Après Paris en 2017, New York en 2018, ce forum initié par l’Elysée après le retrait américain de l’accord de Paris et consacré aux engagements, notamment financiers, en faveur du climat s’est tenu jeudi 14 mars à Nairobi, au cœur d’un continent touché de plein fouet par les bouleversements climatiques. L’Afrique, sur laquelle était centré ce rendez-vous, représente 4 % des émissions de gaz à effet de serre mais 65 % de sa population souffre déjà des conséquences du réchauffement.
« L’Afrique fait partie de la solution »
« [Le changement climatique] n’est pas quelque chose qui ne concerne que le monde occidental. L’Afrique est clé car c’est en Afrique que nous avons les premiers impacts du changement climatique (…). Et l’Afrique fait partie de la solution », a déclaré Emmanuel Macron en ouverture de cet événement qu’il coprésidait avec Uhuru Kenyatta, le président du Kenya, dont il a loué le mix énergétique composé à 75 % d’énergies vertes.
« Au fond, le défi que l’Afrique nous lance et que nous avons à réussir ensemble, c’est de dire collectivement : est-ce que pour apporter l’énergie, la lumière dans tous les villages d’Afrique, il faut répliquer le modèle que l’on a développé en Europe, aux Etats-Unis, en Asie, il y a vingt, trente ou quarante ans ? La réponse est non », a poursuivi le président français devant un parterre de représentants du privé et du public (dont les présidents congolais Félix Tshisekedi et malgache Andry Rajoelina – annoncé, le Rwandais Paul Kagame n’est pas venu).
A Nairobi, la France a annoncé porter à 1,5 milliard d’euros jusqu’en 2022, contre 1 milliard auparavant, sa contribution à l’Alliance solaire internationale, qui vise à accélérer le déploiement de cette énergie dans 121 pays pauvres. Thématique majeure de ce sommet, le solaire est aujourd’hui marginal (1,5 %) dans la production d’électricité en Afrique. Mais les projets se multiplient et le potentiel (11 térawatts) est « immense », notamment pour les régions isolées, comme l’a souligné lors des échanges Akinwumi Adesina, président de la Banque africaine de développement.
La banque s’est, elle, engagée à investir dans les cinq ans à venir 25 milliards de dollars dans des projets climatiques, notamment en faveur des forêts, l’autre grand thème de cette édition. De son côté, la Banque mondiale va doubler par rapport à aujourd’hui ses financements destinés à l’adaptation des pays au réchauffement entre 2021 et 2025, les portant à 22,5 milliards de dollars.
Décalage
Depuis son élection, l’engagement d’Emmanuel Macron sur le climat et son slogan « Make our planet great again » ont fait mouche sur la scène diplomatique. Jeudi, il s’est également exprimé devant l’ONU Environnement, réunie en assemblée générale sur le même site. La thématique sera également au cœur de la présidence française du G7 qui se tiendra à Biarritz, centré notamment sur les défis de l’Afrique.
Mais un décalage se creuse entre cette image internationale et celle dont il dispose en France sur la question climatique. Dénonçant « l’absence de crédibilité des One Planet Summit », « leur gouvernance faible et leurs objectifs flous », Greenpeace s’est étonné jeudi « de la présence du chef de l’Etat à ce type d’événements taillés pour le secteur privé, alors qu’il a brillé par son absence lors de la COP24 en décembre dernier, pourtant décisive ». Ce même 14 mars, à Paris, quatre ONG à l’origine de la pétition « L’affaire du siècle » ont déposé un recours contre l’Etat français pour « inaction climatique ».
Marc Semo et Marion Douet – Le Monde