Position du Gouvernement du Burundi sur la crise actuelle à laquelle le pays fait face

Le Gouvernement du Burundi apprécie les préoccupations de la Communauté Internationale et de la Région sur la crise que traverse le pays. Le Gouvernement constate que, même avant la crise actuelle, le Burundi avait été l’année dernière l’objet de discussions au Conseil de Sécurité de l’ONU plus de fois que d’autres pays confrontés à des conflits et des crises humanitaires.
Des rapports ont été publiés pour diaboliser le Gouvernement du Burundi, et ces rapports ont maintenant évolué avec les médias internationaux et des agents étrangers qui encouragent et soutiennent ouvertement les rumeurs accompagnées de manifestations violentes dans quelques quartiers de la capitale burundaise, provoquant ainsi un exode de réfugiés vers les pays voisins, surtout en provenance des zones frontalières.
La récente tentative de coup d’état a joué énormément dans ce complot et avait pour objectif de faire en sorte qu’il y ait un Gouvernement de transition au Burundi longtemps réclamé par les organisateurs des manifestations.
Malgré ces tentatives que seule l’histoire jugera, le Burundi a, en tant que membre responsable de la Communauté Internationale, ouvert ses portes à tous ceux qui souhaiteraient de bonne foi découvrir la vérité. Le Gouvernement réaffirme que les faits sur le terrain contredisent ces rapports qui inspirent les médias internationaux et qui façonnent malheureusement l’opinion internationale et régionale.
Le Gouvernement du Burundi est toutefois profondément préoccupé par l’activité diplomatique en cours qui tend à saper, et dans une large mesure, à dénigrer les institutions républicaines et constitutionnelles du Burundi. Le Gouvernement regrette que certaines délégations d’Envoyés spéciaux et des Comités d’Eminentes Personnalités dépêchés par la communauté internationale pour aider à trouver des solutions à la crise actuelle, débarquent au Burundi avec des idées et des recommandations préconçues sans se donner la peine de vérifier les faits sur le terrain.
A cet égard, le Gouvernement du Burundi souhaite faire connaitre sa position sur différents aspects de la crise qui devrait servir de guide et de conseil à toutes les délégations qui cherchent à s’engager sur la piste d’une véritable solution à la situation qui prévaut dans le pays. Sur ce, le Gouvernement tient à souligner que, bien qu’il apprécie les conseils de tous ceux qui sont préoccupés par la situation, certaines questions qui touchent à la souveraineté, la constitutionnalité et la primauté du droit qui régit la République du Burundi ne peuvent être sujets à débat. La position suivante devrait donc servir de guide:
(a) La candidature du Président Nkurunziza.
Le Gouvernement du Burundi tient à souligner qu’il est nécessaire de respecter les Institutions Constitutionnelles du Burundi. A cet égard, le Gouvernement du Burundi ne négociera ni ne discutera des questions qui tendent à saper ces institutions. Ceci est la ligne rouge qui doit guider ceux qui cherchent à collaborer avec le Gouvernement. Le Président Nkurunziza a réaffirmé que s’il venait à être élu par le peuple en vertu de la Constitution, ce sera son dernier mandat.
(b) Les Manifestations
La vérité sur ces manifestations doit être clarifiée. Pour le Gouvernement ces manifestations qui sont parrainés, touchent une petite partie de la population et sont limitées à quatre (4) quartiers de la capitale Bujumbura. Il apparait clairement que les manifestants ont reçu des instructions pour créer la violence ayant pour but de provoquer une réaction violente du Gouvernement, et ce dernier est conscient de ce piège et ses services ont fait preuve de retenue, malgré la mort de policiers et militaires et de nombreux blessés.
(c) Les médias
Jusqu’au déclanchement des manifestations, le Burundi a connu un espace médiatique le plus libre et le plus ouvert de la région où les Burundais expriment librement leurs points de vue sur les nombreuses stations de radio privées et sur tous les sujets. Cependant, avec la crise actuelle, les professionnels des médias ont abusé de cette liberté lorsque les radios sont devenues des agents vecteurs de l’insurrection en propageant les rumeurs les plus alarmistes dans le pays. Toutefois, le Gouvernement est en train de travailler avec toutes les parties prenantes pour élaborer ensemble un code de conduite qui sera respecté par les entreprises de presse et les journalistes, en particulier pendant le processus électoral et en ce moment de crise.
(d) Le processus électoral
Le Gouvernement du Burundi estime que c’est seulement à travers le processus démocratique basé sur les élections tous les cinq ans que le peuple burundais peut se choisir librement ses dirigeants. La voix de la majorité silencieuse qui n’est pas dans la rue pour manifester devrait avoir sa place et être entendue à travers les urnes. Le Gouvernement apprécie la décision de la Commission Electorale de reporter les élections législatives et communales, comme cela a été demandé par les diverses parties prenantes comme les partis politiques, les candidats indépendants, les confessions religieuses, la Région et la Communauté Internationale.
(e) Appui au processus électoral
Le Gouvernement du Burundi apprécie le soutien reçu jusqu’à présent des différents partenaires, les Gouvernements amis et les organisations internationales pour la tenue des élections. Toutefois, pour imprégner la culture démocratique de la tenue d’élections périodiques au Burundi, le Gouvernement a la latitude de demander un soutien supplémentaire, et faire en sorte que les élections aient lieu avec les ressources limitées à sa disposition.
(f) Les réfugiés
Les réfugiés qui fuient vers les pays voisins sont des Burundais. Le Gouvernement du Burundi est donc préoccupé par leur bien-être plus que n’importe qui d’autre. La genèse de cette crise découle plus de la peur pour certains de ce qui leur est arrivé en 1993 que la situation qui prévaut actuellement En 1993, les réfugiés qui ont fui vers la Tanzanie avaient été victimes d’atrocités commises par l’armée burundaise. Les auteurs de ce massacre sont bien connus. Les craintes et les cicatrices ne sont pas encore guéries. Les réfugiés qui vont en République démocratique du Congo (RDC) sont des rapatriés récents qui ont peur d’être la cible comme étant des membres des Interahamwe (FDLR). La récente attaque contre un innocent par des manifestants l’accusant d’être un Interahamwe présumé a contribué à cette crainte. Les réfugiés qui vont au Rwanda se sont laissé convaincre que la crise électorale va conduire à un conflit tribal et qu’ils seront les premiers cibles des prétendus Interahamwe. Toutes les rumeurs qui ont déclenché cette panique ont été sans aucun doute l’œuvre des agents étrangers, de l’opposition et de la société civile et relayées par certains médias.

(g) Le dialogue
Le Gouvernement du Burundi est ouvert au dialogue avec tous les Burundais surtout, comme d’habitude, dans le cadre du Forum des Partis politiques, avec le soutien de la Communauté Internationale et les pays de la Région sur la gestion future de la crise actuelle. Un tel dialogue doit tenir compte de la position du Gouvernement. Déjà, sous les auspices de l’Envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU et de l’Union Africaine, ce dialogue est en cours. Le Gouvernement recommande cependant que la voix de la majorité des autres citoyens, les Burundais qui résident dans les milieux ruraux soit prise en compte. L’ONU, l’EAC, la CIRGL et l’UA doivent envoyer des missions d’enquête dans les zones rurales du Burundi, où la grande majorité des Burundais vivent, et ne pas concentrer leur attention et fonder leur opinion sur les avis des quelques manifestants, d’une société civile biaisée, et des partis de l’opposition dont les dirigeants restent principalement à Bujumbura.
(h) La tentative de putsch
Le Gouvernement regrette la tentative de coup d’Etat qui a eu lieu, entrainant la mort d’un nombre de Burundais. Le Gouvernement apprécie le soutien de la Communauté Internationale et les organisations régionales qui ont rapidement condamné cette tentative et qui ont appelé au respect des institutions constitutionnelles. Le Gouvernement est déterminé à veiller à ce que les auteurs du putsch qui ont été arrêtés soient jugés de façon équitable, et demande aux fugitifs de se rendre, car ils seront traités équitablement conformément à la loi.
(I) Le rôle de la Communauté Internationale et de la région
Le Gouvernement demande à la Communauté Internationale et à la région de jouer le rôle suivant afin d’aider à résoudre la crise:
i. Soutenir un processus électoral inclusif et exhorter les partis qui ont présenté des candidats à participer pleinement aux élections. Le Gouvernement lui-même s’engage à assurer l’égalité de chances et la sécurité pour tous les candidats.
ii. Envoyer des missions d’enquête dans les zones frontalières d’où proviennent les réfugiés pour déterminer la cause réelle de l’exode.
iii. Inciter les pays voisins à contribuer positivement à la paix et la stabilité au Burundi, et de faciliter le retour des réfugiés afin qu’ils puissent jouir de leurs droits civiques de voter, car en effet, plus de 99% du territoire national connait la paix et la sécurité.
iv. Respecter les Institutions Constitutionnelles du Burundi ainsi que les délais constitutionnels prévus en ce qui concerne le processus électoral.
En effet, en ce qui concerne le calendrier de l’élection présidentielle, le Gouvernement informe l’opinion nationale et internationale que la date reste inchangée. En fait, la Constitution et le Code électoral prévoient que « l’élection du Président de la République a lieu un mois au moins et deux mois au plus avant l’expiration du mandat du Président de la République. » (Article 103 de la Constitution). Il convient donc de rappeler que la prestation de serment du Président de la République ne peut pas aller au-delà du 26 Août 2015.

v. Envoyer des missions d’observation pour évaluer le climat et la conduite de la tenue des élections.
vi. Persuader ceux qui parrainent et encouragent les manifestations pour que le mouvement s’arrête, afin de permettre la tenue d’élections dans les quatre quartiers de la Mairie de Bujumbura, bastion de l’insurrection.
Fait à Bujumbura, le 22 mai 2015
Le Secrétaire Général du Gouvernement et Porte-parole du Gouvernement
Philippe NZOBONARIBA.-