Burundi. Le jeu de ping pong
par Webmaster ⋅ vendredi 18 avril 2014

Le climat politique au Burundi est surchauffé tout comme les esprits, depuis la fuite d’un câble “confidentiel” envoyé par le Bureau des Nations Unies au Burundi (BNUB) au Conseil de Sécurité. Ce document contenait des allégations graves, « la distribution d’armes aux jeunes affiliés au parti au pouvoir, les Imbonerakure ». Ce document, daté du 3 avril 2014, trois jours avant la célébration du 20ème anniversaire du génocide rwandais, est sans aucun doute à l’origine de cette crise de confiance entre le Gouvernement du Burundi et les Nations unies, qui a atteint son apogée le 16 dernier avec le renvoi du « United Nations Security Advisor », M. Paul Debbie.

Le dimanche 6 avril, très tôt avant la levée du soleil, alors qu’au Rwanda on se réveillait en éteignant cette 20ème bougie du génocide rwandais qui a emporté, selon les estimations, plus de 800.000 personnes, The Guardian publiait « sur commande » un article mensonger allant dans le sens du câble onusien. Des machettes seraient distribuées par le président Pierre Nkurunziza (Hutu) pour exterminer les Tutsi du Burundi. Complot.

Deux anciens présidents ratent leur marche

Cette idée fantasmatique de réveiller les vieux démons du « génocide » n’était finalement pas l’apanage d’une poignée d’individus. Deux anciens présidents de la République du Burundi viennent de rentrer d’une tournée, aussi clandestine que le câble du BNUB, mais qui, hélas, a plutôt mal tourné. Il s’agit de Domitien Ndayizeye et Sylvestre Ntibantunganya. D’abord à Addis-Abeba, en Ethiopie. Une idée. Convaincre l’Union africaine à emboîter le pas au Conseil de Sécurité en indexant le pouvoir « génocidaire » de Bujumbura. Ils rencontrent le Président de la Commission Paix et Sécurité et tentent de le convaincre que Pierre Nkurunziza est un Tribalo-génocidaire, qui entretien une milice, prête à éliminer à la machette les Tutsi. Mon Dieu !

Poursuivant leur bonhomme de chemin, le tandem se rend à Dar-es-Salaam à la recherche d’un entretien avec le Président Jakaya Kikwete. Refus catégorique. Le Protocole d’Etat tanzanien n’a pas été avisé par l’ambassade du Burundi en Tanzanie à l’avance pour arranger ce rendez-vous. La honte suffisamment bue, les deux désormais loosers vont passer par Nairobi à la recherche, également, d’une audience auprès du Président Uhuru Kenyatta. Autre refus catégorique. Pour les deux, il ne reste plus qu’à se sauver par la petite porte. Direction Bujumbura et se terrer dans leurs maisons, en espérant que l’opinion n’en saura rien. Raté !

Des Hutus qui crient … Halte au Génocide des Tutsi !

On aura tout vu dans ce pays. Un Tutsi s’étonnait dernièrement : « Mais pourquoi ce génocide contre les Tutsi du Burundi ne vient que de la bouche des Hutu ? Léonce Ngendakumana, Charles Nditije, Domitien Ndayizeye, Sylvestre Ntibantunganya, Chauvineau Murwengezo, … Comme la mémoire peut être courte ! De toutes les façons les burundais (y compris ces Tutsi) n’ont pas encore oublié qu’en 1994, c’est Sylvestre Ntibantunganya qui a distribué des armes à Kamenge à ceux qui, à l’époque, Netpress et la Radio Nationale épinglaient à longueur de journée comme « Terroristes tribalo génocidaires ». Les mêmes qui sont au pouvoir maintenant. Et c’est au tour donc de M. Ntibantunganya de les étiqueter de la sorte ?

Pour le second, Domitien Ndayizeye, c’est assez simple, clair et limpide. Il est explicitement cité parmi les personnes qui ont perpétré le génocide rwandais. Un confrère disait : « Qu’il soit permis de rappeler ici qu’un des tous premiers génocidaires jugés et exécutés publiquement au Rwanda en 1994 était un Burundais, un certain Leonidas originaire de la commune Songa en Province Bururi et membre du FRODEBU. Ici, Domitien Ndayizeye doit préparer sa défense, lui qui était chargé d’approvisionner notamment du Rwanda la machine génocidaire burundaise actuellement au pouvoir et qui a ligué ses efforts avec les autres génocidaires rwandais pour parachever l’innommable d’abord au Burundi puis au Rwanda ».

Sans toutefois faire nôtres les déclarations de ce confrère, nous voudrions attirer l’attention de l’ancien Président Domitien Ndayizeye sur le fait que ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui, traités à tort de « génocidaires » par lui, et le parti Frodebu de Léonce Ngendakumana, n’ont pas évolué au Rwanda et sont éloignés des événements fâcheux et ignominieux qui ont emporté des centaines de milliers d’innocents au Rwanda. Le directoire du Frodebu, quant à lui, est plutôt composé de personnes ayant été liées de près ou de loin avec ces atrocités, d’abord au Rwanda, puis au Burundi.

A toutes fins utiles, nous laissons au lecteur la liberté d’apprécier un extrait d’un mot liminaire de l’ancien Président Ndayizeye, le 8 avril 2003, lorsqu’il tenait une conférence de presse. Il a dit ce qui suit : « Ainsi dernièrement a-t-on monté des histoires comme quoi il y a distribution de machettes dans la population en vue de massacres inter-ethniques, ainsi que la vision apocalyptique que certains dressent autour de l’alternance. Tout cela pour embrigader encore notre population dans les affres d’une situation que nous voulons précisément quitter à tout jamais. Et là dedans, mesdames messieurs les journalistes, vous avez une grande responsabilité de sensibiliser les auditeurs non pas dans un sens qui désoriente, mais dans un sens objectif et constructif. » Et là c’était en 2003.

Les médias s’en mêlent

Comme on pouvait s’y attendre, les médias burundais « de l’opposition » n’ont pas tardé à sauter sur cette occasion pour, « dans un sens qui désoriente », en découdre avec le pouvoir, eux qui sont toujours prêts à se coaliser pour mettre les battons dans les roues du gouvernement. Le Cndd-Fdd ? Ils ne l’ont jamais eu en odeur de sainteté. Alors quoi ! Synergie bien sûr : Radio Publique Africaine, Isanganiro, Bonesha FM, Renaissance et … la moue fâchée, grommelant des insultes à l’endroit de tout un peuple. Ces flagellateurs de la plume se trompent sur toute la ligne.

Mais bon ! Les auditeurs sont habitués à ces commérages amplement médiatisés et à toute bise. Mais pour ce cas d’espèce, sous d’autres cieux, le patriotisme aurait primé… pour les patriotes bien évidemment. Pauvre pays ! Jusqu’où ira donc ce jeu de ping-pong ? Seul le temps nous le dira.

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