Monsieur le Président et cher collègue,
Je souhaite d’entrée de jeu vous remercier pour avoir organisé cette importante réunion de la configuration-Burundi dominée par la situation politique et sécuritaire dans mon pays.
Je saisis également cette bonne occasion pour remercier les Etats membres pour les multiples efforts qu’ils ne cessent de consentir afin d’aider les burundais à trouver des solutions durables à leurs préoccupations politiques.
Qu’il me soit en outre permis de remercier tous les intervenants pour leurs contributions inestimables à cette réunion.
Monsieur le Président,
Comme vous le savez, du 21 au 22 Janvier 2016, une forte délégation du Conseil de Sécurité des Nations Unies a effectué une mission de travail au Burundi, pour se rendre compte de la situation politique et sécuritaire qui prévaut dans le pays.
Même si elle l’a fait à d’autres occasions, ma délégation souhaite réitérer ses sincères remerciements au Conseil de Sécurité des Nations Unies pour avoir pris l’initiative de se rendre au Burundi afin d’être en contact direct avec la réalité sur terrain malgré les images négatives et les rapports alarmistes véhiculés par certains milieux qui ne cessent de présenter le Burundi comme un pays meurtri où ne coule que le sang. Au cours de son séjour, la délégation a pu rencontrer les différents acteurs de la société burundaise, les politiciens, la société civile, les leaders religieux ainsi que les officiels dont les représentants du Gouvernement, son Excellence le Président de la République en tête, avec qui ils ont pu échanger en toute franchise sur la situation générale du pays.
Ma délégation est particulièrement satisfaite que la délégation ait généreusement accepté de parcourir une bonne partie du pays par route, et qu’elle a pu constater que la paix et la sécurité dans le pays ne font plus objet de doute, sans oublier la chaleur et l’accueil lui réservés par la population burundaise. Par cette visite également, le conseil a pu constater une nette différence entre le Burundi virtuel tel qu’on le présente dans certains médias et sur les réseaux sociaux et le Burundi réel que les membres du Conseil ont vu et senti sur place.
Monsieur le Président, lors de votre dernière visite au Burundi au moins de novembre 2015, le problème majeur était notamment lié à la radicalisation d’une poignée de gens qui n’ont pas voulu que les élections de 2015 se tiennent dans le but de déboucher sur un vide institutionnel suivi d’un gouvernement de transition issu des arrangements politiques sans passer par la voie des urnes.
Aujourd’hui, et c’est un constant général, ce sont ces mêmes gens qui à l’époque disaient qu’ils manquaient de l’espace politique pour s’exprimer en vue des élections apaisées, qui se sont soudain transformés en une opposition radicale, violente et armée qui met en avant le recours à l’extrême violence pour récolter des gains politiques. Ils viennent d’adopter une nouvelle stratégie dite « de lance grenade à l’aveuglette » dans le l’objectif d’attirer l’attention de la communauté internationale sur l’état sécuritaire au Burundi, oubliant que ce comportement violent envers les civils a été fortement condamné dans la résolution 2248 du Conseil de Sécurité ainsi que par le dernier Communiqué qui a sanctionné la réunion du CPS de l’UA au niveau des Chefs d’Etat, tenue le 29 janvier 2016 à Addis-Abeba en Ethiopie. Ce virage au terrorisme local est à condamner. Vous conviendrez avec moi que le fait de lancer une grenade dans les foules, restaurants, bars, stations d’autobus qui emportent enfants, femmes, vieillards constitue un acte terrorisme et non un combat politique.
Monsieur le Président, Permettez-moi de dire un mot sur le 26ème Sommet de l’Union Africaine qui vient de se terminer à Addis-Abeba. Comme vous le savez, en date du 30 et 31 janvier 2016, il s’est tenu à Addis-Abeba en Ethiopie un Sommet des Chef d’Etat et de Gouvernement de l’Union Africaine. Entre autres questions analysées, il s’agissait d’approuver ou rejeter la décision unilatérale prise par le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union de l’Union Africaine au niveau des Ambassadeurs au mois de décembre 2015 de proposer l’envoi au Burundi d’une force militaire forte de 5.000 hommes.
Ma délégation saisit cette occasion pour saluer le communiqué du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA), en sa 571ème réunion tenue le 29 janvier 2016, au niveau des chefs d’Etat et de Gouvernement, qui a adopté la décision sage de ne pas envoyer de telles troupes sans la demande ni le consentement du peuple burundais qui a jugé inopportun un tel déploiement d’autant plus que les forces de défense et de sécurité burundaises assurent la sécurité de toute la population dans sa diversité ethnique, politique, régionale et de genre.
Tout comme la plupart d’entre vous, ma délégation estime que l’option politique dans la résolution des crises reste la meilleure option. L’option militaire ne peut être envisagée qu’en dernier ressort après avoir tout essayé et tout échoué. Quoi que nous ayons des préoccupations d’ordre sécuritaire dans quelques rues de Bujumbura, il n’y a aucun critère objectif qui justifierait un tel déploiement dont la promotion était assurée par l’opposition radicale à partir de ses bases à l’étranger ainsi que leurs sympathisants étrangers.
Nous nous félicitons en outre de la décision prise à la même occasion par l’Union Africaine à travers le même Communiqué en son article 11.b d’envoyer une mission de haut niveau au Burundi afin de s’entretenir avec les autorités nationales du processus de dialogue inter burundais. Une telle mission avait été pourtant demandée et à maintes reprises par le Gouvernement du Burundi car c’est la seule occasion de se rendre compte de la réalité politico-sécuritaire qui prévaut au Burundi. Tout naturellement nous lui réserverons un accueil chaleureux et une entière disponibilité pour échanger sans tabou sur toutes les questions qui intéressent les Burundais en ce moment précis. En toute logique, c’est par là que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine aurait dû commencer avant de prendre sur base d’informations peu documentées, la décision inappropriée de déployer une force sans évaluer sa pertinence et sans consulter le pays concerné.
Monsieur le Président, concernant cette manipulation, le Gouvernement du Burundi dénonce et condamne la persistance des opinions, pour qui l’envoi de ces forces étrangères au Burundi restait une préoccupation principale jusqu’aux dernières minutes du Sommet et qui n’ont pas hésité par moment, à recourir à des manœuvres non recommandables comme la production des rapports falsifiés et accablants jusqu’à produire et diffuser des images truquées dans le but d’influencer les décisions des hautes instances internationales.
On se souviendra à cet effet qu’à la veille de l’arrivée tant attendue d’une délégation du Conseil de Sécurité des Nations Unies envoyée en date du 21 janvier 2016 pour se rendre compte de l’état de la sécurité dans le pays, la Chaîne de télévision « France 3 » a diffusé des extraits très violents et macabres d’une vidéo lui remise par Maître Bernard MAINGAIN, avocat de nationalité belge qui défend la cause de l’opposition radicale et particulièrement des putschistes du 13 mai 2015, sur de prétendus crimes commis au Burundi, plus précisément à Karusi au centre du pays.
La chaine France 3 avec l’interview de l’avocat belge Bernard Mainguin à l’appui, ont attribué faussement ces atrocités aux forces de sécurité burundaises, et aux jeunes du parti au pouvoir. Il est clair que la diffusion de cette vidéo extirpée de l’étranger visait à influencer négativement les résultats de la visite du Conseil de Sécurité. De même, à la vielle du Sommet de l’Union Africaine, certaines ONG que je ne citerai pas, elles se reconnaîtront, ont fait des publications douteuses avant cette activité qui était tant attendue, dans le seul but d’influencer le CPS sur ses conclusions sur le Burundi.
Au cas où cette ONG qui s’est déclarée être dotée de la haute technologie satellitaire œuvrait sincèrement pour les droits de l’homme de tous et de partout, elle devrait plutôt orienter ses projecteurs « intelligents et sans faille» sur les camps de recrutement et d’entraînements de réfugiés burundais au Rwanda voisin qui n’épargne même des enfants soldats en violation de la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, convention qui, comme vous savez, constitue le document clé de voûte de la protection des réfugiés. Maintenant que les preuves irréfutables de cette déstabilisation sont là, des messages forts devraient être adressés dès demain à ce voisin pour lui demander de cesser immédiatement son comportement belliqueux qui ne profite à personne dans notre région et dans nos deux pays respectifs.
A ce sujet, ma délégation salue le fait que l’UA lors de la réunion du CPS au Niveau des Chefs d’Etats ait réitéré l’attachement de notre organisation continentale au respect de l’indépendance et de l’intégrité territoriale du Burundi et, à ce titre, a condamné les attaques armées contre ses installations militaires, ainsi que toute tentative de déstabilisation, quel qu’en soit l’origine, la nature ou l’auteur.
Par ailleurs, ma délégation a également accueilli positivement la recommandation du Sommet de poursuivre le Dialogue inter burundais déjà lancé sous les auspices du Président Ougandais Yoweri Kaguta Museveni. A cet effet, le Gouvernement voudrait rappeler qu’il a toujours mis en avant le Dialogue et qu’il n’attend que l’arrivée au Burundi d’une délégation de la médiation pour discuter des modalités pratique de sa poursuite afin de parvenir à des conclusions constructives, notamment en ce qui concerne deux questions extrêmement pertinentes, à savoir les critères objectifs d’identification des participants ainsi l’agenda des prochaines sessions.
Monsieur le Président, comme vous le savez, le peuple burundais a une longue tradition de dialogue. Armé des expériences du passé et résolu à éviter les erreurs commises auparavant, Il demeure capable de résoudre les conflits internes par le dialogue et les moyens pacifiques entre Burundais. Ceci étant dit, les critères de neutralité, d’impartialité et par-dessus tout de transparence doivent être strictement respectés.
Dans le même ordre d’idées, mon pays le Burundi accueille favorablement les bons offices du SG en appui au dialogue national en cours dans toutes les provinces du pays sous le leadership de la CNDI. A ce sujet, des instructions claires dans ce sens ont été administrées aux services concernés leur demandant de se mettre sans attendre à la disposition du Conseiller Spécial du Secrétaire Général, et de coopérer étroitement avec son équipe qui est déjà sur le terrain, afin de définir conjointement quel type d’assistance nécessaire à apporter au processus de dialogue national inclusif, ainsi que dans les domaines du renforcement des capacités dans le secteur de la sécurité, du désarmement et des droits de l’Homme, sans oublier de relèvement socio-économique du pays, socle d’une paix durable.
Monsieur le Président, en ce qui concerne les questions des droits de l’homme au Burundi, je dois rappeler ici que le Burundi est le patrimoine commun de tout le peuple et que le Président NKURUNZIZA est le Président de toutes les Burundaises et Burundais dans leurs diversité ethnique, politique, régionale et du genre. La répression n’a jamais été et ne sera jamais la politique de son Gouvernement. Le Président de la République est plus que résolu, et il a donné des instructions claires à cet égard, pour que les mesures nécessaires soient prises immédiatement afin de mettre un terme aux actes de violence observés surtout dans quelques localités circonscrites à Bujumbura la capitale. Le Gouvernement du Burundi a adopté une politique de tolérance zéro en matière des violations de droits de l’Homme. C’est une question de principe.
Le Burundi réitère devant les partenaires que vous êtes, son attachement profond aux questions des droits de l’homme. Tout n’est pas parfait certes, mais des efforts ont été consentis pour améliorer le respect des droits de l’homme au Burundi. Tout comme dans plusieurs autres pays, un long chemin reste à parcourir, mais la volonté de bien faire est là et bien vivante. L’espoir d’y parvenir avec votre appui est permis. Le Burundi dispose d’une Commission indépendante pour les Droits de l’Homme qui est fonctionnelle. Le Gouvernement compte renforcer ses capacités avec l’appui des partenaires que vous représentez ici.
Aussi voudrais-je rappeler que la Commission Nationale des Droit de l’homme indépendante a la compétence de recevoir toutes les plaines et allégations en matière de violation des droits humains. Si des cas d’allégations sont confirmés par la commission, le Gouvernement est disposé à prendre des mesures appropriées pour rendre pénalement responsables les auteurs d’actes répréhensibles. Dans le but de travailler dans transparence totale, le Gouvernement du Burundi à travers ses services compétents collabore étroitement avec le Bureau du représentant du Haut-Commissaire aux Droits de l’Homme, à qui nous avons accordé le plein accès à tous nos services sans limitation.
S’agissant du MoU sur l’augmentation des observateurs militaires et des droits de l’homme de l’UA, l’accord de principe est déjà acquis, restent quelques petits détails à discuter entre les deux parties dans un esprit de coopération et de respect mutuel. Cette semaine Notre Ministre des relations Extérieures et de la Coopération Internationale a reçu en audience l’envoyé spécial de l’UA dans la région des Grands Lacs, les discussions sur ce sujet ont été très productives.
Monsieur le Président, pour ce qui est de nos attentes de la part de l’ONU, le Burundi reste ouvert à toute assistance onusienne en matière de droits de l’homme, de soutien au processus de dialogue, de la réconciliation à travers la CVR et en matière de renforcement des capacités dans le secteur de sécurité et du désarmement. A ce titre, nous saluons le déploiement de l’équipe onusienne du Conseiller Spécial du SG, conformément à la résolution 2248 du Conseil de Sécurité. La CNDI et les autres services sont à leur disposition pour définir ensemble l’assistance dont le Burundi a besoin en ce moment précis. Le Burundi compte aussi sur la configuration-Burundi de la Commission de Consolidation de la paix pour continuer à mobiliser les ressources en faveur de son développement économique et social. Ce serait une erreur de laisser les priorités politiques prendre le dessus sur les besoins urgents de développement socio-économique. La Configuration pourrait entre autre servir de pont entre le Burundi et ses partenaires techniques et financiers pour reconstruire la confiance perdue durant les turbulences politiques qui ont entouré notre processus électoral. Ma délégation espère que le Fonds de Consolidation de paix pourra rapidement lancer de nouveaux projets adaptés à la situation actuelle, notamment des projets à impact rapide en faveur des jeunes, des femmes et autres groupes vulnérables. De la parole à l’action, nous y parviendrons!
Je vous remercie Monsieur le Président !
New York, 10 février 2016