RGLA: Burundi peut se targuer de donner une leçon historique au Rwanda. 15 juin 2015 Amakuru

Je suis rwandais mais j’ai honte de mon pays le Rwanda. J’ai beaucoup d’envie pour le pays des Bashingantahe. Ils sont fiers de s’appeler Tutsi s’ils sont d’origine ethnique tutsi et hutu s’ils sont hutus. Dans leurs delegations ils le clament haut et fort. Ils sont dignes fils et filles du Burundi et vievent sans aucune complexe.

Les manifestants devant l’ambassade des USA à Bujumbura
Les manifestants devant l’ambassade des USA à Bujumbura
Quand on fait une lecture objective comparée de la situation politique au Rwanda et au Burundi, on voit que le Burundi est à 100 ans d’avance sur le Rwanda. L’une des raisons majeures est indéniablement liée à l’histoire des deux pays qui ont suivi deux chemins différents en matière de la coexistence entre les deux ethnies à savoir (Hutu et Tutsi) mais aussi au niveau des conflits historiques entre les deux nations jumelles.

1. Le Burundi a été toujours vu comme ennemi du Rwanda et tout burundais (hutu et tutsi) identifie le munyarwanda comme ennemi historique. Kagame ne peut rien changer sur ce sentiment anti-rwandais cimenté dans les têtes des burundais. Il voit très court car aucun tutsi burundais patriote ne peut lécher les bottes d’un arrogant tutsi rwandais. Du temps des rois tutsi au Rwanda et au Burundi, des conflits sanguinaires ont endeuillé les deux nations et les noms des localités (sites) des grandes batailles sont toujours têtus pour le démontrer. Nyamirambo et Kirundo pour ne citer que ceux- là. Kirundo est l’expression des monceaux de cadavres des rwandais ayant tenté d’annexer le Bugesera et le Nord-est du Burundi. Les burundais pour donner une référence historique l’ont baptisé Kirundo pour ainsi dire « ikirundo c’imivyimba y’abamenja, cg abagesera).

Du coté rwandais de nombreux burundais ayant trouvé la mort en tentant d’annexer le Rwanda ont été précipités dans les fosses communes de Kigali sur un site appelé Nyamirambo pour ainsi dire site des cadavres (imirambo y’abarundi) .

Quand les rois Mutara (Rwanda) et Mutaga (Burundi) ont tenté de signer la paix à Mapfundo c’était pour mettre à terme à ces conflits fratricides sans fins. Notons qu’un des rois burundais a été tué dans le sud du Rwanda (Matyazo-Butare) et que cette référence historique est d’une importance indélébile.

Quand un journaliste de la RTBN posa une question sur les antennes de la radio nationale pour désigner l’ennemi du Burundi, un jeune écolier a répondu sans mâcher les mots : C’est le Rwanda et le journaliste a félicité l’écolier en disant « uracyishe ». Le jeune écolier n’a pas dit c’est le hutu mais bien « c’est le Rwanda » nous pouvons nous imaginer qui lui a appris que le Rwanda est l’ennemi du Burundi (cours de civisme).

2. Le chemin suivi par le Burundi sur le plan politique et interethnique a été toujours différent du modèle rwandais. Au Burundi une formule fut trouvée pour mettre un arbitre entre hutu et tutsi et les deux ethnies devaient se soumettre à l’arbitrage du Muganwa. Même si les Abaganwa étaient tous d’origine tutsi (sur le plan physique) mais sur le plan politique et social ils étaient supposés être au-dessus de la mêlée donc en dehors des deux ethnies. Ceci a permis à modérer et à stabiliser le Burundi contre les tumultes vécus au Rwanda qui s’était embarqué dans l’extrémisme tous azimuts.

Le Rwanda a toujours prôné et prône encore la suprématie de l’ethnie tutsie sur la masse hutue alors qu’au Burundi n’eut été le flux des réfugiés tutsi ayant incité la haine contre les hutus du Burundi, le génocide de 1972 perpétré contre la population hutue n’aurait eu lieu. Le roi Mwambutsa qui était un Umuganwa n’aurait non plus été déposé par une junte fanatisée, composée pour la plupart de jeunes officiers de Bururi. Au moment où au Burundi une autre formule avait été trouvée pour désigner un Premier Ministre d’origine hutu au Rwanda voisin la réaction extrême préconisait qu’il n’y avait aucune relation entre des tutsi et le hutu à part celle de maître-esclave. Aujourd’hui cette relation a été mise à jour pour devenir celle entre génocidaire et victime avec toutes les implications que cela dégénère sur le plan politique et sociale.

3. Au Rwanda actuellement aucune contestation populaire n’est possible. Tout le monde vit dans une peur bleue et doit acclamer le président Kagame et sa clique par peur de ne pas suivre les autres victimes dans le lac Rweru et dans des « memorial sites » éparpillés sur tout le territoire national. Kagame est élu avec un record du soviet suprême soit à plus de 95% voire 120% du suffrage universelle ce qui n’a jamais existé dans des régimes démocratiques que l’occident et les USA en particulier défendent.

Au Burundi par contre l’opposition s’exprime parfaitement par des manifestations publiques, la police utilise des gaz lacrymogènes. L’opposition ose même faire usage de la force voire tenter un coup d’état militaire avec le soutien des soit disant démocraties occidentales. On a vu récemment le démagogue Louis Michel s’en prendre au pouvoir actuel du Burundi en le menaçant de renversement et de coupure d’aide étrangère alors qu’il ne cesse de louer la bonne gouvernance de son client des minerais du sang du Congo à savoir le dictateur Paul Kagame.

Par ailleurs, l’opposition burundaise comprend autant des hutus que des tutsi et les partisans du pouvoir en place comprennent autant de hutus et tutsi. Ceci a mis en échec le plan machiavélique forgé pour soumettre le Burundi au schéma réducteur Hutu/Tutsi. L’armée de journalistes occidentales avec Dallaire en tête tous affamés de voir le génocide se commettre contre des tutsi Burundi selon le même schéma tracé au Rwanda de 1994 ne s’en remettent plus. RFI et ses partenaires (BBC, VOA, CNN, France 24…) ne s’en remettront jamais pour cet échec cuisant que les burundais leur ont infligé. Le peuple burundais a une maturité certaine et l’élite tutsi en particulier est plus patriotique que ses cousins rwandais.

4. L’analyse de la situation politique au Rwanda et au Burundi nous permet de conclure qu’aucune allégeance n’est possible entre l’élite tutsie du Burundi et leurs supposés parrains du Rwanda. L’armée burundaise est composée certes d’un contingent important de tutsi mais l’élite tutsie au sein de l’armée burundaise considère toujours le Rwanda comme un ennemi séculaire. En plus il s’agit d’une armée bien formée dont les officiers ont fait des grandes écoles de guerre.

Ils ont appris l’histoire militaire et ne peuvent commettre l’erreur de se soumettre au vil mépris d’un général arrogant et analphabète pour la simple raison qu’il est tutsi. Les tutsi du Burundi sont toujours confortables sans Kagame. Ils savent qu’ils possèdent toujours l’économie du pays, que leurs enfants font de belles écoles et qu’ils ont une part privilégiée dans l’armée et la fonction publique. Nkurunziza ne leur fait rien, il est docile et peut dormir tranquille. Ils préfèrent Nkurunziza qu’ils gèrent bien plus ce que Kagame qui n’hésiterait pas de les traiter d’imbéciles pour avoir accepté de donner des honneurs militaires à un président hutu.

5. Le putsch au Burundi a échoué pour des raisons développées ci-dessus, système d’équations que les malheureux analystes occidentaux ne comprendront jamais. Les tutsis du Burundi sont en avance et voient clairement où leur conduit la manipulation occidentale. Les occidentaux n’ont jamais appris de l’inexactitude et de l’anachronisme de leur analyse. Le fait qu’ils aient armé le Rwanda et l’Ouganda en RDC pour être doublement surpris : par l’intervention des armées Zimbabwéenne, Angolaise et Namibienne puis par un affrontement sauvage entre l’armée ougandaise et rwandaise à Kisangani devrait leur servir de leçon historique.

Par ailleurs la même tentative d’armer l’Ethiopie et l’Erythrée pour occuper le Soudan a échoué par les armes américaines données à ces deux pays ont été utilisées dans une confrontation fratricide sans merci. Suzanne Rice et son ami Kagame ont tout fait pour servir de facilitateur mais jusqu’à ce jour la médiation entre les deux pays s’avère impossible.

6. La politique américaine est un échec cuisant en Afrique pour trois raisons évidentes : N’ayant jamais colonisé l’Afrique, ils ne connaissent pas nos réalités politico-sociales. Ils sont manipulés par des cliques qui veulent se maintenir au pouvoir en faisant usage aux pseudo-analystes soit disant spécialistes de l’Afrique. Les USA, comme un éléphant qui entre dans la porcelaine brise tout sur son chemin et sans ses erreurs politiques et militaires, aucun génocide n’aurait vu le jour au Rwanda eu en RDC. Si l’Afrique s’en est tirée de la colonisation européenne avec le génie de nos pères d’indépendance, il est indéniable que la même Afrique se libèrera du joug du néo-colonialisme qui utilise des minorités ethniques pour déchirer à nouveau l’Afrique dont les plaies saignent à nouveau après une douloureuse décolonisation européenne.

L’Afrique doit chercher d’autres alternatives pour échapper à ce piège néocolonial. Faire murir le vaste projet d’unité africaine (sur le plan politique et économique), et se tourner vers d’autres partenaires issus des pays émergeants comme la Chine, le Brésil et la Russie peut guérir l’Afrique et lui assurer son indépendance et respect dans le forum des nations. La malheureuse Belgique de Louis Michel n’a plus de place sur la scène africaine. Le temps du Rwanda de Habyarimana et du Zaïre de Mobutu qui avaient toujours tablé sur son importance dans l’équilibre politique des Grands Lacs est révolu.

La Belgique a perdu pour de bon son élève-modèle en la personne de Habyarimana. Les morts sont bien morts et ils ne reviendront jamais. Les rwandais ont envahi le monde et sont arrivés dans tous les pays du monde. Louis Michel doit s’intéresser à sa propre maison en feu pour laver le linge sale (conflit entre des wallons et flamands).

Le Burundi n’a pas besoin et n’aura jamais besoin du moribond royaume de la Belgique pour son sursaut. Des géants plus intéressants ont vu le jour. Mieux aller à Pékin, Brasilia, Tokyo, Seoul qu’à Bruxelles.

Ecrit par

Munanira Karake