La démission de l’ambassadrice américaine auprès des Nations-unies est une surprise. Et les raisons qui l’y ont conduite également ; ambitions polittique ? Fatigue et lassitude ? ou potentiel scandale ?
ikki Haley avait bien caché son jeu. Personne dans l’Administration Trump, pas même le secrétaire d’État Mike Pompeo, n’était au courant de la démission imminente de l’ambassadrice américaine auprès des Nations unies. Tout juste une poignée de conseillers proches à la mission des Etats-Unis, dans Midtown à Manhattan, lui avait-elle suggéré de repousser de quelques jours cette annonce fracassante. La décision de l’ancienne gouverneure de Caroline du sud, en effet, était prise depuis plusieurs jours. Mais la semaine écoulée était tout entière dédiée à la nomination du juge Brett Kavanaugh à la Cour suprême. Et Nikki Haley ne voulait pas faire de l’ombre au grand combat judiciaire voulu par Donald Trump, prévenu en toute discrétion. Sans doute voulait-elle également s’assurer que sa sortie serait remarquée, en prévision de la suite.
Des ambitions présidentielles ?
Quelle suite ? Ce mardi, les médias américains s’interrogeaient sur les dessins de la diplomate d’origine indienne, à laquelle on prête des ambitions présidentielles. Reculer en 2018, pour mieux sauter en 2020, ou 2024 ? « Je suis celui qui a sorti ce scoop et je ne peux absolument pas vous dire ce qui se trame vraiment en coulisses », sourit Jonathan Swan, du site Axios. Rien, a priori, du moins à court terme. A 10h30, ce ardi matin, dans le Bureau ovale, à côté d’un chef de l’État souriant, la première intéressée a affirmé ne rien briguer en 2020, et au contraire vouloir « soutenir à fond Donald Trump » dans sa campagne de réélection.
A 46 ans, Nikki Haley a la vie devant elle. Et sa priorité semble être de « faire une pause », une fois sa parenthèse de deux ans à New York refermée. Mère de deux filles de 16 et 20 ans, habituée au cadre paisible de la Caroline du sud, elle n’avait jamais caché que l’installation dans la mégapole industrieuse du nord-est « yankee » avait été difficile, pour la famille, comme pour elle à l’ONU. Avant d’endosser les galons d’ambassadrice de la première puissance du monde et de membre permanent au Conseil de sécurité, Haley n’avait jamais tâté de la diplomatie. Elle s’en est très honorablement sortie, aux dires de ses pairs déçus de la voir partir. Nombre de diplomates lui savent gré en effet d’avoir énergiquement désamorcé les menaces de la Maison Blanche à l’encontre de l’organisation.
Il fallait sabrer dans les dépenses, tous azimuts, et dénoncer tous les traités, toutes les instances n’œuvrant pas dans le sens imparti à l’Amérique de Trump. Nikki Haley n’a donc pu empêcher le départ des Etats-Unis de la commission des droits de l’homme ni de l’UNESCO, de l’accord de Paris sur le climat, du pacte mondial sur les migrations ou de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien, tous trois sanctionnés par l’ONU. Pas plus qu’elle n’a pu empêcher la réduction de l’aide internationale, en particulier à l’Autorité palestinienne, ou celle du nombre de réfugiés autorisés à entrer chaque année aux Etats-Unis (30.000 désormais, contre le double auparavant).
Par Maurin Picard