Massacre de 1972 : « Honorer les héros non chantés »

Massacre de 1972 : « Honorer les héros non chantés »
(Iwacu 06/05/14)

L’Association pour la Mémoire et la Protection de l’Humanité contre les Crimes Internationaux (AMEPCI)-Gira Ubuntu a organisé ce vendredi 2 mai un atelier pour la commémoration des événements de 1972.
« Nous nous sommes rassemblés pour honorer les héros non chantés, ces Hutu qui ont caché des Tutsi, ces Tutsi qui ont protégé des Hutu lors du désastre de 1972 », a déclaré le secrétaire général d’AMEPCI, Aloys Batungwanayo. Les participants ont suivi les témoignages de trois de ces héros.

Gordien Makoto (62 ans), un Hutu originaire de Musigati, en province Bubanza, a raconté comment un berger tutsi lui a sauvé la vie au moment où il attendait naïvement « le permis de séjour ». « A tout Hutu intellectuel ou plus ou moins évolué, le permis de séjour était exigé. Il était dit que seuls les gouverneurs de province – tous militaires – étaient les seuls habilités à délivrer ce document », dira Makoto.

Mais pour lui, c’était plutôt un permis de séjour dans la « République des morts » car tout Hutu qui se rendait, de gré ou de force, au chef-lieu de la province Bubanza pour chercher ce précieux sésame était directement exécuté. Accusation : « Umumenja », c’est-à-dire, un séditieux.

A son tour, M. Barandereka, un militaire, sous-officier, a relaté comment il allait être exécuté, n’eût été l’intervention d’un haut gradé de l’armée. Accusation : un tutsi originaire de Ngozi (Nord du pays). Il a affirmé que les Tutsi nordistes qui servaient à l’armée étaient discriminés par les militaires majoritairement sudistes.

Cyriaque Niyungeko, un Tutsi de Vyanda (province Bururi) a raconté comment il a pu sauver des Hutu contre les représailles de l’armée. « Mes frères Hutu, pourquoi vous rendez-vous aux rencontres convoquées par le pouvoir à la commune ? Retournez chez vous. Vous saurez ce qui se sera dit plus tard », conseillait-il à tout Hutu qui voulait l’entendre.

« La protection de tout Hutu qui était pointé du doigt comme étant un « mulele » (assaillant caractérisé par une courte taille, selon l’imaginaire populaire) »ou un « mumenja » était une action courageuse et risquée au vu de la tension de l’époque », a-t-il martelé.
Signalons que la journée a été clôturée par une messe en mémoire des victimes de la tragédie de 1972.