Homélie pour la commémoration du 29ème anniversaire de la mort de son Excellence le Président Melchior NDADAYE.

Chers frères et sœurs,

Nous avons lu un texte du prophète Jérémie : une parole forte adressée aux enfants d’Israël. C’était au temps de l’exil à Babylone. 

Les gens s’impatientent, se désespèrent. Alors Dieu envoie son prophète pour leur dire : « Calmez-vous !». 

C’est un très beau texte, animé d’espérance !

Bâtissez des maisons et habitez-les, plantez des jardins et mangez de leurs fruits.

Prenez des femmes et engendrez des fils et des filles, prenez des femmes pour vos fils ; donnez vos filles en mariage, et qu’elles enfantent des fils et des filles ; multipliez-vous là-bas, et ne diminuez pas !

Qu’on ne vous égare pas. Le jour viendra, et il est déjà fixé, dans 70 ans ! Le Seigneur vous libérera et vous ramènera dans votre pays.

Chers frères et sœurs,

Si un jour vous avez connu l’exil, ces paroles vous vont droit au cœur ! Le jeune Melchior NDADAYE avait passé les meilleures années de sa jeunesse en terre d’exil. C’est là que je l’ai connu et qu’on est devenu des amis très proches. Etudiant doué et de compagnie très agréable, il avait ceci de particulier : au lieu de passer ses heures libres au bar, ou à traîner au centre sportif, il avait une passion toute spéciale :  trouver le moyen de préparer le retour des réfugiés burundais. 

Et pour ce faire, il fallait changer le système politique qui poussait les gens à la mort ou à l’exil. Il a beaucoup lu.  A 23 ans, il avait tout lu du Capital de Karl Marx, alors que moi je n’en avais lu que quelques brèves synthèses ! Il a beaucoup lu, beaucoup écouté, beaucoup cherché.

Il a réuni des cercles de réflexion, des groupes de travail : un meneur d’hommes, un rassembleur.

 

Chers frères et sœurs, 

Pour le retour des enfants d’Israël, le Seigneur choisit le roi Cyrus. Cyrus le Grand, le roi des rois, a réussi à unir les Perses et Mèdes et va conquérir un immense empire qui s’étend sur la Grèce, sur l’Egypte, et sur tout le Moyen-Orient, l’empire des Achéménides. 

C’est lui qui va décréter que les enfants d’Israël rentrent chez eux.

Il donna l’ordre à tous les chefs des nations de faciliter le retour des anciens déportés. Le roi Cyrus est décrit par la bible comme l’envoyé de Dieu qui sauva Israël !

 

Pour le million d’exilés Burundais, dispersés au Congo, au Rwanda, en Tanzanie et même en Europe, le président NDADAYE fut l’homme providentiel comme le roi Cyrus. Par lui, le Seigneur ramenait son peuple de l’exil !

J’ai célébré une messe à Kigali. Tous les Burundais voulaient rentrer. On abandonnait son poste de travail, on vendait tout et on pliait bagages. Impressionnant ! Du jamais vu ! 

La victoire du Président NDADAYE ouvrait au peuple Burundais une ère nouvelle où l’on osait espérer la sécurité pour tous, la paix tant désirée… On vit des gens pleurer de bonheur, s’embrasser et festoyer comme les Troyens quand les armées grecques avaient levé le siège de leur cité. Un siège qui avait duré dix ans et pendant lequel de vaillants combattants étaient tombés au champ d’honneur. Les Burundais comme les Troyens, aveuglés par un injuste destin, ignoraient que leur joie serait sans lendemain !

La guerre reprit et la cité de Troie fut détruite. Au Burundi, le lâche assassinat du président NDADAYE fut vécu comme le pire des cauchemars, l’ultime offense d’une nation déjà à bout de patience. Tuer un dirigeant qui venait d’être plébiscité et qui représentait l’espoir et la paix, quel gâchis !

Le président NDADAYE manquera toujours aux Burundais épris de paix, lassés des crises à répétition que connaît le pays.

Car cet homme avait quelque chose de spécial. Comme cet enfant de Zacharie dont l’évangile de Matthieu nous parle.

« Toi aussi, petit enfant, tu seras appelé prophète du Très-Haut » …. 

Dieu t’a envoyé pour illuminer ceux qui habitent les ténèbres et l’ombre de la mort, pour conduire leurs pas au chemin de la paix.  

 

Chers frères et sœurs,

 

L’image que nous garderons du Président NDADAYE est justement celle d’un homme qui a suscité un immense espoir chez ce peuple burundais assoiffé de justice et de paix. Sa figure reste non seulement celle d’un héros, – les héros sont trop haut, inaccessibles -, mais également celle d’un modèle, – les modèles nous sont proches, ils sont dans nos familles -, un modèle pour un Burundi nouveau.

Laissez-vous inspirer par la vie du Président NDADAYE. Bâtissez des maisons et habitez-les, plantez des jardins et mangez de leurs fruits.

Construisez la paix et la prospérité !

 

Abbé Daniel Nahimana

Bruxelles, le 21 octobre 2022