De nos jours, la question relative aux pourcentages dévolus aux Hutu, aux Tutsi et aux Twa au sein des institutions nationales revient dans les débats de façon lancinante. Certains Hutu pensent que le quota réservé aux Tutsi est disproportionné par rapport à leur importance numérique réelle dans le pays1. D’un autre côté, les Tutsi ont tendance à s’arc-bouter aux Accords d’Arusha et à la constitution pour refuser toute mise à jour qui irait dans le sens d’une réduction de leur poids politique. Les Twa bénéficient d’un traitement particulier compte tenu de leur nombre et surtout de leur influence sur l’échiquier politique. Les Ganwa, eux, sont les grands oubliés car ils peinent à reconstituer une force homogène et univoque face aux autres groupes.
En réalité, cette politique de quotas frustre tout le monde dans le pays : les Hutu se sentent lésés vue la part leur impartie en rapport à leur poids numérique réel; les Tutsi qui ont longtemps bénéficié de places privilégiées se sentent désormais menacés dans leurs acquis. Les Ganwa et même les Twa, quant à eux, se sentent exclus de la compétition.
Une réflexion devrait être menée pour clarifier les choses. Car finalement, qui est Hutu, Tutsi, Twa ou Ganwa au Burundi ? Faut-il un recensement systématique et un enregistrement de l’appartenance ethnique sur les documents d’identification comme sous la tutelle belgo-onusienne ? Quid des personnes naturalisées burundaises issues d’autres peuples ?
Si une politique de « Discrimination Positive »2 en faveur des Hutu et des Twa était incontournable au sortir des négociations de paix d’Arusha, un temps viendra pour évaluer les résultats et tirer les conclusions qui s’imposent. En attendant, ces mécanismes de partage de pouvoir font corps avec notre texte fondamental ; il serait irresponsable des les remettre en cause avant les élections de 2015. A une année des échéances électorales, tout bouleversement institutionnel est suspecté de cacher des visées électoralistes. Et, comme on le sait, en politique on ne donne jamais le bénéfice du doute à son adversaire, on négocie avec lui.
L’idéal serait qu’après les élections de 2015, tout ce qui a été recommandé par les Accords d’Arusha soit mis en application pour qu’au Burundi nous cessions de louvoyer entre deux textes de référence. Il ne devrait exister que la constitution à suivre et elle seule. Ce qui ne sera pas dans la constitution et ses textes subsidiaires ne liera personne. Les seuls textes susceptibles d’amender de facto notre constitution n’étant que les différents textes d’Accords internationaux signés par le gouvernement et ratifiés par le parlement.