Dans un récent rapport, la Commission nationale rwandaise des droits de l’homme accusait l’ONG américaine d’avoir menti sur les exécutions extra-judiciaires et d’avoir présenté comme assassinées des personnes toujours vivantes. Human Rights Watch maintient ses accusations, soupçonnant les autorités rwandaises d’avoir fait pression sur les familles.
Le bras de fer entre le Rwanda et Human Rights Watch (HRW) continue. Après avoir été accusée par Kigali d’avoir délibérément menti dans un rapport sur les exécutions extra-judiciaires dans le pays, l’ONG de défense des droits de l’homme persiste et signe.
HRW accuse les autorités rwandaises de chercher à « nier les meurtres » et d’avoir fait pression sur les familles des victimes. Selon les auteurs du rapport initial de HRW, ces dernières auraient été exécutées sommairement par les forces de sécurité.
Rapports, contre-expertises et contre-contre-enquêtes
Diffusé le 13 juillet dernier, le rapport « Tous les voleurs doivent mourir » recensait 37 cas d’exécutions extra-judiciaires, visant essentiellement des petits délinquants, commises par la police et les forces de sécurité. Mais le 9 octobre, la Commission nationale rwandaise des droits de l’homme (NCHR) publiait un rapport en forme de contre-enquête. Selon la Commission rwandaise, sur les 37 personnes que l’ONG présente comme ayant été abattues par les forces de l’ordre, sept sont en réalité toujours vivantes, quatre seraient décédées de mort naturelle, et six autres dans des accidents.
Côté rwandais, la cause est entendue : Human Rights Watch ment. Faux, répond l’ONG, qui se livre à son tour à une contre-expertise de la contre-enquête de la NCHR, citant quelques cas emblématiques dont celui d’Elias Habyarimana, dont l’ONG affirme qu’il a été tué en mars.
« La NCHR a mis en avant une femme nommée Pelagie Nikuze qui a déclaré qu’Habyarimana est son mari et qu’il vit en Belgique », écrit HRW. Or l’ONG indique avoir « découvert que l’homme qui se trouve en Belgique est en fait une autre personne. L’homme tué en mars était un pêcheur qui n’avait jamais eu de passeport ».
HRW relève par ailleurs des « incohérences » dans les cas documentés par la Commission rwandaise, comme celui d’Alphonse Majyambere. Lors de sa conférence de presse, le 13 octobre, la NCHR a en effet présenté un homme portant ce nom, qui avait 64 ans selon sa carte d’identité. Mais le Alphonse Majyambere dont HRW a documenté l’exécution sommaire était, lui, né en 1981, soit âgé d’environ 35 ans au moment de son décès présumé.
(Jeune Afrique 03/11/17)