Mères infanticides : une combinaison de facteurs

Une mère vient de commettre un infanticide dans la commune urbaine de Musaga. La mère est derrière les barreaux et attend son jugement. Un psychologue nous dresse le profil psychologique de ces mères infanticides.

Un bébé d’un mois et trois semaines a été retrouvé mort, jeté dans les latrines par sa mère dans le quartier «Tchétchénie» en commune urbaine de Musaga. L’enfant tuée était la dernière d’une fratrie de quatre enfants. Selon des proches de la mère infanticide, c’est un acte désespéré. La jeune maman a accouché alors que son mari l’avait quittée, enceinte de six mois. Elle s’est retrouvée seule sans aucune source de revenus et avec des enfants à sa charge.

La vie de la jeune maman n’a jamais été un long fleuve tranquille, selon toujours ses proches. Née à Matongo en province de Kayanza, la jeune fille a été séduite par un jeune homme de sa colline. Ils ont quitté Matongo pour Bujumbura à la recherche d’une vie meilleure. Le jeune couple s’installe dans la commune urbaine de Cibitoke. Ils se retrouvent confrontés à la dureté de la vie dans la capitale. Sans diplôme en poche, le mari travaille et cumule de petits métiers sans revenus suffisants. Entre-temps, la famille s’agrandit. Le couple donne naissance à trois enfants.

Transmission du sida à son enfant

Selon une connaissance de cette famille, la femme racontait que son mari la trompait constamment. Et elle a fini par faire ses valises et retourner chez ses parents. Mais ils se sont réconciliés et elle est revenue à Bujumbura. Ils se sont installés dans la commune urbaine de Musaga. Très vite, elle tombe enceinte de son quatrième enfant. A six mois de grossesse, le mari la quitte. Et elle raconte avoir découvert qu’elle est séropositive après l’accouchement. C’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Elle ne pouvait pas supporter l’idée d’avoir transmis le virus à son enfant et a décidé de « lui épargner les souffrances dues à sa maladie ».

Les soigner ou les punir ? Pour le psychologue Jean Marie Sindayigaya, « avant de punir conformément à la loi, il faut d’abord considérer l’état psychologique de la personne au moment de la commission d’un infanticide. » Il propose d’abord de faire une expertise pour savoir si la personne était en possession de toutes ses capacités psychiques durant la commission du crime. Et de conclure : « S’il est prouvé qu’elle est psychologiquement perturbée, la personne devra nécessairement bénéficier de circonstances atténuantes. »

Mere InfanticidesPour Jean Marie Sindayigaya, psychologue, dans la plupart des cas d’infanticide – pas d’études sur le sujet -, les auteurs sont des mères célibataires. « L’enfant n’est pas désiré. Dans ce cas, elles ne sont pas préparées à la maternité. En plus, cette conception s’est faite hors mariage, ce qui est condamnable par la culture, et elles se sentent stigmatisées par la société. » De ce fait, explique-t-il, une angoisse de culpabilité suivie d’un déni de grossesse est la première cause de l’infanticide. « Comme la tendance humaine est toujours de se protéger de tout ce qui est angoissant, elles adoptent un mécanisme de défense contre la honte et la culpabilité ressenties. »

Du reste, le déni de paternité est aussi une cause. « Il y a un conflit qui naît au niveau du psychisme de la mère. Certaines rejettent alors cet enfant », précise Jean Marie Sindayigaya. Psychologiquement, il se crée un mécanisme appelé « déplacement ». Il s’agit du fait que la mère en question transfère son angoisse sur une autre personne ou sur une autre situation qui n’a pas été l’origine de l’angoisse. D’où l’explication de plusieurs mères infanticides selon laquelle elles affirment être incapables de prendre en charge l’enfant. « En général, ce sont des personnes faibles psychiquement. Commettre un infanticide est synonyme d’éviter d’être confronté à un enfant qui est la source d’angoisse. »