Clôture provisoire des activités de la CVR en provinces de Muyinga et Kirundo
Après cinq semaines d’enquêtes, auditions et exhumation de restes humains, la Commission Vérité et Réconciliation (CVR), a procédé ce samedi 26 juin 2021 à la clôture provisoire de ses activités dans les provinces Muyinga et Kirundo.

En province de Kirundo, la clôture provisoire des activités de la CVR s’est déroulée à Gasura, dans la commune Vumbi. Les cérémonies étaient rehaussées par la présence du Vice-président de la République du Burundi Prosper Bazombanza. A Muyinga les cérémonie de clôture provisoire s’est déroulée en commune Buhinyuza et était rehaussée par la présence de la première Vice-Présidente de l’Assemblée nationale, Sabine Ntakarutimana.

A l’occasion de la clôture provisoire des activités de la CVR dans les provinces Muyinga et Kirundo, le président de cette commission, Pierre Claver Ndeyicariye a présenté les résultats des activités dans les deux provinces. ll a fait savoir que pendant 5 semaines, la CVR a entendu les témoins, les personnes âgées, les veuves, les orphelins, les fonctionnaires encore vivants, les rescapés des tueries de 1972-1973. Sur base de ces informations, la CVR a pu trouver des restes humains de quelque 500 victimes dans la province Muyinga. Dans la province de Kirundo, la commission a pu trouver des restes humains de 157 victimes, a poursuivi Pierre Claver Ndayicariye.

Le président de la CVR a fait remarquer que beaucoup de gens ont été jetées dans les rivières, dans le parc de la Ruvubu, et que d’autres ont été dévorés par des bêtes sauvages. Une particularité a été observée à Gasura en commune Vumbi : la CVR a découvert une fosse constituée de plusieurs trous et dans chaque trou se trouvait une crâne. La CVR s’est posée la question de savoir où se trouvaient les autres parties des corps. Pour la CVR, c’est un signe qu’avant de jeter les victimes dans ces fosses communes, les bourreaux avaient d’abord dépecé leurs victimes, une preuve de cruauté des tueries de 1972-1973.

Selon le président de la CVR, les personnes à tuer étaient choisies parmi les Bahutu dont des fonctionnaires et des commerçants. Les tutsi qui tentaient de protéger leurs compatriotes Bahutu étaient torturés ou tués, il en était de même pour les tutsi en conflit avec l’une ou l’autre personnalité influente du régime. Selon toujours le président de la CVR Pierre Claver Ndayicariye, ces tueries étaient organisées par les autorités administratives et militaires de l’époque. Les gens à tuer étaient considérés comme des traîtres (abamenja), des rebelles ayant voulu renverser le pouvoir, des sorciers (abarozi), des gens qui ne payent pas l’ impôt ou encore de petits animaux « muleles ».

Le pouvoir du président Michel Micombero trouvait tout une gamme de motifs pour exterminer ces Bahutu de cette époque. Des femmes à la recherche de leurs maris ont été tuées, fait remarquer Pierre Claver Ndayicariye. Comme preuve de cette triste réalité, les travaux d’excavation des fosses communes ont montré des objets de beauté propres au femmes notamment les perles et autres. « Les parents des victimes n’ont pas été autorisés à pleurer la disparitions des leurs ni à faire le deuil », a ajouté le président de la CVR.

Le président de la CVR a souligné par ailleurs que le travail de la commission est de rechercher la vérité en vue d’une réconciliation effective entre les burundais. Pierre Claver Ndayicariye s’inscrit en faut contre la victimisation et la criminalisation globales. Pour lui, en droit pénal, chacun est responsable de ses actes. Il invite les quelques auteurs de ces tueries qui seraient encore en vie de prendre le chemin de la repentance, reconnaître les faits et accepter de demander pardon. Ce serait pour eux aussi une façon de se libérer.

Dans son message, le Vice-président de la République Prosper Bazombanza, a félicité et encouragé la CVR pour son travail louable de recherche de la vérité sur ces événements malheureux de 1972. Prosper Bazombanza a également remercié tous les citoyens qui ont volontairement accepté de donner leurs témoignages sur ce qu’ils ont vu et vécu. « Ils ont énormément contribué à la connaissance de la vérité », a précisé Prosper Bazombanza.

Le Vice-président de la République Prosper Bazombanza a insisté sur le fait que ces tueries ne doivent pas être imputées à une ethnie. Ces actes barbares ne sont imputables qu’à leurs auteurs. Il n’y a pas une ethnie qui se soit levée un jour pour aller exterminer une autre. « Ce n’est pas une ethnie qui tue, c’est plutôt une mauvaise gouvernance qui tue, a dit le Vice-président de la République. « Personne ne doit donc se sentir coupable ou être traité ainsi pour des actes commis par ses parents, les grands parents ou les gens de son ethnie », a martelé le Vice Président de la République Prosper Bazombanza.

A cette occasion, le Vice-président de la République a demandé à la CVR de travailler sur les autres événements qui ont endeuillé le pays, pour que la vérité éclate au grand jour, notamment sur ce qui s’est passé en 1988 et en 1993.

Pour le Vice-président de la République, après avoir travaillé sur tous les événements jusqu’en 1993, une cérémonie de levée de deuil définitive de toutes ces victimes pourrait être organisée au niveau national. Cela permettrait aux burundais de tourner cette page sombre de leur histoire pour entrer dans une ère nouvelle, celle d’un Burundi paisible et prospère.

 
Par BARANGENZA Laurent