L’économie burundaise s’améliore par rapport à la situation de 2015

La santé de l’économie burundaise s’améliore par rapport à la situation qui prévalait lors de la crise politico-électorale de 2015, a affirmé Salomon Nsabimana, expert burundais en macroéconomie.

L’expert Nsabimana, qui est également chercheur professionnel à l’Institut de Développement Economique (IDEC) de Bujumbura et professeur à la Faculté des Sciences Economiques de l’Université du Burundi (UB), s’exprimait au cours d’une interview accordée à Xinhua sur l’état des lieux de l’économie burundaise à quatre mois de fin 2017 et début 2018.

« De façon globale, on voit que la situation économique burundaise s’améliore dans certains domaines par rapport à la situation de crise de 2015. Toutefois, force est de constater que beaucoup d’indicateurs restent inférieurs à la situation de 2014, jugée relativement bonne, année au cours de laquelle certains indicateurs étaient un peu élevés », a-t-il précisé.

L’actuelle situation économique burundaise s’analyse sous divers paramètres, en l’occurrence l’évolution du taux de croissance économique.

« En regardant de près la courbe du taux de croissance économique, on découvre que le taux de croissance de 2014 était autour de 4,5% ; lequel a chuté au cours des 12 mois de 2015 jusqu’à atteindre un seuil négatif. En 2016, le Burundi a connu certes une légère amélioration de son taux de croissance économique par rapport à celui de 2015 ; mais qui reste de loin inférieur à celui enregistré en 2014 », a-t-il fait remarquer.

L’expert Nsabimana a souligné que la « photographie » de la santé économique burundaise transparaît également à travers l’examen de la production des richesses nationales, en se focalisant l’attention sur la contribution sectorielle.

« Avant la crise de 2015, la contribution sectorielle au niveau des services avait une forte visibilité dans le pays. On assiste, au lendemain de la fin du 1er semestre 2017, à une légère amélioration de la contribution sectorielle des services ; mais qui dépasse un tout petit peu la situation d’en 2015 durement frappée par le choc de la crise », a-t-il expliqué.

A ce jour, a-t-il souligné, l’économie burundaise est bâtie essentiellement sur deux secteurs, à savoir celui des services marqué aujourd’hui par une contribution sectorielle de 43% et celui de l’agriculture avec une contribution de 39%.

Car, a-t-il laissé entendre, le secteur industriel burundais reste aujourd’hui « très faible » avec une contribution dans la valeur ajoutée, inférieure à 20%.

M. Nsabimana a relevé également du côté de l’offre burundaise, que le processus d’investissement économique au Burundi est encore freiné par la « faiblesse » au niveau de l’épargne intérieure et un niveau du volume des importations jugée inférieure par rapport à celui d’il y a trois ans en 2014.

En effet, a-t-il insisté, par rapport à l’époque de crise de 2015, le niveau des importations en référence au PIB (produit intérieur brut), est certes aujourd’hui amélioré pour avoir passé de 29% à 31%.

« Concrètement, cela signifie qu’en dépit de la légère amélioration enregistrée en termes de volume d’importations ; les capacités d’importation ne sont pas encore développées au Burundi notamment à cause de l’insuffisance de l’offre en devises », a estimé l’expert burundais.

L’analyse de la situation économique burundaise montre en outre qu’aujourd’hui, par rapport à la situation de crise de 2015, les recettes fiscales, encore dominées par les apports du commerce intérieur, « ont légèrement augmenté ».

En revanche, en ce qui concerne les capacités de consommation des Burundais, l’expert Nsabimana a signalé que les dépenses de consommation des ménages sont très élevées au Burundi.

Cela signifie que les richesses nationales burundaises sont « destinées essentiellement à la consommation ». Et cela peut s’expliquer par la « faiblesse du revenu par habitant, aujourd’hui inférieure à 300 dollars par an et par habitant » ; ce qui reste de loin inférieur par rapport au revenu par habitant d’autres pays de la région est-africaine (Kenya, Tanzanie, Ouganda, Rwanda et Soudan du Sud), a-t-il affirmé.

Analysant le volume des investissements burundais capté du point de vue économique par la capacité de formation du capital, M. Nsabimana a indiqué que le niveau d’investissements internes au Burundi en 2017, a augmenté par rapport à l’année de crise de 2015.

Cependant, a-t-il émis une nuance, l’augmentation des investissements enregistrée en 2016 est « à relativiser » dans la mesure où la performance obtenue reste inférieure à celle enregistrée en 2014.

L’expert Nsabimana a affirmé également que l’analyse de l’état des lieux sur l’économie burundaise, doit mettre en exergue le niveau des investissements directs en provenance de l’étranger.

« En effet, quand on se penche de près sur les investissements directs étrangers au Burundi, on découvre que les flux restent faibles. Sous cet angle, on ne peut manquer de regarder de près le niveau des transferts des migrants, qui revêtent un aspect très important au niveau de la promotion des investissements innovants dans beaucoup de pays, africains en l’occurrence via des transferts de la diaspora. Au Burundi, ces transferts des migrants, si on les compare par rapport au PIB, restent encore avec des taux faibles », a-t-il souligné.

L’économie burundaise souffre encore également de la faiblesse du volume des exportations, a poursuivi l’expert en précisant que celles-ci représentent moins de 7% du PIB.

Sur ce, il a déploré que les exportations burundaises soient encore dominées par des produits de l’agriculture ; car les produits manufacturés en la matière reste très faible dans la mesure où ils représentent moins de 5% du volume global des exportations.

« Bref, dans l’ensemble on voit aujourd’hui qu’il y a une certaine amélioration de l’économie burundaise, qui reste cependant très faible par rapport à la situation de 2014 », a-t-il tranché.

Pour l’expert Nsabimana, l’amélioration actuelle de l’économie burundaise sur base des statistiques et des indicateurs par rapport à la situation qui prévalait à l’année de crise de 2015, s’explique fondamentalement par une « reprise relative de l’activité économique » au Burundi à la faveur de la situation sécuritaire burundaise « en train de s’améliorer relativement ».

« Car, par rapport à 2015, on enregistre une valeur ajoutée sur le plan sécuritaire ; mais, ce n’est pas encore un bon environnement pour attirer les investisseurs », a-t-il nuancé.

Pour l’expert Nsabimana, à ce jour, les défis majeurs de l’économie burundaise sont principalement la transformation structurelle de l’économie nationale (dans la mesure où les Burundais ne peuvent continuer à vivre uniquement de l’agriculture), la résolution du déficit énergétique et le renforcement de l’environnement des affaires.

Mais il n’y a pas que des défis pour l’économie burundaise, il existe aussi des opportunités pour son épanouissement dans le temps et l’espace, a-t-il souligné, en citant notamment le « riche » potentiel minier, le niveau accéléré d’intégration régionale et l’existence des structures de promotion des investissements telle que l’Agence de Promotion des Investissements (API).

French.china.org.cn |  le 12-08-2017
Agence BUJUMBURA News (Burundi)