L’Assemblée du Burundi a adopté mercredi à une large majorité les noms des onze membres d’une Commission vérité et réconciliation (CVR), chargée d’établir la vérité sur les massacres interethniques depuis 1962, mais sans l’opposition représentant la minorité tutsie.
« Nous n’avons pas pris part à ce vote afin de protester contre la mise en place d’une CVR qui est l’émanation de la volonté du seul parti Cndd-FDD au pouvoir », a dénoncé le député Charles Nditije, à la tête de l’aile majoritaire de l’Uprona. Ce parti du président Pierre Nkurunziza est dominé par les Hutus.
« Il faut normalement être deux pour une réconciliation », a-t-il ajouté, ajoutant que « la vérité et la réconciliation ne peuvent pas avoir lieu sans la justice ».
L’Uprona, les autres partis d’opposition et la société civile du Burundi reprochent à la loi sur la CVR d’avoir omis le volet justice et de prôner uniquement le pardon ou d’y avoir intégré des personnalités politiques.
Le président du Parlement Pie Ntavyohanyuma a cependant salué un vote « historique ».
Les onze membres, six Hutus (ethnie majoritaire, 86% de la population), quatre Tutsi (13%) et une Twa (1%) dont quatre femmes, ont été élus à la majorité simple sur une liste de 33 personnalités choisies parmi 725 candidats par une commission mixte paritaire entre l’Assemblée et le Sénat du Burundi.
La commission sera présidée par Mgr Jean-Louis Nahimana, un Hutu président de la commission Justice et paix de l’église catholique, et vice-présidée par Mgr Bernard Ntahoturi, archevêque tutsi de l’église anglicane du Burundi.
Indépendant depuis 1962, le Burundi a connu notamment à partir de 1972 une série de massacres interethniques et de coups d’Etat, prémices à une longue guerre civile (1993-2006) ayant opposé des rebelles hutu à l’armée, dominée jusqu’à récemment par la minorité tutsi. Le conflit a fait plus de 300. 000 morts.
La commission aura quatre ans pour établir la vérité sur les crimes de masse qui ont endeuillé ce pays depuis l’indépendance en 1962 jusqu’en 2008, établir les responsabilités personnelles et collectives, identifier et cartographier les fosses communes, proposer un programme de réparations et promouvoir le pardon et la réconciliation.