SENAT> Débat sur la problématique foncière

Les sénateurs proposent une gestion qui réconcilie

Le Sénat du Burundi a organisé, le mercredi 9 novembre 2016, un débat sur la gestion des conflits fonciers en province de Makamba. Dans son introduction, Révérien Ndikuriyo, président du Sénat et natif de la province de Makamba, a dit qu’après les massacres de 1972, la quasi totalité de la province s’est vidée d’hommes qui ont fui vers la Tanzanie. « A peu près 95% sont venus d’autres provinces », a dit le président du Sénat qui indique que parmi eux se trouvent des acquéreurs de bonne foi.

La terre au Burundi est primordiale. Elle est la pierre angulaire de la vie en générale et de la famille en particulier. Elle est aussi la source de conflit entre les Burundais, d’où la nécessité d’une attention particulière. Historiquement, dit M. Ndikuriyo, la question foncière est aussi sensible dans le sud du pays dans l’ancienne province de Bururi qui englobe les provinces de Makamba, Bururi, Rumonge et Rutana. Il situe le problème à deux niveaux, à savoir la responsabilité de l’Etat dans la gestion de la terre, d’une part, et l’usurpation de la propriété d’autrui, d’autre part.
Pour Reverien Ndikuriyo, le gouvernement doit assumer ses responsabilités et œuvrer pour la gestion de la terre qui réconcilie les résidents et les rapatriés. Il estime qu’il y a un discours qui entraîne la frustration et qu’il faut éviter la globalisation quand il faut traiter la problématique de l’acquisition de la terre après les événements de 1972.
Dans le résumé du rapport d’une commission ad-hoc mise sur pied pour analyser à fond le conflit foncier en province de Makamba, on indique qu’en commune Nyanza-lac, les conflits fonciers sont, d’une part, entre les rapatriés eux-mêmes et entre les rapatriés et les résidents, d’autre part. Plusieurs personnes, comme l’indique le résumé du rapport, possèdent dans chaque zone de la commune sur plusieurs collines de certaines zones, plusieurs propriétés foncières. Il a été également constaté que des commissionnaires sont à l’origine de la perpétuité des procédures liées aux conflits fonciers.

L’usage des procurations

Selon le rapporteur de la commission ad hoc qui s’est penchée sur la question, il existe trois types d’acquéreurs de la propriété en province de Makamba. Il s’agit de ceux qui se sont accaparés des propriétés des voisins après qu’ils aient fui le pays, ceux qui les ont eu de la part de l’Administration et ceux qui viennent revendiquer les propriétés de ceux qu’ils ont laissé derrière eux dans les camps des refugiés. Pour le dernier cas, l’usage des procurations est ici évoqué comme une manière frauduleuse d’accéder à la propriété.
Selon la sénatrice Agnès Gahwayi, les terres appartiennent à l’Etat. Pour elle, le gouvernement doit évaluer son arsenal juridique en matière de gestion foncière et revoir toutes les lacunes éventuelles. Rémy Barampama pense, lui, que la loi devrait être scrupuleusement appliquée dans son intégralité. L’Accord de paix et de réconciliation d’Arusha prévoient la réinsertion des refugiés dans leurs biens. Quant à Joseph Banyankirubusa, il est important d’envisager une réforme agraire générale. Il signale que parmi les défis de l’application des jugements rendus et par la Commission nationale terre et autres biens et la Cour spéciale terre et autres biens, se trouvent les administratifs à la base.

Eviter la régénérescence des conflits

D’autres sénateurs indiquent qu’il faut un partage équitable de la propriété foncière entre les parties en conflit vue que le gouvernement doit assurer le bien-être de tous pour l’intérêt supérieur de la nation. Parmi eux, le député Jennifer Kankindi suggère qu’il faut privilégier le dialogue à la confrontation et que l’entente dégagée soit entérinée par la loi afin d’éviter la regénérescence des conflits.
Anicet Niyongabo, Deuxième vice-président de la chambre haute du parlement, de son côté, estime que la contradiction en province de Makamba réside entre la loi et la volonté de la population et des administratifs à la base. Ces derniers s’expriment en faveur du partage et la loi demande le rétablissement des rapatriés dans leurs biens sans aucune autre considération. A ce sujet, dit le président du Sénat, il revient à l’Etat de départager les partis en conflit. Il propose de doter chacune des parties en conflits d’un terrain de quatre hectares et si la propriété dépasse cette étendue, selon lui, le reste pourra abriter les Burundais qui sont rentrés mais qui n’ont aucun repère.
Spés Caritas Njebarikanuye, elle, propose qu’il y ait des mesures permettant d’éviter que la propriété foncière soit vendue dans l’anarchie. Sinon, pense la sénatrice, la propriété foncière risque de finir dans les mains des multinationales étrangères.
Après le débat sur la problématique foncière, la chambre haute du parlement a procédé à l’analyse et l’adoption du projet de loi portant règlement et compte rendu budgétaire pour l’exercice 2014. La loi a été votée à l’unanimité.

CHARLES MAKOTO