Jeunes adultes, enfants, ils sont une vingtaine à frapper frénétiquement sur quinze tambours et danser à leur rythme endiablé. A leur tête, Antime Baranshakaje, ancien tambourinaire du roi du Burundi, bouclier et lance en main, les dirige bon pied bon oeil du haut de ses 79 ans.
Le groupe de tambourinaires de Gishora, en haut de la colline éponyme dans la province de Gitega (centre), est en démonstration pour les journalistes de passage et quelques habitants venus profiter du spectacle.
Les tambours du Burundi et la danse qui les accompagne, classés l’an dernier au patrimoine immatériel de l’Unesco, sont aujourd’hui pur divertissement, joués par des troupes professionnelles. Mais des siècles durant, ils ont été une affaire sacrée, symbole d’un royaume soudé dans un pays à l’histoire récente sanglante.
Autrefois « le tambour, c’était le symbole du pouvoir royal », raconte l’abbé Adrien Ntabona, anthropologue. « Ce n’était pas une petite chose banale comme aujourd’hui. Dieu passait par le tambour pour protéger la monarchie et le royaume, l’ensemble du pays », rapporte l’AFP.
En kirundi, langue nationale du Burundi, le mot « ingoma » signifie d’ailleurs à la fois tambour et royaume.
Antime Baranshakaje est l’un des tout derniers tambourinaires à avoir joué, avant la proclamation de la République en 1966, devant le monarque du petit pays d’Afrique des Grands Lacs à l’occasion de la fête des semailles.
Célébrée en décembre, cette fête centrale de la culture burundaise servait à bénir les récoltes de l’année et se préparait des mois à l’avance.
Dès le mois d’août, il fallait refaire les tambours. Couper le bois dans lequel ils seraient taillés, travailler la peau qui allait les recouvrir, avant de prendre la route pour la capitale royale Muramvya, à une soixantaine de kilomètres de Gishora.