L’interview par Jeune Afrique annoncée avec fanfare par TV 5 de l’ex-Chef d’État Major et putschiste Godefroid Niyombare n’annonce finalement rien de nouveau. A
Les communicants de l’opposition jubilaient. Enfin, Niyombare allait parler! Bujumbura allait savoir que le Général n’est pas si déchu que ça, que la flamme du 13 mai 2015 était encore allumée. Les supporters de Bujumbura, dont certains croyaient que l’ancien patron du SNR n’est plus, attendaient de découvrir ses propos pour se convaincre que le frondeur en treillis de Kamenge était encore bien vivant.
TV 5 est d’abord entré dans la danse, avec des gros plans d’images prises en 2015 lors de la tentative du putsch du 13 mai. Le conducteur de la fameuse interview expliquait que si Niyombare parlait enfin, c’était pour expliquer les motivations de son action deux ans plus tôt. Les premières critiques tombaient: pour vraiment prouver que le Général était encore en vie, il aurait fallu publier des images fraîches. Les fans du Cndd-Fdd criaient deja au “fake news”.
Ensuite, l’interview elle-même a atterri sur le WhatsApp burundais, samedi soir.
En lisant les quatre pages, l’impression générale est que l’affaire de cette interview réalisée par téléphone est en réalité un coup de com plus qu’autre chose. Ainsi, Godefroid Niyombare, présenté comme la tête pensante du putsch, se montre d’une curieuse imprécision en affirmant que Nkurunziza a pris l’avion pour Dar-es-Salaam le 12 mai… Est-ce lui vraiment l’auteur des propos rapportés dans ce texte ?
Ensuite, il y a l’insistance avec laquelle le Rwanda est présenté comme totalement neutre dans ces débuts de la crise burundaise. Godefroid Niyombare martèle: “Kigali n’est jamais intervenu … Le Rwanda n’a jamais été une option pour moi … Je n’ai jamais été en contact avec les Rwandais … “
Pour ceux qui doutent que Niyombare serait au Rwanda, allez voir ailleurs ! Puisque le Général déchu insiste: “En 10 ans de maquis, j’ai noué beaucoup de relations, notamment avec les Maï-Maï … En mai 2015, je suis parvenu à m’enfuir en traversant le lac Tanganyika”.
D’ailleurs, les mouvements de l’ancien Chef d’État-major se passent entre la RDC et le Burundi. Et il utilise deux numéros de communication: un belge ou un mozambicain. Au Burundi, “je peux y entrer et sortir à ma guise”, insiste Niyombare qui se dit à la tête de la rébellion Forebu. Un rebelle très à l’aise donc, avec “des sympathisants dans l’armée burundaise“.
Cette interview aurait pu faire sourire si on oublie que Jeune Afrique entretient de très bonnes relations avec Kigali via François Soudan, son Directeur des publications. Ce dernier est notamment l’auteur d’une biographie élogieuse intitulée “L’homme de fer, conversations avec Paul Kagamé, président du Rwanda”. Par ailleurs, le milieu journalistique évoque souvent le contrat de communication entre l’hebdomadaire basé à Paris et le pouvoir rwandais.
Quant à la position et aux soutiens de Niyombare, à Bujumbura on sourit. “Il nous manque peut-être ses photos cette semaine, mais la maison dans laquelle il vit à Kigali est connue. Son sort s’apparente à celui de Nkunda”, explique un haut-gradé de la police burundaise.
by Adelin Manariyo, http://www.ikiriho.org