[bleu ciel]AFP[/bleu ciel],
La commission électorale a proclamé lundi cette victoire largement attendue après les élections présidentielle, parlementaires et régionales qui se sont déroulées du 13 avril au 16 avril. Omar el-Béchir, réclamé par la Cour pénale internationale pour génocide au Darfour, avait pour seuls concurrents 13 inconnus, l’opposition ayant boycotté le scrutin en estimant que les conditions n’étaient pas réunies pour une élection libre et juste. Selon la commission électorale, la participation a atteint 46,4% sur les quatre jours de vote.
La mission d’observateurs de l’Union africaine avait pourtant indiqué après la fin du scrutin avoir «observé un taux de participation généralement faible». Il n’y avait pas eu foule dans les bureaux de vote, en dépit de la décision de la commission électorale de donner un jour supplémentaire aux Soudanais pour voter. Le parti de Béchir a également gagné haut la main les législatives en remportant 323 des 426 sièges du Parlement.
Ce scrutin controversé, deuxièmes élections multipartites depuis l’arrivée au pouvoir de Omar el-Béchir en 1989 après un Coup d’Etat, a été critiqué notamment par l’Union européenne, la Grande-Bretagne, la Norvège et les Etats-Unis.
Ces trois derniers pays avaient regretté dans un communiqué commun «l’échec du gouvernement du Soudan à organiser des élections libres, justes et dans un climat propice».
De telles critiques ont été qualifiées de «colonialistes» par le raïs soudanais âgé de 71 ans, qui s’est félicité vendredi du succès de ces élections organisées en dépit «du blocus oppressif et injustifié visant depuis plus de 25 ans» le pays. Depuis 1989, le Soudan est isolé sur la scène internationale et, depuis 1997, sous le coup d’un embargo commercial américain.
Omar el-Béchir est sous pression pour entamer un dialogue avec ses détracteurs afin de sortir de cet isolement de plus en plus pesant pour son économie étouffée par les sanctions et une dette qui gonfle.
OFFENSIVE DIPLOMATIQUE
Le président «ne peut pas ignorer les appels au dialogue car il s’agit d’une exigence régionale et internationale en plus d’être réclamé à l’intérieur» du pays, estime l’analyste politique Adel al-Baz. Avant même le vote, la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini avait averti que ces élections ne pourraient produire de résultats «crédibles» en raison de l’échec du pouvoir à initier des pourparlers.
En 2014, Omar el-Béchir avait annoncé l’ouverture d’un dialogue national pour résoudre les conflits qui font rage au Darfour et dans les provinces du Kordofan-sud et du Nil-Bleu, où des rebelles armés s’estimant marginalisés défient les autorités fédérales. Mais ce dialogue, considéré par de nombreux pays occidentaux comme une condition préalable à tout assouplissement des sanctions, n’a toujours pas démarré.
Au contraire, Omar el-Béchir a resserré dernièrement son emprise par une série d’amendements constitutionnels lui attribuant de plus grands pouvoirs. Or depuis la partition du Soudan en 2011, Khartoum, dont l’économie avait décollé dans les années 2000 grâce aux exportations de brut, a perdu la majorité de ses revenus, les plus grands champs pétroliers étant situés au Soudan du Sud.
«La dette souveraine soudanaise a dépassé les 40 milliards de dollars, que le pays est incapable de rembourser», souligne l’économiste Hassan Makki.
«Le gouvernement veut donc un effacement des dettes» mais «cela n’arrivera pas tant qu’il ne change pas sa politique». Khartoum a lancé une offensive diplomatique ces dernières semaines en rejoignant la coalition initiée par l’Arabie saoudite pour lutter au Yémen contre des rebelles chiites liés à l’Iran.
Selon Hassan Makki, Omar el-Béchir a «estimé que l’alliance militaire du Golfe au Yémen lui offrait la possibilité d’ouvrir de nouvelles voies», en se rapprochant des Saoudiens, après avoir été proche de leur ennemi juré, l’Iran.