Le patron de la Commission Paix et Sécurité de l’UA est en visite au Burundi pour trouver une solution au paiement des militaires burundais qui vont boucler 12 mois sans salaire en mission de paix en Somalie. L’Union Européenne, qui devrait payer, pose une condition: faire transiter directement l’argent aux militaires, sans le regard du Gouvernement burundais. Ce qui peut faire tomber constitutionnellement le président Nkurunziza.
La question qui agitait les chancelleries jusque la dernière semaine était de savoir si la menace de retrait des militaires burundais de l’Amisom était sérieuse, ou si le gouvernement faisait du chantage en l’air.
Les choses se sont précipitées en début de cette semaine, avec la publication d’une note confidentielle de la Présidence exigeant un plan de retrait des troupes burundaises en Somalie dès la fin de ce mois. La menace du gouvernement de Nkurunziza devenait soudain sérieuse, provoquant un déplacement urgent à Bujumbura du patron de la Commission Paix et Sécurité, qui chapeaute les opérations de maintien de la paix de l’Union Africaine.
On saura dans quelques heures le message que le Commissaire Smail Chergui va transmettre au président Nkurunziza. Mais une chose est sûre: le gouvernement burundais préfère rapatrier ses militaires de la Somalie où ils mettent gratuitement en jeu leurs vies depuis une année, plutôt que de les y garder avec un paiement direct de l’Union Européenne avec risque de crise constitutionnelle majeure, et la destitution de Nkurunziza.
En effet, la Constitution du Burundi est claire sur la gestion de l’Armée: en ses articles 242, 243 et 246 notamment, la gestion et le contrôle du travail de l’Armée burundaise sont suivis exclusivement par le Gouvernement, tandis que le Parlement en supervise l’action.
Le paiement direct aux militaires burundais voulu par l’Union Européenne sans passer par l’employeur des militaires burundais, qui est le Gouvernement burundais amoindrit moralement le pouvoir de “l’autorité civile” à laquelle l’Armée et la Police du Burundi sont subordonnées (Article 246).
Dans le cas de l’engagement dans l’Amisom, en Centrafrique ou ailleurs, l’Article 250 précise d’ailleurs que le Président consulte et informe de façon détaillée le Parlement sur tous les aspects de la mission. Dans tous les scénarios, on voit mal comment l’actuel parlement burundais, contrôlé par un parti dirigé par un ancien général de l’Armée, peut autoriser l’Exécutif burundais à céder ses droits d’employeur sur la FDNB aux fonctionnaires de Bruxelles.
En d’autres termes, ce que demande l’Union Européenne n’est ni plus ni moins que le Président Nkurunziza partage son autorité sur l’Armée avec l’UE, sans même l’accord du Parlement. Ce qui légalement lui vaudrait une procédure de destitution pour haute trahison (Article 117).
Selon plusieurs sources, cette exigence de l’Union Européenne de payer directement les militaires burundais a été formulée par Bruxelles après un lobbying intensif des activistes dits “défenseurs droits de l’homme” proches de l’opposition radicale, dont Pacifique Nininahazwe, dès le second trimestres de 2015.
Pour eux, le calcul était simple: les militaires renvoyés de Somalie vont rentrer au Burundi mécontents, ce qui va provoquer des troubles dans l’armée, le rejet de la hiérarchie militaire et la chute de Nkurunziza.
Diviser les corps de défense et de sécurité pour provoquer un putsch: Nininahazwe et ses amis rêvent d’un remake du 13 mai 2015 qui emporterait Nkurunziza et son gouvernement, ou alors une invasion de la région comme en Gambie. En vérité, ce sont de drôles d’activistes des droits de l’homme.
by Irakoze Emmanuel