires comme les hôpitaux, les écoles et les stades. Nous sommes fortement engagés dans la recherche d’une solution durable à la carence d’électricité. Des projets de construction des barrages hydroélectriques locaux et régionaux sont en cours et des centrales de production de l’énergie solaire sont entrain d’être installés dans différents coins du pays. Le projet de villagisation dans toutes les provinces du pays, accompagné par les efforts de mobilisation des investissements dans la mécanisation agricole, la subvention des engrais chimiques et la transformation agroalimentaire, laisse croire à un avenir meilleur pour la population burundaise qui vit, à plus de 90 %, de l’agriculture. Je vous signale également que le sous-sol burundais regorge des minières importantes. Certaines études sont déjà terminées, d’autres sont en cours, et toutes les conclusions convergent sur un grand potentiel de développement du pays et de sa population une fois ces ressources sont rationnellement exploitées.
B24 : On parle souvent de façon globalisée que la communauté internationale est contre votre gouvernement, est-ce vraiment toute la communauté internationale ou c’est une partie de celle-ci ? Donnez-nous des précisions?
B24 : Est-ce que l’attitude belge dans cette crise burundaise vous étonne?
•‘‘Oui’’ parce la Belgique, en tant qu’ancien pays colonisateur du Burundi et qui est resté parrain de notre pays depuis l’indépendance, ne devrait pas se comporter tel que nous le voyons aujourd’hui. Au lieu de parrainer le processus de dialogue interburundais en faveur d’une solution réconciliatrice respectant la souveraineté du peuple burundais, elle est devenue le porte-flambeau de ceux qui veulent replonger le Burundi dans la crise. Elle soutient directement et indirectement les putschistes qui ont tenté en vain de renverser le pouvoir le 13 mai 2015, elle protège farouchement ceux qui ont incité les mineurs à la drogue et à l’usage des armes à feu contre les populations civiles et les forces de l’ordre, elle use de sa position à l’Union Européenne pour influencer l’opinion diplomatique internationale sur la question du Burundi, pour ne citer que cela.
•Mais nous pouvons dire aussi ‘‘non’’ : La Belgique, elle-même hantée par les divisions entre ses deux communautés (wallonnes et flamandes) jusqu’à passer presque toute une année sans Gouvernement, faute d’entente, ne pourrait en aucun cas devenir model et avoir des leçons à donner au Burundi et aux Burundais. C’est la Belgique qui a introduit pour la première fois au Burundi les divisions ethniques, en favorisant une ethnie au détriment d’une autre, dans la gestion du pays. Ce que nous vivons aujourd’hui n’est que le résultat de leur entreprise malsaine, et le Gouvernement belge devrait y répondre tôt ou tard.
B24 : Les insurgés et les opposants tablent sur un éventuel manque de salaires pour les fonctionnaires dans les mois à venir. Vous confirmez cette affirmation?
B24 : Quel est le style de cohabitation avec le Rwanda dans l’EAC si celui-ci continue à abriter les entraînements des rebelles pour déstabiliser le Burundi?
B24 : Comment vous voyez l’avenir du Burundi et de sa population dans le cours et long-terme?
B24 : Vous avez participé à la COP21 à Paris, quelle a été la contribution du Burundi dans cette conférence? Le Burundi est-il pollueur?
Aucun pays ne peut prétendre ne pas être pollueur, c’est seulement le degré de pollution qui diffère ! Le Burundi n’est pas épargné, mais les pollueurs proprement dits sont les pays ayant leur secteur industriel développé qui produisent beaucoup de gaz à effet de serre. Le principe pour les pays pauvres comme le Burundi, et par conséquent les moins pollueurs, est que les grands pollueurs soient les grands payeurs.
Comme contribution, le Burundi a mis en place un vaste programme de reboisement à raison de 8.000 ha par an, de remplacement progressif de l’utilisation du bois de chauffage par des fours modernes à faible consommation en charbon, de plantation des arbres agro-forestiers et de promotion des énergies renouvelables, etc
B24 : Avez-vous un message particulier à lancer aux lecteurs de Burundi-24.com?
Bien sûr que oui! Nous les conseillons de lire l’information surtout sur le web et les médias sociaux avec un œil critique, prendre le temps de vérifier la réalité des faits avant d’en faire quoi que ce soit. Nous leur demandons de soutenir la paix et la démocratie au Burundi.
A ceux qui seraient déjà tombés dans le piège de détracteurs de la démocratie qui souhaitent replonger le pays dans la guerre civile pour aboutir à leurs intérêts égoïstes, nous leur demandons de réexaminer leur conscience, d’éviter de se laisser prendre par le mensonge et la manipulation, de se désolidariser avec toute idéologie divisionniste et de rejoindre le cercle des promoteurs de la paix.
Enfin, le Burundi reste une terre neuve pour l’investissement et le tourisme. Nous les invitons à explorer la beauté de notre pays et contribuer à la croissance de son économie par des projets d’investissements dans des domaines de leur propre choix. Vous êtes tous les bienvenus, la sécurité est garantie et la porte est grandement ouverte.
Merci Excellence le 2ème Vice-Président
Bacinoni Roberto