Lettre ouverte d’un Mugumyabanga au Ministre des Finances; « Dr Ndikumana, l’arbre sur lequel vous êtes assis, vous êtes en train de le scier en direct! »

Alors que le Burundi traverse une période de fortes turbulences économiques dues aux crises passées causées par les putschistes de 2015 aujourd’hui logés à Kigali, les déclarations tonitruantes du ministre des Finances, du Budget et de l’Économie numérique, le Dr Alain Ndikumana, ne cessent de faire couler de l’encre et de crisper les esprits. Après la publication de l’article explosif du Burundi Forum intitulé « ACTE XIII – 2026 : Un an de plus pour la mafia financière de Suguru ? », un de nos lecteurs, se présentant comme un « Mugumyabanga » (membre discret et loyal du parti CNDD-FDD), nous a adressé cette lettre ouverte, d’une véhémence rare. Il nous prie de la publier, estimant que le ministre, friand de place publique, mérite une réponse sur la même place. Voici sa prose, sans filtre.

« Monsieur le Ministre, Docteur Alain NDIKUMANA,

Je vous écris cette lettre, non pas dans l’ombre feutrée d’un bureau, mais à la lumière crue des projecteurs que vous affectionnez tant. Puisque vous avez élu la rue et les médias comme tribunal pour diriger et gouverner, j’ai jugé bon d’en faire suite par le même canal sonore et médiatique. Après vos déclarations en rafale, vos accusations à l’emporte-pièce contre vos propres collègues du gouvernement, et après avoir lu l’article du Burundi Forum qui dépeint un système financier tentaculaire et impuni, le silence n’était plus une option.

Quand vous avez été nommé, Monsieur le Ministre, un vent d’espoir a soufflé sur le pays. On voyait en vous l’archétype du technocrate salvateur, le Ph.D. détaché des luttes partisanes, celui qui viendrait, calculette et théories à l’appui, redresser l’économie nationale éreintée. Nous avions cru à un miracle. Hélas, en moins de six mois, le mirage s’est évaporé. Vos sorties publiques ressemblent moins à un plan de sauvetage qu’à une série de feux d’artifice imprévisibles – spectaculaires, bruyants, mais laissant derrière eux un ciel noir et des oreilles blessées. Ce n’est pas en public qu’un membre du Gouvernement accuse son Collègue ou traite des dossiers sensibles ! Les rencontres, les rapports confidentiels et d’autres canaux de communication discrets existent.

Vous, le détenteur d’un doctorat, formé dans les temples du savoir, vous devriez savoir qu’un ministre des Finances n’est pas un activiste de plateau TV. On mesure, on analyse, on prouve, avant de lancer des anathèmes. Votre charge contre la société FOMI, balayée d’un tweet par l’accusée, est devenue, en l’espace d’une journée, l’emblème de vos approximations. Où sont vos preuves, Docteur ? Où est la rigueur scientifique que votre titre appelle ? Vous donnez l’impression de naviguer à vue, dans un océan de dossiers que vous ne maîtrisez pas encore, en tirant à boulets rouges sur vos propres navires. Avant de communiquer quoi que ce soit, il faut d’abord s’assurer de la véracité des informations que l’on vous apporte.

Pire encore, vos déclarations semblent creuser la tombe des programmes phares du parti qui vous a pourtant offert ce poste. La gratuité des soins pour les enfants et les mères ? Vous la remettez en cause. Les subventions aux engrais, pierre angulaire de notre souveraineté alimentaire ? Vous les contestez. On dirait que vous êtes devenu, à vous seul, un gouvernement parallèle, une voix si forte qu’elle couvre toutes les autres. Le président de la République vous a confié un ministère, pas un trône. Cette faveur, dites-vous vous-même, est « imméritée ». Au moins, sur ce point, nous sommes d’accord.

Sachez, Docteur, que vous êtes assis sur une branche que vous sciez avec une énergie folle. L’idéologie de notre parti, celle de l’Aigle, repose sur la discrétion, le discernement, le « Kugumy’Ibanga » (garder le secret). Cette sagesse, des milliers de Bagumyabanga – ces membres humbles, résilients, titulaires de licences, de masters, de doctorats en économie – la pratiquent chaque jour dans l’ombre, attendant patiemment leur heure. Le Président a pourtant annoncé : priorité aux talents, aux compétences. Ces talents existent. Vous avez été choisi, peut-être, pour incarner la diversité et le partage. Pour information, il existe une base de données de plus de 1000 Bagumyabanga titulaires au minimum d’un master au Burundi, et plus de 5 000 dans la diaspora, parmi les Imbonerakure et les Bakenyererarugamba.
Ne soyez donc pas arrogant au point de vous moquer quotidiennement de ceux-là mêmes qui constituent l’ossature du parti.

L’article du Burundi Forum a jeté une lumière crue sur l’empire financier de l’honorable Suguru – un réseau décrit comme une « mafia tentaculaire », un « État dans l’État » qui aurait détourné des centaines de milliards. Et vous, Monsieur le Ministre, dans cette tragédie aux actes multiples, quel rôle jouez-vous ? L’article suggère que vous vous attaquez à des cibles secondaires (FOMI) tandis que le cœur du système, le « périmètre sacré de l’oikosSuguru », reste inviolé. Cui bono ? À qui profite le crime ? Votre silence sur les dossiers brûlants que la presse indépendante expose depuis des mois est assourdissant. On vous croirait presque un épouvantail, faisant beaucoup de bruit pour effrayer les moineaux, tandis que les vautours festoient en paix. Et quand un ministre fait trop de bruit, c’est souvent pour couvrir autre chose.

Un conseil, Docteur, avant qu’il ne soit trop tard : Si vous voulez vraiment servir ce pays, arrêtez le théâtre. Plongez dans les dossiers. Un Ph.D., c’est la philosophie du doute méthodique, pas du dogmatisme médiatique. Avant d’accuser, prouvez. Sinon, votre place n’est peut-être pas ici. On murmure même, dans les couloirs, que vous seriez plus à votre aise à la PARCEM aux côtés de votre homonyme Ndikumana (Faustin), là où les mots remplacent les actes.

Souvenez-vous de la parole biblique que vous aimez peut-être citer : « Tout royaume divisé contre lui-même sera dévasté » (Matthieu 12 :25). En divisant le gouvernement, en attaquant les programmes du parti au pouvoir, à qui rendez-vous service, sinon à ceux qui veulent voir ce parti, issu du sang du peuple, s’effondrer sur lui-même ? La Bible le rappelle aussi clairement : « Si un royaume est divisé contre lui-même, ce royaume ne peut subsister » (Marc 3:24). Mais encore faut-il être du royaume pour le diviser.

Le peuple vous regarde. L’Histoire, impitoyable, jugera. Elle a déjà emporté d’autres bavards trop pressés. Le Capitaine Dukundane en sait quelque chose.Vous n’êtes pas plus disert que l’ancien ministre Dukundane. Et l’Histoire, cruelle pédagogue, nous apprend une chose : où est-il aujourd’hui ?

Un dernier conseil, plus politique : adressez une lettre aux Bagumyabanga de votre colline ou de votre quartier (InamaNshingiro). Intégrez réellement le système si vous voulez servir ce pays. Apprenez l’idéologie. Nous plaiderons même pour vous un moratorium exceptionnel auprès du Secrétaire national chargé de la formation et de la propagande, afin que vous suiviez un cours accéléré, taillé sur mesure, privilège de fonction oblige. Sinon, vous apprendrez l’akarangamutima comme tout le monde. Au niveau collinaire.

Il est temps de choisir : serez-vous le ministre des Finances, ou l’activiste éphémère d’un scénario écrit par d’autres ?

Pour l’heure, nous, Bagumyabanga, patients et vigilants, nous vous attendons au niveau collinaire pour apprendre l’humilité.

Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de notre profonde inquiétude patriotique.

 

Un Mgumyabanga qui croit encore au « Kugumy’Ibanga ».

Bujumbura, le 31 décembre 2025. »

 

Lettre reçue par notre créateur de contenus Jean JolèsRurikunzira