Les récentes mesures d’ouverture prises par le chef d’État Burundais, sont un bon présage pour la fin de ce mois de février, riche en consultations diplomatiques de très haut niveau. La tendance est désormais à l’optimisme, si les autres acteurs concernés agissent dans le même esprit pour concrétiser ces mesures.

En effet, en marge de son tête- à- tête avec Ban Ki Moon, secrétaire général des nations unies venu express à Bujumbura pour rencontrer le numéro un burundais, et à la veille de l’arrivée d’une très haute délégation de cinq chefs d’État dépêchés au Burundi par l’Union Africaine, le Président NKURUZIZA a pris d’importantes mesures, de nature à décrisper sérieusement l’atmosphère.

Ainsi, pas moins de 2000 prisonniers vont être élargis et d’autres suivront, levée des mandats en faveur des cadres de l’opposition radicale et ceux de la société civile qui s’identifient à cette opposition, confirmation de l’ouverture d’un dialogue inclusif. Ces mesures positives ne concerneront pas cependant les auteurs de la tentative du putsch du 13 mai, et fort logiquement ceux qui sont identifiés comme étant derrière le terrorisme urbain à Bujumbura.

Pour ces commanditaires du terrorisme urbain, personne ne peut raisonnablement parler pour eux, mais pour les putschistes du 13 mai , on aurait pu espérer qu’ils puissent aussi bénéficier de cette mesure de clémence. Mais, il faut dire que les intéressés eux-mêmes, n’ont pas laissé beaucoup de choix au Président, en plaidant très maladroitement leur cause, ne fût- ce qu’au niveau de la forme.

En effet, au moment où cet acte est unanimement condamné , les putschistes , leurs amis et conseils sont restés avec une certaine arrogance, allant jusqu’à se justifier et à déclarer qu’ils seraient même prêts à le refaire si c’était à recommencer. Ils auraient eu probablement des » promesses » de soutiens en cas de récidive, mais là ils ont été trop téméraires.

Selon eux, le pouvoir en place serait lui-même coupable, de coup de force contre la constitution et l’Accord d’Arusha. Or, qu’on le veuille ou pas , il faut se rendre à l’évidence : non seulement ce pouvoir a reçu la légitimité du peuple souverain, mais aussi la cour constitutionnelle, l’instance habilitée, a tranché favorablement pour le Président NKURUNZIZA .

Quant à l’accord d’Arusha, s’agit-il d’un problème dans son application , aisément vérifiable, ou plutôt de la contestation pure et simple de celui-ci, par ceux-là même qui avaient déjà émis de sérieuses réserves, lors de sa signature en Août 2000?
La mesure la plus attendue et la plus souhaitée tant au niveau national qu’international, concerne cette confirmation par le Président de la République, de l’ouverture d’un dialogue inclusif. Là aussi , les putschistes et les auteurs d’actes de terrorisme ne devraient pas y être conviés.

Ceci nous rappelle les événements de 1993 et des années qui ont suivi. A cette époque, pas très lointaine, des putschistes dont certains sont encore aujourd’hui actifs, ont décapité l’État et exigé dans la foulée des négociations. Pour y parvenir, l’histoire se répète, ils ont procédé par un terrorisme urbain, connu sous le nom de « ville morte » ou mouvement des sans échecs qui tuaient sous l’œil complice et approbateur de la gendarmerie et de l’armée.

De Kajaga-Kigobe en 1994, ces négociations ont abouti , 6 ans après, à la signature de l’Accord d’Arusha. Celui-ci n’a pas certes ramené directement la paix, puisque les FDD et les FNL ont poursuivi leur combat, mais il a permis, au moins, de jeter des bases solides pour une cohabitation pacifique entre ethnies jadis antagonistes.

Aujourd’hui, la donne a changé, l’armée et la police nationale ne peuvent plus tolérer ceux qui perturbent la sécurité . Ceux qui s’agitent aujourd’hui , allant jusqu’à utiliser de gros mots, comme génocide et autres, n’ont pas levé le petit doigt lors de l’épuration ethnique urbaine des années 90. Par contre, nous constatons que parmi ceux qui ont pu échapper à cette épuration, grâce à l’exil, il y en a qui, aujourd’hui sont , la main dans la main avec leurs » bourreaux » d’hier, allant jusqu’à les accompagner à la HAYE pour ouvrir des dossiers.

Bonne réconciliation, pour un nouvel objectif, dirait-on, et pourvu que ça soit sincère. Je suis aussi pour la réconciliation et contre l’impunité, tout en étant partisan du pardon, moyennant amendement et réparations. Mais, pour que ce tribunal soit fiable, il devrait procéder par ordre chronologique des faits, et pour ce faire, certains de ceux qui se sont rendus récemment à la Haye pour ouvrir des dossiers à charge contre les autres, n’en seraient pas revenus indemnes.

Et Quid de l’opposition radicale dans tout cela?

Échaudée par le soutien remarquable de personnalités d’envergure en Afrique et en Occident, galvanisée par des pressions tous azimuts , parfois fort exagérées et injustes contre le pouvoir de Bujumbura, l’opposition radicale burundaise réunie autour du CNARED et de la société civile a cru que tout était à son affaire.

A part le fait que certaines de ces personnalités politiques hauts placées n’agissent pas toujours, nécessairement en concertation avec leurs gouvernements, qu’ils sont guidés parfois pour leurs intérêts privés et donc à portée limitée, cette opposition radicalisée a semblé oublier que la communauté internationale, importante soit elle, a lui aussi des normes à respecter, que des États puissants soient-ils, n’agissent pas comme ça, contre un autre État souverain.

Et maintenant, avec cette ouverture du gouvernement burundais, saluée par la communauté internationale, l’opposition radicale dont on se demande finalement ce qu’elle veut et surtout ce qu’elle vaut, se contente de jeter tout en bloc, exigeant des solutions non réalistes , compte tenu du contexte.

Ainsi , au dialogue inclusif futur, personne parmi les partenaires et médiateurs internationaux, n’envisage d’imposer à un gouvernement élu de devoir tout chambarder pour une nouvelle énième transition. En plus, avec cette heureuse levée de mandats, ce dialogue pourra continuer à se tenir au Burundi et à l’extérieur selon les circonstances.

Encore une fois, l’opposition radicale qui semble en train de s’organiser administrativement, avec notamment un pléthore de personnalités hétéroclites en charge de la diplomatie, serait mal inspirée en optant pour la voie de la violence, comme beaucoup de signes semblent l’indiquer.

Cette option, même si elle arrange certains d’entre eux, risque surtout de se heurter à un désaveu d’une population qui a le plus souffert des décennies de guerre civile, sans oublier que les organisations de la communauté internationale qui ont, un moment ,soutenu les thèses de l’opposition , auront du mal à avaliser cette violence, surtout pas après la belle éclaircie venue de Bujumbura.

Anatole BACANAMWO