Lettre d’encouragement au Peuple Burundais, par Elie Hakizimana Chers compatriotes,

Le monde feint avoir perdu le nord dans la crise politique au Burundi. L’ONU, l’Union Européenne, l’Union Africaine et l’Amérique du Nord seraient incapables de tâter le pouls de notre mouvement populaire. Ils éviteraient de le regarder en face et se plaisent dans des déclarations de bonnes intentions qui devraient pourtant rimer avec nos choix démocratiques que nous avons exprimées à travers un suffrage.

N’en déplaise, nous avons exprimé notre ferme volonté d’évoluer sur la voie de la stabilité, de la paix et de la concorde. Ce choix est assorti d’un prix : nous sommes prêts à payer de notre propre personne, un gage ultime pour la protection de notre choix. Ceci devrait être assez pour signifier à quiconque serait tenté par la destruction, le vol et recel de notre liberté qu’ils en payeraient autant. Pour répéter à haute voix la phrase massue de notre génération, UWUZOTANGURA INTAMBARA IZOHERERA MU RUGO IWE. Ceci vaut bien sur le terrain et désormais va valoir plus que jamais dans les média. Réveillez-vous patriotes pour présenter des cartons rouges à ces menteurs invétérés qui envahissent les réseaux sociaux.

Chers compatriotes,

En même temps que nous faisons taire les menteurs, travaillons à relire, réécrire et corriger les textes qui nous régissent. C’est dans cette optique que les nouveaux élus devraient penser avec le reste d’entre nous à comment corriger les inégalités de chance que l’Accord d’Arusha a installé dans notre pays. Cet accord n’a pas le mérite d’un traité, il n’est pas intemporel et ne devrait pas être un contrepoids à la constitution de la République. Si cet accord était épuré et soumis au référendum, on pourrait peut-être le revêtir d’un caractère intemporel.

Une autre tâche difficile à laquelle vous, les nouveaux élus et le nouveau gouvernement devriez honorer votre pays avec consiste à mettre à démocratiser l’échelle salariale de la fonction publique. S’il n’y avait plus ni enfants choyés ni laissés pour comptes, les indignés se compteraient sur les doigts de la main et la satisfaction des fonctionnaires de l’état ferait votre fierté. Après s’être rallié tout le monde, l’élaboration et la mise en fonction des politiques de développement serait plus aisée.

Chers compatriotes,

Notre pays traverse un temps où certains d’entre nous travaillent à nous engouffrer encore une fois dans une guerre civile. Le manque de flexibilité affiché par les Eglises du Burundi a été marqué par une opposition inconstitutionnelle contre le choix du CNDD FDD et contre un citoyen légalement présidentiable.

Ajouté à l’arrogance de la société civile et de certains politiciens, ceci a chauffé le pays à blanc et a fini par tirer un coin de voile sur l’arrière-fond peint aux couleurs des germes de génocide. L’élément déclencheur aurait pu véritablement être le supplice du collier observé dans le quartier Nyakabiga. Mais la sagesse a su mettre un couvercle étanche sur cette provocation satanique. Aussitôt que le peuple a vu ce qui se tramait dans le motif de l’insurrection et compris par inférence que la contestation du troisième mandat n’était qu’une façade bien décorée dans la vitrine, nous avons immédiatement retiré notre support à ce conglomérat aux mauvaises intentions.

Comment se fait-il que des armes de tout genre se retrouvent dans une manifestation pacifique? Prenez n’importe quel pays développé, et je vous gage que la police de ce pays ne pourra pas faire aussi bien que la police du Burundi face à une bande comme on en a vu sur les images de Reuter et de France24. Alors, félicitations à nos forces de sécurité. C’est un honneur de vous voir vous acquitter de votre travail. Les mauvaises intentions disais-je donc, se sont poursuivi avec une tentative de putsch par ceux qu’on croyait être parmi les meilleurs généraux de notre force de défense et de sécurité !

Chers compatriotes,

Puis-je demander la participation de chacun d’entre nous car garder le cap sur la voie de la paix et de la concorde passe par l’identification et la neutralisation de ceux qui arborent fièrement l’uniforme du putsch manqué. Nous avons tous connu la guerre civile de près ou de loin et nous portons tous les séquelles de la mauvaise gestion du pays. Que cette lettre soit pour ceux qui veulent nous contraindre encore à la guerre un dernier appel au sursaut. Nous avons vomi le coup d’Etat, nous vomirons aussi la rébellion.

Cher compatriotes,

Pendant que nous raffermissons la paix et la concorde chez-nous, nous devons ouvertement dire au monde d’arrêter de faire amalgame de la crise politique au Burundi et le Rwanda de 1994. Nous devons expliquer au monde à l’unisson que la majorité longtemps réduit au silence et périodiquement conduite à l’abattoir a plutôt besoin d’une main d’œuvre pour développer le pays.

Nous devons en même temps accuser l’occident d’avoir regardé d’un air amusé pendant que des pans de population disparaissaient à vue d’œil. Notre objectif n’est pas d’humilier nos partenaires, mais de forcer la reconnaissance de notre indépendance et notre capacité à gérer honorablement des situations difficiles. Le monde semble ne pas comprendre que la majorité qui a connu le génocide sait bien détecter les signaux annonciateurs et est prête à balayer l’engouement sur la trajectoire de notre révolution.

Si l’occident a failli quand il fallait secourir le Rwanda, il n’est pas diplomatique de couper les aides au Burundi pour acheter le silence du Rwanda et financer l’insurrection armée chez-nous sous prétexte qu’ils y voient un génocide imminent. Il n’est pas diplomatique non plus de ne pas condamner putschistes et chefs de guerre déclarés et ceci donne l’impression que les criminels reçoivent le financement de certains parmi nos partenaires multilatéraux. Alors, pendant qu’on rira des généraux incompétents à la solde de l’occident qui ont ratés un coup d’Etat, on attendra de pied ferme cette rébellion qui viendrait laver la honte des mauvais perdants.

Chers compatriotes,

Ne soyez pas étonnés que nous nous retrouvions seuls face à notre histoire. De la même façon que les partenaires des régimes passés s‘amusaient à regarder les fosses communes se remplir rapidement, vous trouverez qu’aujourd’hui ils soutiennent déjà les marionnettes parmi nous pour faire déraper notre réconciliation. Et la cause serait que si la recherche de la vérité est menée à bon port, elle comportera des volets qui font la trouille à ces personnalités qui déjà nous font la guerre des tranchées pour que la vérité ne vît jamais le jour.

La vérité et la réconciliation est un jalon aussi important sur notre parcourt que les frontières qui délimitent notre chère patrie. Nous combattrons vigoureusement tous ceux qui se gargarisent fièrement de nous engouffrer dans une guerre que nous rejetons de tous notre cœur et dont le dessein est d’enterrer la vérité et asseoir l’esclavage que l’Eglise catholique prédisait dans une figure de style que nous mettons encore du temps à déchiffrer.

Chers compatriotes,

Nous n’avons qu’à mener nos projets sur la même lancée guidée par la sagesse, la détermination et la droiture. Le Bon Dieu ne manquera pas un seul instant à assurer notre protection. Que Dieu vous bénisse et bénisse notre beau pays.

Elie Hakizimana