RDC: Félix Tshisekedi joue avec le feu

Félix Tshisekedi a instruit le procureur général près la Cour de cassation de mener des investigations contre tous les corrompus qui ont été dénoncés au cours de ces élections sénatoriales mais aussi contre tous les corrupteurs.
Ces décisions ont été annoncées après la tenue d’une « réunion interinstitutionnelle » organisée en urgence à la cité de l’Union Africaine.

Cette décision surgit aussi après un communiqué du FCC, signé par son coordonateur, Néhémie Wilanya Wilondja, qui critiquait ouvertement l’attitude partisane de l’UDPS et s’étonnait des recours de cette formation contre le scrutin sénatorial. Le coordonateur du FCC donnait même une leçon de fair-play électoral à l’UDPS en lui rappelant que le FCC avait aussi dû accepter la défaite de son candidat à la présidentielle mais qu’il avait fait un travail sur lui-même pour parvenir à surmonter cette déception… Dans le même temps, Jean-Marc Kabund, le secrétaire général de l’UDPS, tout en annonçant des recours contre les élus provinciaux de son parti qui s’étaient laissés corrompre, présentait ses excuses au PPRD suite aux dégradations subies par les locaux du parti de l’ancien président lors du « passage » des combattants en colère.

Dans ces relations de plus en plus houleuses entre le clan Tshisekedi et celui de Kabila, Félix n’a pas joué l’apaisement institutionnel en acceptant le verdict des sénatoriales. Il a pris le risque, pour tenter d’apaiser la colère des siens, d’annuler l’installation des sénateurs qui venaient d’être élus.
Une démarche qui, si le FCC se montre intransigeant, peut coûter très cher à Félix Tshisekedi.

Pour les juristes que nous avons contactés, cette décision de suspendre l’installation des sénateurs est purement et simplement inconstitutionnelle. Un président, s’il veut prendre des mesures, doit se référer à l’article 69 de la Constitution qui lui permet, dans certaines conditions, de prendre des ordonnances qui doivent être contresignées par le Premier ministre. Le Premier ministre « sortant » est toujours en fonction mais Tshisekedi ne fait pas appelle à ses services.

Tshisekedi agit donc sans s’en référer à la Constitution. La preuve, par le fait que cette décision est issue d’une « réunion interinstitutionnelle ». Un organe qui n’a aucune existence légale. « Comme pouvoir, on a la présidence, le gouvernement, le parlement, les tribunaux, ce machin interinstitutionnel n’existe pas. S’il s’entête, Tshisekedi peut sauter. Ce qu’il fait est illégal. On est en pleine dérive dictatoriale », explique un de nos interlocuteurs.

Le président, pour faire plaisir à une poignée de ses candidats, prend un risque majeur. Evidemment, l’absence totale de sénateurs est patent, mais dans le meilleur des scénarios, sur base des élections provinciales, l’UDPS ne pouvait guère revediquer plus de 15 à 20 sièges maximum. Tshisekedi fait donc vaciller le son fauteuil présidentiel pour 15 à 20 individus. Qui plus est, il faudra encore démontrer la corruption. Enfin, ce sont des élus UDPS qu’il accuse d’avoir pactisé avec l’ennemi. Il prend donc le risque majeur pour faire tomber des têtes au sein même de son parti.

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Hubert Leclercq – La Libre