Moi, Paul Kagamé, j’ai arrêté le génocide, donc, j’ai tous les droits.

Ce qui se passe actuellement dans la région des grands lacs surtout entre le Burundi et le Rwanda, n’est pas à prendre comme un simple accrochage diplomatique. C’est plutôt plus grave que l’on le croit. Le Rwanda a élaboré depuis son plan contre le régime de Bujumbura bien longtemps avant ces histoires électorales de 2015. Seulement, le Rwanda n’attendait que ce moment propice pour montrer à Bujumbura son vrai visage ou ses canines.

Pour bien comprendre cette haine, il faut remonter en 1993. Avec la victoire de Melchior Ndadaye, premier président élu démocratiquement lors des élections libres de 1933, depuis que le Burundi existait, avec un score de 64% contre 33% du candidat Pierre Buyoya. Alors que le Front Patriotique Rwandais (FPR) étaient en pleine guerre avec le Président Rwandais Juvénal Habyarimana, la victoire de Ndadaye a était perçue comme une menace sérieuse au FPR ou disons une perte d’un allié stratégique qui était le régime de Buyoya Pierre et al. En plus que Melchior Ndadaye avait séjourné au Rwanda étant refugié, ce là rendait plus compliqué la tache du FPR, craignant le duo Habyalimana-Ndadaye. Dans ces années, le Burundi abritaient des milliers des refugiés rwandais membres fondateurs et sympathisants du FPR. Ce n’est pas pour rien qu’après l’annonce de la victoire de Ndadaye, tout le quartier de Ngagara est descendu dans la rue pour s’opposer aux résultats des urnes. Ce quartier où plus de 60 % des habitants étaient rwandais (même l’actuelle épouse du président rwandais Jeannette Kagamé a résidé dans ce quartier) qui était considéré comme le couger du FPR au Burundi, c’est donc compréhensible qu’ils aient pris le devant de la scène pour demander l’annulation de ces élections.

La suite tout le monde la connait. Ndadaye n’a pas dépassé trois mois au pouvoir. Il a été décapité de façon ignoble, ce qui plongeant le Burundi dans une crise sans précédent. De cette crise est né le mouvement armé CNDD-FDD, et dans l’entretemps le FPR s’est installé au pouvoir à Kigali. Dans son ambition de contrôler et piller les richesses de la République Démocratique du Congo, il s’est heurté aux combattants Intagoheka du CNDD-FDD qui eux aussi avaient leur base arrière en RD Congo. Les Intagoheka et les Inkotanyi (combattants du FPR) se sont farouchement battus, et dans beaucoup de batailles, les Inkotanyi ont été vaincus, et Paul Kagamé garde toujours en mémoire toutes les défaites qu’il a subies au Congo à cause de la combativité des Forces pour la Défense de la Démocratie (FDD). C’est pourquoi après l’accord global de cessez-le-feu entre le gouvernement de Buyoya et le mouvement CNDD FDD, le FPR a changé de plan, connaissant la détermination des FDD, il a opté pour une coopération avec le CNDD-FDD, non pas par amour, mais par stratégie d’infiltrer le cœur du système FDD et de le détruire au moment opportun.

Tout le monde sait que Paul Kagamé se définit comme le seul homme au monde à avoir stoppé le génocide. Il ne cesse de le répéter à toute personne et toute puissance et par fois il accuse qui il veut d’avoir participé au génocide ou de n’avoir pas assisté ou sauvé les tutsi en pleine extermination au Rwanda en 1994. Pour Kagamé, avoir arrêté le génocide lui donne tous les droits, tout le pouvoir même celui de donner la vie ou la mort, celui d’attaquer ou de perturber tous les pays de la région des grands lacs en fonction de ses besoins géostratégiques, celui de dénigrer et d’insulter qui il veut et quand il le veut, celui de faire trembler la France et la Belgique, celui d’imposer le mea culpa des puissances occidentales etc…

La complexité sinusoïdale des ambitions de Kagamé fait du Burundi son ennemi juré, malgré les apparences apaisantes. Tout commence avec la Tanzanie, quand elle a donné son point de vue par rapport à la sécurité dans la région. Pour la Tanzanie, chaque pays concerné, devrait s’ouvrir et entamer des négociations avec ses opposants armés ou non pour que la sous région ait la paix et la stabilité politique, économique et sociale. Le Rwanda a immédiatement haussé le ton accusant la Tanzanie d’être le porte-parole des FDLR. Ce qui a provoqué un climat de méfiance entre Kigali et Dar-es-Salaam.

Pour Paul Kagamé, le président Tanzanien Jakaya Kikweté avait franchi la ligne rouge, ce qui était inacceptable pour Kigali. Dans cette tension diplomatique, le Burundi a joué le neutre. Pour se venger, Kagamé a tenté de torpiller le fonctionnement de l’East African Community (EAC) qui regroupe le Burundi, le Rwanda, la Tanzanie, l’Ouganda et le Kenya. Fort de ses manigances, il a tout fait pour diviser la communauté EAC, en initiant des rencontres au nom de cette communauté, mais qui excluaient le Burundi et la Tanzanie. Kagamé est allé loin jusqu’à proposer que le siège de l’EAC soit transféré ailleurs qu’en Tanzanie. Ce n’est pas pour rien que l’actuel secrétaire de cette communauté EAC est Rwandais, il roule et fonctionne selon les désirs de son chef Paul Kagamé.

En plus de cette prise de position de la Tanzanie, il faut noter que la présence des militaires tanzaniens en renfort aux soldats de la Monuc dans l’Est de la RD Congo, n’a pas été appréciée par Kigali qui via le M23 continuait son plan de déstabilisation et de pillage de la RD Congo. En même temps, la présence des militaires Burundais sur le sol Congolais dans le cadre des patrouilles mixtes avec les militaires congolais dérangeait tellement le pouvoir de Kagamé de tel point que ce dernier a piqué une colère multidimensionnelle en vers le régime de Bujumbura. Dans ces conditions, il fallait faire tout le possible pour que cette coopération militaire entre le Burundi et la RD Congo cesse.

C’est pourquoi, sous les lobbies de Kigali, une campagne dite Kiliba ondes a été bien orchestrée via des medias privés burundais et de certaines personnes de la société civile burundaise, que des milices Imbonerakure sont en formation au Congo pour préparer le génocide contre les Tutsi au Burundi, que des hauts gradés de l’armée Burundaise sont de connivence avec le FDLR dans le trafic des minerais congolais. Cette campagne a été bien menée quitte à ce que les lobbies de Kigali pénètrent dans le système du Bureau des Nations Unies au Burundi (BNUB) qui par un câble diplomatique envoyé au siège de l’ONU à New-York confirmait bien ces allégations sans fondements. Et Le Burundi a dû retirer ces militaires de la RDC malgré que le Gouvernement congolais ne fût pas contre cette présence sur son sol.

Pour renchérir son plan et montrer que le Burundi est en action dans les massacres, des cadavres venant du Rwanda ont été jeté dans le Lac Rweru au nord du Burundi à la frontière avec le Rwanda. Kigali a nié que ces corps proviennent du Rwanda, de même le Burundi a démontré que ces corps sont probablement d’origine Rwandaise. Pour savoir la vérité, le dossier a été transféré à la communauté EAC, quelques jours plus tard, le dossier était porté disparu des tiroirs de l’EAC. Les services rwandais sont parvenus à étouffer cette affaire. Le Rwanda ne s’attendait pas à ce que le Burundi réagisse de façon intelligente pour démasquer l’origine de ces cadavres.

Entretemps, signalons que le Rwanda avait élaboré une liste de ce qu’il a appelé des génocidaires burundais qui ont vécu au Rwanda. Parmi lesquels se trouvent Domitien Ndayizeye et autres. Dans la stratégie de Kigali, il t’accuse de génocidaire pour que tu te rendes, pour que tu te soumettes à ces exigences et pour que tu acceptes d’être son homme et travailler pour lui jusqu’à ce que ta mort te sépare de lui. Telle est donc la stratégie de Kigali, applicable aussi bien aux Rwandais qu’aux Burundais qui ont accepté de travailler avec Kagamé dans ses ambitions de torpiller le régime de Bujumbura. C’est dans cette logique bien évidemment que Kigali prépare son Terminator revanche sur le système CNDD-FDD, il profite de la naïveté et de l’appui de certains burundais, il profite aussi de l’incompréhension de certaines puissances occidentales sur le Burundi, pour mettre le Burundi sur les rails de l’instabilité. Kigali a essayé le même plan avec la Tanzanie de Jakaya Kikweté, mais la Grande Bretagne puissance coloniale de la Tanzanie et première bailleur du Rwanda s’en est mise et a joué un rôle important pour désamorcer la crise bien que ce n’est pas fini.

Au moment où la Grande Bretagne fait tout pour que son ancienne colonie ne sombre pas sous les ambitions du Rwanda, la Belgique quant à elle semble lâcher le Burundi, elle ne se pose même pas la question de savoir si réellement la population burundaise dans sa majorité croit en Pierre Nkurunziza, elle ne se pose même pas la question si réellement Nkurunziza a violé la constitution, elle ne se pose pas la question de savoir pourquoi le Rwanda se mêle de la politique burundaise, elle est là pour enfoncer les clous, elle là pour aider à la destruction du Burundi. C’est dommage !!

De toute façon, c’est bien visible que le Rwanda, aidé par certains services des USA, utilise l’EAC pour torpiller le Burundi, c’est bien visible que le Rwanda abrite les putschistes burundais, il est bien clair que le Rwanda veut provoquer la crise au Burundi, mais va-t-il réussir ? Bonne question !! Quoi qu’il arrive l’histoire nous montre que le peuple burundais peut s’enfoncer et peut aussi se relever à lui seul. Les régimes Michel Micombero, Jean Baptiste Bagaza et Pierre Buyoya, aidés par les rwandais refugiés au Burundi ont massacré des centaines de milliers des burundais dans un silence complice de la communauté internationale ce qui a donné naissance au mouvement PALIPEHUTU et autres qui ont mené une campagne de libération du peuple burundais, ils ont traqué tout membre de ce mouvement, ce qui a donné naissance au parti Sahwanya FRODEBU avec son chef charismatique Monsieur Melchior Ndadaye, ils l’ont assassiné ce qui a donné naissance au mouvement Conseil National pour la Défense de la Démocratie- Force pour la Défense de la Démocratie CNDD-FDD. Ceci pour dire que le peuple burundais est prêt à se défendre et à défendre ses acquis de paix et de démocratie. Que Kigali ne se fasse pas des illusions qu’il va marcher sur Bujumbura comme il a marché sur Goma.

Bacinoni Roberto