CVR – Débat sur sa composition (Iwacu 09/12/2014)

L’Assemblée nationale a élu, ce mercredi 3 décembre, les onze membres de la Commission Vérité et Réconciliation (CVR). La société civile crie à l’exclusion et à une parodie d’élection.

Quatre commissaires sont issus des partis politiques (même si tous avaient pris soin de glisser dans le dossier de candidature un écrit attestant qu’ils sont apolitiques). Les commissaires Clotilde Bizimana, Didace Kiganahe, Pascasie Nkinahamira, et Clotilde Niragira se reconnaissaient respectivement dans les partis FNL de Jacques Bigirimana, le Frodebu Nyakuri, l’Uprona et le Cndd-Fdd.

Six commissaires sont des religieux. Il s’agit de trois prêtres catholiques : Mgr Antoine-Pierre Madaraga, Mgr Jean-Louis Nahimana et Père Désiré Yamuremye. Les églises protestantes sont représentées par Mgr Bernard Ntahoturi (anglican) et Mgr Onesphore Nzigo (méthodiste libre). Sheikh Ali Shabani représente les musulmans du Burundi.
La CVR est composée de 6 Hutu et de 4 Tutsi. La sénatrice Libérate Nicayenzi représentera les Twa. Sur les onze commissaires, quatre sont des femmes.

Signalons que les « heureux élus » ont enregistrés des scores brejneviens : entre 76 et 84 voix pour sur 88 voix exprimées. Le vote s’est déroulé en l’absence des députés upronistes à l’exception de François Kabura (2 ème vice-président de l’Assemblée nationale), d’André Ndayizamba et d’Etienne Simbakira.

La société civile « perplexe »

Après le vote, Jean Minani, président du Frodebu Nyakuri, se dira satisfait des élections. Par contre, au nom d’ « Impunity Watch Burundi », Jeanine Nahigombeye, affirmera que l’élection n’aura été qu’ « une farce », « une mise en scène ». « Tous les membres étaient déjà connus avant même l’opération de vote. La preuve : ce sont les onzes premiers sur la liste d’appel qui sont passés. » Chantal Gatore (Forsc) fera la même observation.

Les deux femmes avouent avoir confiance dans la personnalité de Mgr Jean-Louis Nahimana, mais se disent « perplexes » sur la CVR dans son ensemble. Elles parlent d’un « deal » entre les politiciens et les religieux au détriment de la société civile.


Mgr Jean- Louis Nahimana : « le prêtre qui rassure »

Mgr Jean LouisPlébiscité président de la CVR (79 voix pour sur 86), Mgr Jean-Louis Nahimana est présenté comme un « homme respecté » qui force même l’admiration des sceptiques.

Ancien vicaire général de l’archidiocèse de Bujumbura, Mgr Jean-Louis Nahimana, 50 ans, est actuellement responsable de la commission diocésaine Justice et Paix de Bujumbura. De 1999 à 2005, il était vicaire épiscopale de Bujumbura et curé de la Cathédrale Regina Mundi. Il avait occupé ce poste entre 1992 et 1996. Il a été curé des paroisses Saint Sauveur de Nyakabiga (19998-1999) et Notre Dame du bon Conseil à Murmvya (1996-1998).

Comme « engagement sociaux », Mgr Jean Louis Nahimana a été vice-président de la commission nationale chargée du désarmement et de la lutte contre la prolifération des armes légères (2007-2008). Il a été membre de la commission electorale provinciale en mairie de Bujumbura (2004-2005). De 1995 à 1994, Mgr Jean-Louis était membre de la commission nationale chargée de préparer le débat national autour du conflit burundais.

Signalons que Mgr Jean-Louis Nahimana est né à Rennes (France) en 1964.


Mgr Bernard Ntahoturi, « la sagesse au service de la CVR

Mgr Bernard NtahoturiMgr Bernard Ntahoturi, 66 ans, a été évêque du diocèse de Matana avant d’être archevêque de l’Eglise Anglicane du Burundi. C’est le poste qu’il occupe actuellement. « Le sage » originaire de Matana (Bururi) a été élu au poste de vice-président de la CVR.

De 1997-1992, il était secrétaire général de la province de l’Eglise Anglicane du Burundi.
Mgr Bernard Ntahoturi a été fonctionnaire à la présidence de la République de 1979 à 1987. Une année avant, il était directeur adjoint à Action Aid Burundi (1978-1979). Il fut directeur du Lycée Matana de 1976 à 1978.

Signalons que de 1998 à 2000, il a représenté les Eglises protestantes du Burundi dans les négociations pour la Paix et la Réconciliation au Burundi en qualité d’observateur. Il est membre du Conseil National de Sécurité, depuis 2007.

Après ses études primaires à Matana, il a fréquenté l’Ecole Moyenne Pédagogique de Kibimba où il a obtenu le diplôme d’instituteur D4. Il a fait ses études théologiques à l’étranger, notamment en Ouganda et dans les précieuses universités de Cambridge et Oxford en Angleterre.


Clotilde Niragira, « une femme dans les bonnes grâces du président de la République »

Clotilde NiragiraMinistre de la Solidarité Nationale, des Droits de la Personne Humaine et du Genre depuis 2011, Clotilde Niragira, 46 ans, a été élue au secrétariat exécutif de la CVR. Cette licenciée en droit de l’Université du Burundi est originaire de Bugenyuzi (Karusi).

Depuis 2005, elle occupe de hautes fonctions étatiques. En effet, hormis l’actuel ministère, elle a déjà dirigé le ministère de la Fonction publique, du Travail et de la Sécurité Sociale et celui de la Justice et Garde des Sceaux. Elle a aussi occupé de hautes fonctions à la présidence de la République.

Signalons qu’en 2005, Me Niragira était membre de la commission électorale nationale indépendante (Ceni).
Comme magistrat, elle fut substitut du procureur de la République en Mairie de Bujumbura (2001-2004) avant d’être substitut général près la Cour d’Appel de Bujumbura. De 2001 à 2004, elle était avocate.

Me Clotilde Niragira dit qu’elle adore la lecture des ouvrages sur les enquêtes criminelles. Elle pratique la marche et aime des discussions avec les amis sur des questions politiques ou de droit de la personne humaine.