Mr Vénuste Ndikumwenayo, Directeur des Etudes Economiques et Statistiques à la Banque de la République du Burundi (BRB), rassure sur l’état des lieux des préparatifs du Burundi en vue de l’adoption de la monnaie unique de l’EAC dont le lancement est prévu en 2024, selon le protocole de 2013.
Vénuste Ndikumwenayo, Directeur des Etudes Economiques et Statistiques à la Banque de la République du Burundi (BRB) Selon le protocole de 2013, l’année 2024 est prévue pour l’adoption de la monnaie unique de l’EAC. Y a-t-il des critères que chaque Etat membre doit remplir avant son lancement ?
Dans le cadre de la transition vers l’adoption de la monnaie unique au sein de la Communauté Est Africaine, les pays membres de cette communauté se sont convenus sur des critères de convergence clairement fixés qu’il faut respecter. Lors des réunions du Comité des Affaires Monétaires de la Communauté Est Africaine, tous les pays échangent leurs expériences respectives sur le respect de ces critères et les défis y relatifs. Ils sont contenus dans le protocole portant création d’union monétaire de la Communauté Est-Africaine signé par les Chefs d’Etat le 30 novembre 2013. Il est attendu que, dans la phase de transition vers l’adoption de la monnaie unique, les pays s’engagent à respecter ces critères de convergences qui garantissent le développement et la stabilité macroéconomiques cohérents avec les perspectives d’union monétaire.
Ces critères de convergence portent sur quoi ?
Ils portent notamment sur l’inflation dont le taux (plafond) est fixé à 8% ; le déficit budgétaire global (plafond) fixé à 3% du PIB, les réserves de changes qui doivent couvrir au moins (plancher) 4,5 mois d’importation de biens et services ainsi qu’un plafond de la dette publique fixé à 50% du PIB. Le respect de tous ces critères engagent tous les Pays Membres, pas seulement le Burundi
Le Burundi, l’économie peut-être la plus faible de la zone EAC. Sera-t-il prêt avec le rendez-vous de 2024 ? Comment estimez-vous le niveau déjà atteint ?
Le Burundi essaie de faire de son mieux pour respecter les critères de convergence auxquels il a adhéré librement, et le niveau atteint est satisfaisant. Le Burundi a enregistré un progrès significatif sur certains critères. Mais sur d’autres, il y a toujours des problèmes. Toutefois, il importe de signaler que ce n’est pas une situation à singulariser pour le seul cas du Burundi : aucun pays n’a respecté en totalité les quatre critères principaux de convergence sur une période de trois ans consécutifs. C’est la raison pour laquelle les échanges d’expérience et des recommandations appropriées sont systématiquement discutées lors des réunions du Comité des Affaires Monétaires organisée au moins une fois chaque année.
Concrètement, le Burundi a enregistré des avancées significatives sur quels critères ?
Compte tenu de l’évolution économique et financière qui n’est pas monotone, il arrive qu’un critère respecté pour une année quelconque ne le soit pas l’année suivante. Par exemple, le Burundi avait respecté le critère du taux d’inflation entre 2013 et 2017 avec un taux d’inflation significativement inférieur au plafond de 8%. Toutefois, en 2017, le Burundi a enregistré un taux d’inflation de 16,1% qui était principalement influencé par les prix des produits alimentaires et, dans une moindre mesure les prix hors alimentation.
Qu’en est-il du déficit du Burundi ?
Sans considérer le Sud Soudan dont les données ne sont pas disponibles, en ce qui est du déficit, tous les pays, ont raté le critère depuis 2014. En 2017, tous les pays ont fait des efforts pour baisser le niveau du déficit et le Burundi s’est nettement amélioré en passant de 5,9 à 4,4% du PIB. Ces progrès très significatifs ont été réalisés grâce notamment à l’amélioration dans la collecte des recettes mais aussi l’amélioration dans la gestion des dépenses publiques. Cela a entrainé une baisse du déficit, mais en même temps, il a été encouragé par des efforts significatifs dans l’augmentation du rythme de la production.
Des chiffres ?
A titre d’illustration, les données disponibles montrent que les recettes totales se sont établies à 14% du PIB contre 13,2% en 2016. Les dons légèrement augmenté en 2017, atteignant 2,6% contre 2.5 % en 2016. Les dépenses publiques représentent 21,1% du PIB en 2017 alors qu’elles étaient de 21,6% en 2016. Tous ces éléments, combinés à l’amélioration du niveau du PIB ont entraîné un déficit global qui s’est établi à 4,6% du PIB, en amélioration nette par rapport à 5,9% du PIB enregistré en 2016.
Etat des lieux de l’endettement au Burundi ?
Même au niveau de la dette publique, le critère fixé est respecté par le Burundi depuis 2013.
Que faut-il retenir de « inflation » ?
En matière d’inflation, en 2015 on avait enregistré un taux d’inflation qui était autour de 5,6% contre une norme de 8% maximum. Mais, en 2016, nous avons raté ce critère à cause des conditions sur le secteur primaire surtout et les conditions qui prévalaient sur les marché internationaux qui ont essayé d’annihiler les effets attendus de la dynamique de l’inflation en 2017. L’inflation est passée de 5,6% à 16,1% mais c’était principalement en raison des mauvaises performances enregistrées au niveau de la production primaire et des conditions climatiques qui n’étaient pas favorables.
Quel est l’avantage de la monnaie unique pour le citoyen burundais ?
L’adoption de la monnaie unique sera l’étape finale après avoir supprimé toutes les restrictions existantes sur la circulation des biens et services, les facteurs de production et même après la reconnaissance du droit d’établissement pour tous les citoyens de la Communauté Est Africaine. Cela permettra aux opérateurs et aux citoyens de nos pays respectifs à s’épanouir économiquement et financièrement dans une communauté où les coûts de transactions seront sensiblement réduits et qui sera considérée comme une seule famille, garantissant par-là les conditions favorables à l’épanouissement et à la prospérité économique de toute la Communauté.
By Dieudonné Bukuru