Les Etats-Unis ont demandé au Burundi et au Rwanda de mener d’urgence « des enquêtes impartiales », « avec le concours d’experts » internationaux, sur les cadavres retrouvés flottants dans un lac qui sépare les deux pays, selon un communiqué reçu vendredi.

Officiellement, six cadavres — quatre mi-août puis deux autres en septembre — ont été retrouvés ligotés dans des sacs de jute apparus dans le lac Rweru, à quelque 270 km au nord-ouest de la capitale burundaise Bujumbura, après avoir descendu la rivière Nyabarongo-Kagera, qui prend sa source au Rwanda. Mais sur place, les pêcheurs affirment avoir vu passer des dizaines de corps.

Une commission d’enquête mixte burundo-rwandaise a été mise en place pour déterminer l’origine des cadavres, mais l’affaire embarrasse les deux pays des Grands Lacs et aucune investigation sérieuse n’a jusqu’ici été menée. Les corps n’ont notamment pas été autopsiés, ce qui n’empêche pas Kigali d’affirmer que les morts ne sont pas rwandais et Bujumbura qu’ils ne sont pas burundais.

« Nous lançons un appel urgent aux Gouvernements du Burundi et du Rwanda à débuter des enquêtes rapides, approfondies, impartiales et concertées sur ces cadavres avec le concours d’experts légistes indépendants et internationaux », a dit la porte-parole du département d’Etat américain Jennifer Psaki, dans un communiqué distribué à Bujumbura. Pour elle, les « victimes méritent d’être identifiées », leurs familles « de connaître leur sort » et les « coupables doivent être traduits devant la justice ».

Selon des sources concordantes à Bujumbura, Washington aurait proposé l’aide du FBI pour éclaircir cette affaire.

Les pressions américaines interviennent alors que dans la région du lac Rweru, le mystère des cadavres flottants a tendance à chaque jour prendre de l’ampleur.

Dans la nuit de dimanche à lundi, « un groupe de personnes non identifiées ont accosté » côté burundais, à l’endroit où les quatre cadavres retrouvés en août avaient été enterrés, a révélé à l’AFP Aline Manirabarusha, gouverneure de la province burundaise de Muyinga qui borde le lac. Selon elle, les inconnus voulaient « déterrer » les cadavres mais ils « ont fui lorsqu’un veilleur de nuit les a surpris ».

Depuis, l’administration locale a interdit la pêche sur le lac de 18h00 à 6h00 du matin. L’armée burundaise a elle envoyé un second bateau de la marine burundaise pour « sécuriser » la zone, ainsi que des renforts dans tous les petits ports du coin. Selon un haut gradé burundais, des renforts rwandais avaient précédé leurs collègues burundais dans la région.

La rivière Kagera avait charrié de nombreux corps durant le génocide de 1994 au Rwanda. En 2006, des corps d’opposants burundais, assassinés lors de violences politiques, avaient été jetés dans divers cours d’eau du Burundi.