« Nous voudrions porter à la connaissance des Inyankamugayo et les amis du parti Cnl, que les congrès ordinaire et extraordinaire organisés par le président du parti Cnl n’ont pas respectés les statuts et le règlement d’ordre intérieur du parti Cnl. D’où les résultats issus desdits congrès sont nuls et sans effet », lit-on dans ce communiqué signé par Nestor Girukwishaka au nom d’un groupe qui se dit soucieux de respecter les statuts et le règlement intérieur du parti CNL.
Ce haut cadre du parti Cnl, récemment écarté du bureau politique, fait savoir que le Cnl vit un moment exceptionnel. Selon lui, un climat de méfiance se manifeste au sein du bureau politique où les membres se regardent en chiens de faïence depuis six mois.
D’après lui, tous les efforts de réconciliation ont été émaillés d’hypocrisie, de tromperie, la déclaration solennelle du président et du secrétaire général du parti affirmant « que tout est rentré dans l’ordre. »
Par ailleurs, Nestor Girukwishaka évoque un montage orchestré envers certains membres du bureau politique. Il indique que ces derniers n’ont pas été informés ni associés dans l’organisation desdits congrès.
« Au moment où le différend qui opposait les membres du bureau politique avait été vidé, aucun motif ne peut justifier la mise en place d’un groupe qui a gardé au secret l’organisation d’un événement prévu par la loi », fait-il observer. Avant de conclure : « La préparation et l’organisation des deux congrès ont violé la loi sans oublier d’autres manquements qui se sont manifestés ».
Plusieurs dispositions violées
M. Girukwisha énumère plusieurs articles des statuts et du règlement d’ordre intérieur du parti qui ont été violés avant et pendant la tenue des deux congrès.
D’une part, il cite l’article 41 des statuts du parti qui précise que c’est le bureau politique du parti qui prépare l’ordre du jour du congrès en respectant les idées émises par les organes régionaux et d’autres organes du parti.
L’article 52 stipule par ailleurs qu’avant d’organiser un congrès, les bureaux régionaux tiennent des réunions pour collecter les idées dans leur ressort. « Cette activité n’a pas eu lieu parce que le bureau politique n’a pas eu connaissance ou analysé un rapport sur cette activité », martèle-t-il.
Ce cadre du principal parti de l’opposition rappelle que l’article 32, aliéna 6 confère au bureau politique les compétences d’organiser un congrès, il fait observer que les membres du bureau politique ne se sont jamais entendus sur la nécessité de la tenue d’un congrès extraordinaire étant donné la persistance d’un climat malsain au sein des organes dirigeants et des militants.
« Dans une réunion tenue le 24 février, les membres du bureau politique se sont convenus de surseoir sur la tenue du congrès pour que l’activité de réconciliation qui avait été amorcée puisse continuer jusqu’à atteindre un point satisfaisant afin d’organiser le congrès dans un climat apaisé »
Dans le communiqué, Nestor Girukwishaka évoque aussi l’article 51, alinéa 1 et 2 du statut du parti qui montre que le congrès analyse et entérine l’ordre du jour donné par le bureau politique du parti. Selon lui, la réunion pour préparer l’ordre du jour et pour proposer des amendements n’a pas eu lieu.
Le règlement d’ordre intérieur n’a pas été respecté
Le congrès du 12 mars a formulé des amendements sur le règlement d’ordre intérieur du parti autorisant le président du parti de restructurer les organes du parti.
-Cela viole l’article 43 du règlement d’ordre intérieur du parti du 14/2/2019 qui stipule que le mandat des membres du bureau politique est de 5 ans.
-Le président du parti n’a pas les prérogatives de limoger ceux qui ont le même mandat que lui sans qu’ils aient commis aucune faute conformément à l’article 68 des statuts du parti.
-L’article 65 a été violé. Ce dernier dispose que les statuts et le règlement d’ordre intérieur du parti peuvent être modifiés sur demande des 4/5 des membres du bureau politique et entérinés par le congrès.
-La réunion visant à analyser les modifications à apporter sur ces statuts n’a pas eu lieu, encore moins il n’y a pas de rapport montrant les dispositions auxquelles on s’est convenu à modifier.
-Les membres du bureau politique ont vu les amendements le jour même du congrès. Ce qui signifie que ce qui a été décidé à l’issue du congrès du 12 /3/2023 viole l’article 65 parce qu’on ignore où et par qui cela a été préparé.
De l’élection du président du parti
Pour Nestor Girukwisha, l’article 46, alinéa 3 en rapport avec l’élection du président du parti et le changement des membres des organes n’ont pas été respectés. Il est stipulé, tient à préciser, que le candidat au poste du président du parti doit être confirmé par les 4/5 des membres du bureau politique. Selon lui, cette procédure n’a pas eu lieu. « C’est qu’au cours du congrès extraordinaire du 30/4/2023 que le président lui-même s’est autoproclamait président du parti en ces termes : « le président du parti, c’est moi-même qui vous parle ».
Pour Nestor Girukwishaka, l’article 7 du règlement d’ordre intérieur du parti a été battu en brèche. Selon lui, c’est le bureau politique qui organise l’élection du président du parti après avoir été confirmé sa candidature et présenté cette dernière au congrès pour élection.
« L’élection du président du parti n’a jamais eu lieu, car les bureaux politiques n’ont jamais présenté la candidature du président du parti au congrès pour élection. Encore plus, ceux qui ont été désignés comme membres du bureau politique n’ont pas été soumis à la confirmation ou infirmation par le congrès comme le prévoit la loi », renchérit-il.
M. Girukwishaka fustige le déroulement du congrès qui n’a pas suivi les règles du jeu. Selon lui, c’était plutôt une simple réunion d’information. « Il n’y a pas eu vérification des congressistes province par province, que ces derniers remplissent les conditions ou que le quorum a été atteint. Il n’y a pas eu non plus de huis clos des congressistes ».
« Les résultats des deux congrès sont sans valeur »
Nestor Girukwishaka rejette les décisions prises au cours des deux congrès, car selon lui, les statuts du parti ont été piétinés.
« Il apparaît clairement que la violation des statuts du parti n’avait autre objectif que la perturbation des organes du parti, semer la haine au sein des Inyankamugayo, les perturber, les dresser les uns contre les autres, le tout dans le but d’écarter toute personne qui lutte pour le respect de loi ».
Il invite le bureau politique et tous les « Inyankamugayo à respecter et à faire respecter les statuts et le règlement d’ordre intérieur du parti.
« Nous appelons les Inyankamugayo et les responsables partout où vous êtes de lutter pour le respect des statuts du parti, au cas contraire, nous ne pourrons pas avoir la dignité et la justice pour tous, auxquels nous aspirons ».
Nestor Girukwishaka demande au président du parti de mettre en avant le dialogue et la concertation sans faux-fuyant. « Il faut trouver une solution aux problèmes qui minent le parti au lieu d’user de la force en piétinant les statuts du parti ».
Le camp lésé qui conteste la légalité du bureau politique du Conseil national de la liberté (Cnl) n’a pas voulu réagir. Contacté par Iwacu, Térence Manirambona, ancien porte-parole du CNL, s’est gardé de tout commentaire. « Veuillez exploiter le communiqué ».
Quant à Nestor Girukwishaka signataire de la lettre du 15 mai a opposé une fin de non-recevoir. « Je crois que le message qui a été donné est complet. Je pense qu’une exploitation intellectuelle suffit ».
Le secrétaire général du CNL contre-attaque
« Je reconnais avoir vu et lu dans les groupes WhatsApp un document qui a été signé par un certain Nestor Girukwishaka », affirme Simon Bizimungu, secrétaire général du Cnl. Pour lui, le document n’a pas été adressé ni au parti Cnl ni à son président. « On n’a pas reçu de copie au bureau du parti ».
Ce député du Cnl dément les allégations contenues dans le communiqué en rapport à la tenue des deux congrès. Selon lui, l’organisation des deux congrès a respecté les statuts et le règlement d’ordre intérieur du parti.
« L’organe compétent qui est le bureau politique a été saisi. L’ordre du jour a été fixé conformément à la loi. Si c’est l’organe compétent qui a entériné l’ordre du jour. Qui d’autre peut dire que la loi n’a pas été respectée ?
Concernant le congrès du 12 avril, informe Simon Bizimugu, l’ordre du jour a été annoncé dans les trois réunions du bureau politique qui ont eu lieu avant la tenue du congrès.
Et de préciser que l’ordre du jour prévoyait la modification de certaines dispositions des statuts du parti pour les adapter au nouveau découpage administratif. « C’est ce qui a été analysé et entériné durant le congrès », martèle-t-il.
Le secrétaire général du Cnl fustige le comportement de Nestor Girukwishaka. Il fait savoir qu’il était membre du bureau politique sortant. « Il a été invité dans le congrès mais, il s’est absenté volontairement. Et dire que ce qui a été décidé dans le congrès n’a pas respecté la loi, cela m’étonne », tout en déplorant : « On ne peut consulter pas quelqu’un qu’on ne voit pas ».
« Il n’y aura pas d’ailes »
Interrogé sur une probable scission du parti Cnl, le député Simon Bizimungu tranquillise. « Le parti Cnl n’est pas un parti des membres du bureau politique. C’est un parti des Inyankamugayo, des militants éparpillés à travers tout le pays. »
Pour lui, la contestation des résultats des deux congrès par quelques anciens membres du bureau politique n’entrave en rien le fonctionnement du parti. « Ceux qui le pensent se trompent énormément ».
Quant aux sanctions envers ceux qui tentent de torpiller le bon fonctionnement du parti, le député Bizimungu se veut rassurant. « Nous ne mettons pas en avant les sanctions. Nous allons leur prodiguer des conseils et nous espérons qu’ils vont réaliser que de tels agissements n’apportent rien au parti ».
Pour lui, ceux qui ont été remplacés dans le bureau politique vont continuer leurs activités au sein du parti. « Cela ne signifie pas qu’ils sont écartés du parti. Ils restent des membres et continueront à militer pour le parti là où ils sont ».
Et de préciser que parmi les amendements apportés aux statuts figure celui qui stipule que « celui qui a occupé un poste de responsabilité au niveau du pays ou au niveau du parti devient d’office membre du comité consultatif du parti s’il quitte ses responsabilités ». Un organe très important, selon lui, à travers lequel chacun pourra faire passer sa contribution.
Interrogé sur une probable main invisible derrière ces contestations, Simon Bizimungu répond : « Je ne peux ni le confirmer ni l’infirmer ».