Infiltrations de rebelles burundais en RDC: ce que disent les services

Des informations faisant état d’infiltrations de rebelles burundais sur le sol congolais inquiètent les services de sécurité de la RDC. Dans le territoire d’Uvira, l’armée et les autorités locales ont multiplié les opérations de sensibilisation auprès de la population pour signaler la présence de ces infiltrés. Il s’agit de quelques 70 km à surveiller. Une présence d’autant plus compliquée qu’il y a des groupes anciens, mais aussi des groupes nés depuis le début de la crise au Burundi. Les services de sécurité congolais disent avoir intercepté 36 de ces nouveaux rebelles burundais. Et sur la base des informations recueillies auprès des prisonniers, ils disent aujourd’hui avoir une bonne vue de ce phénomène d’infiltrations et, par extension, des nouveaux groupes rebelles burundais.

La première arrestation remonte au 28 août dernier, avec l’interpellation de quatre individus suspects dans un quartier d’Uvira. Les services de sécurité congolais ont la surprise de découvrir des cartes d’électeurs congolaises flambant neuves, qui auraient été volées par le M23 au Nord Kivu et seraient aujourd’hui distribuées au Rwanda sur de présumés infiltrés burundais qui « ne savent même pas dire bonjour en swahili », dit-on.

Ils alertent notamment les postes frontières, ce qui leur permet de nouveaux coups de filet début septembre. 24 individus dont 6 mineurs, la plupart originaires de Kirundo qui sont passés, disent les services congolais, par les camps de réfugiés de Gashora ou de Mahama avant d’être envoyés dans deux camps d’entrainement au Rwanda, Nyungwe et Higitumu. Deux camps que les services congolais disent être capables de localiser sur une carte.

Tous disent, selon les autorités congolaises, avoir été pris en photo et qu’on leur aurait remis avant leur départ ces fameuses cartes d’électeurs, ainsi que 25 000 francs burundais et 3 500 francs congolais. Ensuite par petits groupes, ces prisonniers auraient affirmé qu’ils étaient plusieurs centaines à avoir été formés et qu’ils étaient convoyés vers la rivière de Rusizi pour traverser au Congo.

Trois autres individus ont été arrêtés dans la région de Mutarule où ils se faisaient passer pour des éleveurs et auraient assuré que d’autres infiltrés burundais se dissimulent ainsi au sein des communautés barundi et banyamulenge.

L’ombre du M23

Deuxième coup de filet significatif, disent les services congolais. Six éléments ont été arrêtés fin septembre, dont trois formellement identifiés comme M23, parmi lesquels le capitaine de nationalité burundaise Aldabert Rugamba, qui aurait notamment travaillé par le passé pour le chef d’état-major du M23, Sultani Makenga.

L’ex-capitaine de l’armée burundaise, Claude Arakaza, aurait, quant à lui, été arrêté dans le camp de réfugiés de Lusenda où, avec trois autres personnes, il tentait de recruter. Il aurait dit avoir traversé au Congo après le putsch manqué avec le colonel Jean-Marie Ntirampemba et une centaine d’éléments.

Beaucoup de ces infiltrés auraient déclaré travailler pour le compte d’Alexis Sinduhije, le président du parti d’opposition MSD et du général putschiste Godefroid Niyombare. Les services congolais pensent également qu’il existe un autre groupe, l’Union des forces patriotiques révolutionnaires, actif dans la forêt de la Kibira au Burundi. Avec notamment l’arrestation sur leur sol du colonel Emmanuel Maniriho. Ce dernier aurait impliqué un autre opposant burundais, Jean Minani, comme fondateur. Même s’il s’est mis en retrait, il serait toujours en contact, aurait affirmé ce déserteur de l’armée burundaise.

L’implication du Rwanda

Selon les services de sécurité congolais, il ne fait aucun doute que le Rwanda est impliqué dans la création de ces nouveaux groupes rebelles burundais. Outre le lien avec le M23, le passage dans des camps de réfugiés ou même d’entrainement au Rwanda, il existe, toujours selon ces services, d’autres éléments concordants.

Le réseau d’infiltration au Congo aurait lui été mis sur pied par les services de renseignements militaires rwandais, les DMI, mais si d’autres officiers rwandais de l’armée et de la police auraient été cités par les prisonniers. Ce serait également l’armée rwandaise qui serait, selon les services congolais, impliquée dans le convoyage de ces infiltrés vers la frontière jusqu’à la rivière de la Rusizi.

Le dernier élément qui, selon ces services, irait dans le sens de l’implication du Rwanda, est la participation jusqu’à sa mort du chef de milice congolais, Bede Rusagara, dans l’infiltration de ces éléments burundais au Congo. Ses liens avec Kigali remonteraient au temps du RCD, auraient été attestés par le passé par le groupe d’experts des Nations unies. Le chef de milice congolais Bede Rusagara a été tué au cours d’un accrochage avec des militaires venus l’arrêter dans un quartier d’Uvira le 29 septembre dernier.