Comme signes de situation très tendue, il faut citer la suspension d’une émission de la synergie des médias par la justice. Des mandats d’arrêts auraient été délivrés contre Pacifique NININAHAZWE du FOCODE et Vital NSHIMIRIMANA du FORSC. Ils seraient accusés d’atteinte à la sécurité de l’Etat et de manipulation des mineurs à des fins de subversion. Même sort pour Pierre Claver MBONIMPA de l’APRODH pour obstruction aux forces de l’ordre qui tentaient de fermer les locaux de la Maison de la Presse où était retransmise l’émission en direct de la synergie des médias. C’est là que se trouve le studio de l’association burundaise des radiodiffuseurs (A.B.R). La radio RPA émettant depuis Ngozi a été suspendue. Pierre Claver MBONIMPA qui était en liberté conditionnelle pourrait retourner très rapidement en prison. Les arrestations des manifestants parfois en bas âge se sont poursuivies.
Du côté des organisateurs des manifestants, on note un sentiment de satisfaction exprimé notamment par Minani Jean du FRODEBU NYAKURI. Onésime Nduwimana s’est aussi exprimé pour encourager les manifestations et réitérer l’appel des frondeurs à l’abandon du projet de candidature de Nkurunziza. Les professionnels des médias comme Patrick Nduwimana de la Radio Bonesha se sont insurgés contre les mesures de suspension des émissions. Il a appelé au respect du métier des journalistes et du droit à l’information. Mais les autorités gouvernementales ont évoqué les impératifs de sécurité et ont dénoncé les sympathies dites flagrantes des journalistes de la synergie des médias envers les manifestants.
L’autre opinion qui s’est exprimée à travers la radio Rema FM proche du pouvoir, condamne les manifestations et les violations des droits de ceux qui ne soutiennent pas les manifestations et qui sont empêchés de se rendre au travail. Cette opinion dénonce les actes de violence des manifestants et les intimidations qui auraient été perpétrées contre les jeunes affiliés au parti au pouvoir par les militants du FNL de Rwasa Agathon surtout à Kanyosha. Les accusation qui ont été reconnues par la police et les témoins sur place : ont signalé des risques d’affrontement entre ces deux groupes de jeunes!
Mises à part les mesures qui sont prises contre les médias, les autorités gouvernementales n’ont aucun répit. Le ministre KAVAKURE recevait ce matin l’envoyé spécial de l’ONU dans la région des grands lacs. D’après ses déclarations à la presse, le fonctionnaire onusien est au Burundi pour appeler à l’apaisement et à l’arrêt des manifestations. Il était prévu que le fonctionnaire onusien rencontre le président Nkurunziza. Une lueur d’espoir si l’on considère que la présidente de la commission de l’Union Africaine a appelé à l’arrêt des manifestations pour règler les problème par le dialogue. D’aucuns espèrent que la rencontre de ce haut diplomate avec les opposants et le parti au pouvoir puisse déboucher sur une trêve et une voie de sortie de crise.
En quittant la capitale, l’on doit observer le calme et une situation presque normale du côté de la gare du Nord, de Kamenge et Kinama. Ces quartiers pourraient sortir de l’attentisme et déverser les Imbonerakure sur Cibitoke, Ngagara, Mutakura voire même Musaga. Ce risque de confrontrations est mis en avant par ceux qui appellent à l’arrêt des manifestations. A l’intérieur du pays, les gouverneurs de province qui s’expriment sur les ondes disent que le calme règne mais reconnaissent qu’il y a beaucoup de tentatives de départs en exil vers le Rwanda du côté de Kayanza, Ngozi et Kirundo. Les gouverneurs de province tranquillisent la population et appellent au calme.
Ce qu’il faut retenir de ce lundi, c’est que la tension monte vite et du côté des manifestants et du côté des forces de sécurité. Il faut se féliciter qu’il n’y ait pas eu de morts aujourd’hui! Mais si la situation s’enlice, les conséquences risquent d’être destrastreuses. C’est pourquoi l’arrivée de l’envoyé spécial de l’ONU dans la région des grands lacs est vécue comme une voie qui s’offre pour la suspension des manifestations. Qu’il s’agisse du régime ou des manifestants, les deux camps sont sur des positions extrêmes et il faut calmer les esprits afin de s’engager dans une logique de dialogue. Un autre choix?
Paul Sorongo