ACTE XI — Quand la République se délivre d’une ombre : l’ère SUGURU vacille enfin !

Société

Le décret N°100/104 du 1er décembre 2025 tombé a fait l’effet d’un couperet : Olivier SUGURU, personnage aux mille casquettes et aux mille zones d’ombre, est évincé de la tête de l’Agence pour le Développement du Burundi (ADB). Une décision du Chef de l’Etat Burundais S.E le Général Major Evariste NDAYISHIMIYE que d’aucuns qualifient de salutaire in extremis, tant l’institution semblait prise en otage par un homme dont les pouvoirs avaient fini par défier la gravité républicaine.

Le crépuscule d’un “intouchable” ?

Le nouveau décret N°100/104 signé par Son Excellence le Président de la République du Burundi, le Général-Major Évariste NDAYISHIMIYE a, selon plusieurs observateurs, « sauvé l’Agence de Développement du Burundi (ADB) » d’une descente aux enfers annoncée ». Les partenaires au développement « en perdaient leur latin » face à une concentration de pouvoirs inédite dans l’histoire économique du Burundi.

Car Olivier SUGURU n’était pas seulement président de l’ADB : il cumulait, tel un funambule défiant les lois de l’éthique et de déontologie, les rôles de parlementaire, président de la Chambre Fédérale de Commerce et d’Industrie du Burundi (CFCIB), secrétaire général de la société SAVONOR… sans oublier ses ramifications dans un réseau d’entreprises réelles et fictives ainsi que mafieuses. Juge et partie, actor et judex, diraient les anciens.

Ce pouvoir protéiforme avait fini par inquiéter même les plus prudents, dans la population comme parmi les acteurs économiques. Les signaux d’alarme s’étaient multipliés, au point que certains économistes cités par notre rédaction — de Joseph Stiglitz à Ha-Joon Chang en passant par Paul Krugman — rappelaient que « les économies capturées par des élites prédatrices finissent toujours par imploser sous leur propre poids ».

L’heure des comptes ?

La décision du Chef de l’État Burundais semble être une réponse aux enquêtes menées depuis plusieurs années par notre médium pour décrire ceux qui phagocytent l’économie burundaise tout en s’abritant sous le parapluie du système politique burundais. Une hydre économique dont SUGURU représente, selon nos analyses, la tête la plus visible.

Nos investigations ont notamment révélé qu’il avait « saigné » la BANCOBU en obtenant un crédit de plus de 120 milliards BIF sans garanties, fragilisant dangereusement la stabilité financière du pays. Une manœuvre que certains experts assimilent à « une bombe à retardement déposée au cœur du système bancaire ».

Avec son bras droit BUSIKU — ex-ADG adjoint de la BANCOBU et désormais consul honoraire des Maldives au Burundi — SUGURU aurait ensuite logé ses fonds dans ce paradis fiscal lointain, à Dubaï, au Kenya, dans d’autres paradis fiscaux, ajoutant un chapitre de plus à une saga digne d’un thriller politico-financier.

Ajoutons à cela des marchés publics accaparés de facto, des réseaux de corruption déguisés en amitiés stratégiques, et même l’implication présumée de proches, dont sa propre épouse, aujourd’hui présidente de la BGF. Une toile d’araignée tentaculaire.

L’Administration de Son Excellence Evariste NDAYISHIMIYE durcit le ton

Lors d’un événement à Bujumbura, suivi en direct sur les réseaux sociaux par les Burundais et les Etrangers, le 2 décembre 2025, qui était dédié à la promotion de la Vision 2040/2060, le Premier ministre Honorable Nestor NTAHONTUYE a livré des propos qui sonnent comme un avertissement clair aux prédateurs financiers :

« La nation ne saurait atteindre ses objectifs sans une gouvernance financière intègre, transparente et responsable. La lutte contre les corrompus et les corrupteurs est une condition essentielle de la stabilité financière, économique et sécuritaire… »

À travers ce décret, le Président de la République semble vouloir démonter pièce par pièce les mécanismes occultes qui minent l’État de droit. Fiat justitia, ruat caelum — que justice soit faite, même si le ciel doit tomber.

Les Burundais attendent plus : le démontage total du réseau mafieux SUGURU.

Mais les sceptiques murmurent encore…

Une photo devenue virale a mis de l’huile sur le feu : la famille SUGURU aux côtés du Chef de l’État lors de l’inauguration de « East Africa Textile Manufactures », une usine de textile à Gitega dont le monopole sur la production des uniformes de la FDNB et de la PNB soulève des interrogations majeures.

(Crédit Photo : Jimbere Magazine lors du lancement de l’usine)

La valeur déclarée de l’usine — 20 milliards de BIF — laisse perplexes bien des analystes. Elle apparaît comme un château de cartes posé sur les 120 milliards de BIF arrachés à la BANCOBU.

Un diplomate européen interrogé par notre rédaction, sous couvert d’anonymat, n’a pas mâché ses mots :

« S’afficher avec un homme sur lequel pèsent autant de soupçons est un risque politique majeur. Le Président devrait prendre ses distances. SUGURU est un personnage douteux, et sa proximité n’avantage pas le Burundi sur la scène internationale. La place de SUGURU devrait être MPIMBA, pas sur des photos avec le Chef de l’Etat ».

Un conseil à peine voilé, qui rejoint les analyses de Kenneth Rogoff lorsqu’il affirme que « la réputation économique d’un pays peut être détruite par un seul acteur trop puissant et trop peu scrupuleux ».

Un tournant majeur tout de même ?

La question demeure : cette destitution représente-t-elle un tournant majeur dans la lutte anti-corruption ?

La chute d’Olivier SUGURU pourrait marquer la fin d’une ère de l’impunité. Mais elle pourrait tout aussi bien n’être qu’un premier pas, une simple fissure dans une architecture opaque et mafieuse qui a longtemps résisté aux appels de la transparence.

Ce qui est sûr, c’est que l’heure des comptes semble avoir sonné. Et dans cette tempête politique et économique, le Président Évariste NDAYISHIMIYE est déterminé plus que jamais.

Le combat continue.

Et dans cette bataille, nous ne nous tairons jamais.

Par Jean Jolès Rurikunzira