Le Président de la République, feu Melchior NDADAYE
Premier Président démocratiquement élu
La commémoration de ce 21 octobre 2020 nous donne l’occasion de faire le point sur l’assassinat du Héros national, S.E. le Président de la République, Melchior NDADAYE, Premier Président démocratiquement élu depuis que le Burundi existe.
LES ASSASSINS
La Cour Suprême a condamné, ce 19 mars 2020, les assassins de S.E. Melchior NDADAYE. Ces assassins agissaient sous le commandement du Président Major Pierre BUYOYA, l’ancien Dictateur HIMA du BURUNDI. Il s’agit de 19 coupables comprenant les officiers des anciennes Forces Armées du Burundi (FAB) et des anciens dirigeants du parti UPRONA.
Elle a condamné « à une peine de servitude pénale à perpétuité chacun » les 10 coupables suivants :
L’ancien Président du Burundi, le Major BUYOYA Pierre, le Général de Brigade NDAYISABA Célestin, GUNUNGU Gabriel, NIYONKURU Laurent, NAHIGOMBEYE Anicet, NZOSABA Juvénal, SINARINZI Mamert, NKURUNZIZA Alfred, DARADANGWA Jean Bosco et CISHAHAYO Gérard.
A ceux-ci, s’ajoute les 6 civils suivants condamnés à la même peine :
L’ancien Vice-Président KADEGE Marie Alphonse, M.SIMBANDUKU Pascal, M. RUKINGAMA Luc, M. BARARUNYERETSE Libère, M. MUKASI Charles et M.GIRUKWIGOMBA Astère.
En outre, la Cour Suprême a condamné « à une peine de servitude pénale de vingt ans chacun » les 3 coupables suivants : M. BUSOKOZA Bernard, le Colonel NIYUNGEKO Vincent et le Commissaire de police MUSHWABURE Ildephonse. Quant l’ancien Premier Ministre M. NDUWAYO Antoine, la Cour Suprême l’a acquitté.
Notons que cinq parmi les condamnés sont au Burundi à savoir :« le Général de Brigade NDAYISABA Célestin, le Colonel GUNUNGU Gabriel, le Colonel NIYONKURU Laurent, le Colonel NAHIGOMBEYE Anicet et le Commissaire de Police MUSHWABURE Ildephonse». Les autres coupables n’avaient pas comparus au procès du 19 mars 2020 car ils étaient en cavale à l’étranger, notamment, l’ancien Président, le Major Pierre BUYOYA.
Sur demande de la partie civile, la Cour Suprême a condamné tous les coupables « à payer, in solidum, à l’Etat du Burundi un montant de 102 931 727 500 Fbu soit ( 52 894 140 USD ) à titre de dédommagement matériel et morale ».
En fin de compte la Cour Suprême a ajouté que « ce montant sera majoré des intérêts judiciaires de 6% l’an depuis l’assignation jusqu’au payement parfait volontaire ou forcé ». La Cour Suprême de poursuivre qu’elle les « condamne à payer au Trésor public un droit proportionnel de 4% de ce montant et met les frais de justice à charge des condamnés ».
La condamnation de ces assassins constitue un pas de géant vers la concorde entre Burundais. Elle rappelle la prouesse du Roi NTARE I RUSHATSI CAMBARANTAMA quand il a neutralisé le Hima RUHINDA qui avait massacré beaucoup de Burundais en 1420.
BIOGRAPHIE DE NDADAYE, Héros de la Démocratie
Fils de Pie NDADAYE et de Thérèse BANDUSHUBWENGE, NDADAYE Melchior est né le 28 mars 1953 sur la colline Murama, dans la commune Nyabihanga, province Mwaro. Il était l’aîné de dix enfants.
De 1959 à 1966, il a fréquenté l’école primaire à Nyabihanga.
De 1966 à 1972, il a poursuivi son cursus scolaire à l’École Normale de Gitega. Il a dû interrompre ses études à la suite du génocide contre les Hutus en 1972. Il s’est réfugié au Rwanda où il a parachevé ses études secondaires à Rilima.
En 1975, il entra à l’Université Nationale de Butare, Rwanda, Faculté des Sciences de l’Éducation qu’il termina avec brio.
De 1987 à 1992, il a suivi une formation bancaire à l’Institut des Techniques de Banque du Conservatoire National des Arts et Métiers, en France.
Sur le plan politique, NDADAYE Melchior fut le principal initiateur de BAMPERE (Ba=Barundi, M=Mouvement, P=Progressiste, E=Etudiant, R=Rwanda), Mouvement des Étudiants Progressistes Barundi au Rwanda. En effet, NDADAYE Melchior et BACINONI Daniel, encore étudiants à Butare en 1975, ont pris l’initiative de contacter Jérôme NDIHO, alors journaliste, membre du Mouvement des Etudiants Progressistes Barundi en Belgique (MEPROBA), qui était de passage à Butare. Lors de ce passage, ils l’ont rencontré là où il logeait chez Cyprien SINZOBAHAMVYA, ancien membre du MEPROBA et Professeur d’Economie à l’Université de Butare. Ils voulaient en savoir plus sur le MEPROBA, d’autant plus qu’ils lisaient régulièrement les publications de ce mouvement. Au terme d’un échange d’idées qui a duré toute l’après-midi, Jérôme NDIHO leur proposa de créer une section du MEPROBA au Rwanda comme il en existait en Belgique, en Union Soviétique (Russie), Allemagne, Italie, Tanzanie (Dar Es Salam, Mwanza, Moshi) et en RDCongo (Lubumbashi et Kisangani). NDADAYE Melchior et BACINONI Daniel ont accepté. Ce fut le point de départ de la création d’un mouvement clandestin, BAMPERE.
Une fois de retour en Belgique, Jérôme NDIHO fut désavoué par le Comité Central du MEPROBA. Ce fut le début de malaise entre ce comité central et le BAMPERE en gestation.
Du côté de NDADAYE Melchior et de BACINONI Daniel, le projet BAMPERE prospéra : il eut beaucoup de succès auprès des étudiants burundais (réfugiés) à l’Université de Butare.
Le 3 janvier 1976 marqua la date officielle de création de BAMPERE. Melchior NDADAYE en était membre dirigeant jusqu’en 1979. En 1978, BAMPERE, NDADAYE en tête, prit nettement ses distances par rapport au Comité Central du MEPROBA qui tentait d’assujettir BAMPERE alors que ce comité était réticent à l’idée de créer le parti UBU (Umugambwe w’abakozi b’Uburundi : le parti des Travailleurs du Burundi) préconisé par BAMPERE, les Cellules des Progressistes Burundais au Rwanda (CPBR) et la majeure partie du MEPROBA. Le CPBR était une organisation politique burundaise qui rassemblait les progressistes non étudiants au Rwanda. Notons que BAMPERE était encadré par le Docteur Isidore NKUNZUMWAMI, un ancien du MEPROBA qui était devenu membre de CPBR comme en était SINZOBAHAMVYA Cyprien.
Au début de 1979, CPBR et BAMPERE ont lancé un appel pour la création de l’UBU. Toutes les sections du MEPROBA ont soutenu CPBR et BAMPERE excepté une petite minorité du MEPROBA groupée autour du Comité Central du MEPROBA. Le parti UBU fut ainsi créé en août 1979. NDADAYE Melchior en était membre du Bureau Politique, chargé de l’Information.
Notons que, les trois présidents du parti UBU qui se sont succédés, sont, par ordre chronologique, SINDIHEBURA Vénérant, BUYAGU Salvator et NTIBATINGESO Sévérin tous anciens du MEPROBA et du CPBR. Quant aux anciens présidents de la République, NDADAYE Melchior, Cyprien NTARYAMIRA et Sylvestre NTIBANTUNGANYA, ils furent tous membres du parti UBU après avoir été membres de BAMPERE. Tous les membres de l’UBU avaient l’obligation de militer dans la clandestinité sauf Jérôme NDIHO qui exerçait le mandat de Représentant de l’UBU partout où il pouvait arriver sur la planète.
Le 5 septembre 1983, NDADAYE Melchior quitta le Rwanda pour continuer la lutte clandestine au Burundi, d’abord dans le cadre de l’UBU puis au sein du FROLIDE qu’il a fondé à Gitega dans la clandestinité et qu’il a transformé en parti FRODEBU (Front pour la Démocratie au Burundi) en 1986. Le FRODEBU fut agréée en février 1991 et sortit de la clandestinité.
En plus des activités politiques ci-dessus, NDADAYE travailla au Centre Neurologique et Psychiatrique de Kamenge, Bujumbura. Il travailla ensuite comme cadre à la banque Meridian Bank.
Le 22 octobre 1988, NDADAYE Melchior fut arrêté puis jeté en prison à Rumonge par le Président Major BUYOYA pour avoir expliqué à sa manière la meilleure solution de sortir de la crise de Ntega et Marangara causée par cet ancien Président qui venait de se rendre coupable du massacre de plus de 50 000 citoyens, en utilisant le napalm notamment. En sa qualité de Premier Secrétaire de l’Union des Travailleurs du Burundi (UTB) dans la province de Gitega, NDADAYE Melchior avait exprimé, la veille, sa position à l’occasion d’une réunion de « pacification » organisée par le Gouverneur de Gitega à l’intention des fonctionnaires de cette province. Sa captivité dura trois mois.
Elu candidat du FRODEBU à l’élection présidentielle lors du Congrès Extraordinaire du 18 avril 1993, NDADAYE Melchior gagna les élections au premier tour le 1er juin 1993 avec 64,79 % des suffrages.
Trois mois plus tard, le 21 octobre 1993, le Premier Président de la République démocratiquement élu au Burundi, Son Excellence feu NDADAYE Melchior, fut assassiné à Bujumbura par les criminels cités plus haut comprenant, disions-nous, les officiers des anciennes Forces Armées du Burundi (FAB) et les anciens dirigeants du parti UPRONA, sous le commandement du Président Major BUYOYA signalé plus haut.
Cet assassinat déclencha une décennie de GUERRE CIVILE au BURUNDI.
Héros de la Démocratie
Sur proposition du Gouvernement du Burundi dirigé par le Président de la République, feu Pierre NKURUNZIZA, le Parlement du Burundi décerna au Premier Président démocratiquement élu, feu NDADAYE Melchior, le titre posthume de HEROS NATIONAL DE LA DEMOCRATIE.
Le 1er juillet 2019, le Président de la République, feu Pierre NKURUNZIZA, baptisa l’Aéroport Internationale du Burundi du nom de NDADAYE Melchior. Il fit de même pour un des plus grands boulevards de Bujumbura.