Retour sur les révélations d’un ancien législateur de la constitution

 En tant que défenseur des droits humains et ancien député de la société civile, membre de la Commission de justice et des droits du Parlement de transition (1998 – 2005) ayant participé à la rédaction de la Constitution actuelle de la République du Burundi;

 En tant que juriste, soucieux de la stabilité de mon pays;

 Et conscient de l’esprit de l’Accord d’Arusha qui a guidé l’élaboration et l’adoption de la Constitution qui régit actuellement la République du Burundi;

 En tant que citoyen, je suis accablé par la responsabilité d’informer l’opinion publique nationale et internationale sur le véritable sens de l’article 96 de la Constitution dont j’étais législateur en soumettant ce témoignage dans les termes suivants:

1. Le débat qui soulève la controverse sur l’éligibilité ou non de l’actuel Président de la République en Juin 2015 découle de la malhonnêteté intellectuelle de certains politiciens et en particulier le fait que certains ténors de la société civile ne sont pas suffisamment informés de la teneur de l’ancien texte envoyé par le Gouvernement au Parlement en 2004.
2. L’article 96 est autonome et clair. Il reflète l’esprit et l’intention du législateur que j’étais. Il n’y a pas de floux dans cette disposition qui institutionnalise [l’élection du Président de la République] au suffrage universel direct renouvelable une fois. L’exception prévue à l’article 302 découle d’un test démocratique, une sorte d’arrangement politique, qui a mis l’épicentre du pouvoir dans le Parlement (voir article 116). C’est pourquoi en 2004 nous avons imaginé un Président de la République sans pouvoir constitutionnel.

3. Le projet de Constitution original envoyé au Parlement en 2004 et le rapport résultant de la session d’Octobre 2004 mettent en lumière ce qui est déclaré dans les lignes qui précèdent. Le respect de l’Accord d’Arusha dans le cadre de l’élection présidentielle commence donc en 2010, après l’élection au suffrage universel direct conformément à l’article 96.

4. Il serait injuste et inconstitutionnel de refuser à l’actuel Président qui a le droit de jouir de ses droits civiques et politiques, de se porter candidat pour la deuxième fois à l’élection au suffrage universel direct, s’il souhaite le faire. Il serait également un grave déni de la souveraineté du peuple dans le cadre des dispositions de l’article 96 de la Constitution de la République du Burundi, de lui refuser de jouir de son droit.

Fait à Bujumbura le 13 mars 2015
Hon. Laurent GAHUNGU, Ancien député et militant des droits humains