Washington et l’Union européenne saluent l’annonce d’une offensive militaire contre les rebelles du FDLR. Mais hier au lieu d’opérations conjointes avec la Monusco, ce qui était souhaité par la communauté internationale, les Forces armées de RDC se disaient décidées à faire cavalier seul, au moins dans un premier temps.
Le rôle des Nations unies dans cette opération reste imprécis, et suscite scepticisme et inquiétude.
« Que l’armée congolaise ait décidé de prendre le lead ? On ne peut que s’en féliciter, assure Abdallah Wafy, le numéro 2 de ma Monusco, avant de compléter : venir en appui, c’est notre rôle ». Officiellement, donc, tout va bien. Difficile de critiquer ouvertement une opération réclamée depuis des semaines.
L’ultimatum, fixé par la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) et la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) aux rebelles hutus rwandais a en effet expiré depuis près d’un mois, et la pression était forte sur les autorités congolaises pour faire le feu contre les rebelles.
Mais dans les coulisses des Nations unies, on ne cache pas un certain malaise devant cette politique du fait accompli. Ces dernières semaines, le président Kabila ne répondait plus à Ban Ki-moon au téléphone, raconte une source diplomatique.
Et si la hiérarchie militaire congolaise dit ne pas exclure un appui logistique de la Monusco, sa marge de manœuvre reste très incertaine. « L’ONU ne sera pas associée à la planification stratégique et n’aura pas accès à toutes les informations », s’inquiète un analyste, qui, comme beaucoup, redoute les conséquences sur les civils.
Eviter les « dégâts colatéraux »
C’est le cas de Me Kavota, porte-parole de la société civile du Nord-Kivu, qui déclare soutenir l’opération, même s’il aurait souhaité qu’elle se fasse conjointement avec la Monusco. Il estime qu’il faut éviter au maximum « les dégâts collatéraux ».
« Au cours des six derniers mois, précise-t-il, les FDLR ont eu le temps nécessaire pour se disséminer à travers les populations civiles et peuvent jouer l’assimilation. Il faut que des dispositions soient prises de manière à mettre à l’abris les civils lorsque les tirs sont dirigés contre des personnes traquées. »
Les rebelles hutus rwandais vivent mêlées à la population, et de précédentes opérations menées en 2009 avaient provoqué des centaines de milliers de déplacés. Un risque que le plan établi par la Monusco n’aurait d’ailleurs pas totalement écarté.
Au point que l’agence humanitaire des Nations unies (Ocha) avait tiré la sonnette d’alarme en janvier, expliquant des dizaines de milliers de civils seraient probablement contraints de fuir leurs maisons.
Inquiétude donc et scepticisme aussi sur les capacités des FARDC à mener seule cette opération. Hier soir d’ailleurs, personne n’était en mesure de dire si elle avait réellement commencé.
Pour le moment, les autorités à Kigali se sont refusées à tout commentaire à l’annonce de l’offensive contre les rebelles rwandais.
« Le Rwanda est bien plus intéressé par le résultat d’une offensive contre les FDLR qu’aux annonces à cet effet », a justifié un officiel rwandais sous couvert d’anonymat et s’exprimant à son titre personnel, ajoutant qu’à Kigali ont est « impatients ».