Cyberattaques, sanctions contre les plus hauts responsables de la République islamique : après avoir renoncé à frapper militairement en représailles drla destruction d’un drone, le président américain repart à l’offensive.
L’administration Trump ne veut pas perdre la main. Alors que les tensions entre l’Iran et les Etats-Unis avaient atteint leur paroxysme en fin de semaine dernière après la destruction d’un drone de l’US Navy par les Gardiens de la révolution, Donald Trump a annulé au dernier moment la riposte militaire, des frappes ciblées contre trois installations. Un geste dont s’est réjoui le camp des durs en Iran, qui y a vu un recul du président américain et la preuve que leur stratégie de la tension fonctionne.
Lundi, les Etats-Unis sont repartis à l’offensive. Trump a commencé sa journée en tweetant : «Ce que les Etats-Unis exigent de l’Iran est très simple : pas d’arme nucléaire et plus de soutien au terrorisme !» Comme annoncé, le Président a ensuite signé un «executive order» complétant les nombreuses sanctions déjà prises depuis mai 2018.
Les mesures décidées lundi viseront plusieurs responsables iraniens, dont le Guide suprême, Ali Khamenei, plus haute autorité politico-religieuse de la République islamique. Ministre des Affaires étrangères et cheville ouvrière de l’accord sur le nucléaire de 2015, Mohammad Javad Zarif sera lui aussi ajouté à la liste des sanctions plus tard cette semaine, a indiqué lundi le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin. Des «milliards de dollars» d’actifs iraniens supplémentaires seront gelés, a-t-il insisté.
Washington avait déjà riposté, plus discrètement, à l’attaque contre son drone. Jeudi soir, le commandement dédié de l’état-major américain a ainsi lancé des cyberattaques. Selon les informations de Yahoo News, l’une des cibles était un groupe «lié aux Gardiens de la révolution» qui collectait des renseignements sur les navires civils et militaires transitant dans le Golfe. Ces espions agissaient notamment via de fausses identités sur les réseaux sociaux pour approcher des militaires américains déployés dans la région.
Mobilisation tous azimuts
Le Washington Post a révélé que d’autres cyberattaques, toujours lancées par le Cyber Command, ont touché les systèmes informatiques des missiles et roquettes déployés par les Gardiens de la révolution. Elles n’ont fait aucune victime humaine, précise le quotidien, rappelant les propos de Trump sur le manque de «proportionnalité» de la riposte aérienne et maritime prévue qui aurait fait, selon lui, 150 morts. Ce bilan estimé l’a convaincu de l’annuler, d’après ses propres déclarations sur Twitter. «Aucune de leurs attaques n’a abouti alors qu’ils font beaucoup d’efforts en ce sens», a démenti lundi le ministre iranien des Télécommunications, Mohammad-Javad Azari Jahromi.
Dans le même temps, la diplomatie américaine se mobilise tous azimuts auprès de ses alliés et partenaires pour faire monter la pression sur Téhéran. «Nous appelons l’Iran à cesser toute action qui pourrait menacer la stabilité régionale et nous exhortons à des solutions diplomatiques pour faire baisser les tensions», ont indiqué depuis Washington les représentants des Etats-Unis, du Royaume-Uni, de l’Arabie Saoudite et des Emirats arabes unis dans un communiqué conjoint.
Le texte a été publié alors que le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo entamait ce lundi une tournée à Riyad et Abou Dhabi avant une visite en Inde. «Nous allons parler de la manière de nous assurer que nous sommes tous sur la même ligne ainsi que de la manière de mettre en place une coalition mondiale» sur l’Iran, a résumé Pompeo avant sa rencontre avec ceux qu’il a désignés comme les «deux grands alliés dans le défi que représente l’Iran». Car l’inquiétude monte chez les pétromonarchies arabes sunnites. Après avoir longtemps encouragé Donald Trump dans ses positions les plus agressives face à l’Iran, applaudissant l’année dernière sa décision de dénoncer l’accord sur le nucléaire, les deux va-t-en-guerre ont pris peur depuis le début de l’escalade dans la région.
Vulnérabilité et cargaisons
Les attaques contre les pétroliers en mer d’Oman ont révélé la vulnérabilité des pays du Golfe face à aux menaces sur leurs exportations. La sécurité de la navigation dans le détroit d’Ormuz est une priorité mise en avant par les responsables américains pour impliquer tous les pays concernés par les risques pour cette artère maritime vitale. Le président américain a appelé les pays importateurs de pétrole à protéger leurs propres cargaisons, disant ne pas comprendre pourquoi les Etats-Unis le sécurisaient «pour d’autres pays sans la moindre compensation». «91% des importations chinoises de pétrole passent par le détroit d’Ormuz, 62% pour le Japon, et c’est pareil pour nombre d’autres pays», a-t-il souligné dans un tweet.
Les agissements des «proxies» (relais) de l’Iran constituent une préoccupation essentielle pour les Etats-Unis dans le bras de fer avec Téhéran, mais surtout pour leurs alliés. Ainsi, l’Arabie Saoudite s’est trouvée en première ligne des attaques des milices Houtis du Yémen, soutenues par l’Iran. Les tirs de plus en plus fréquents de missiles visant l’aéroport d’Abha, au sud du Royaume, ont fait 26 blessés la semaine dernière et pour la première fois un mort dimanche soir : un civil Syrien.