Paix : Faire un pas de côté pour rencontrer l’autre
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Le développement socio-économique du Burundi représente-t-il une priorité pour le gouvernement ? Prioriser le développement socio-économique des Burundais impliquerait de s’engager dans un processus de paix portant l’ambition d’asseoir une paix positive dans laquelle la violence est moindre au point de pouvoir mener une vie à l’abri de la peur. En l’occurrence, entamer des pourparlers avec l’opposition en exil. A cet effet, désactiver les autres mandats d’arrêt internationaux restants après l’annulation, tombée vendredi 19 février 2016, de quinze sur les 34 visant des personnalités de l’opposition, de la société civile et de la presse accusées d’être les instigateurs de la tentative de putsch manqué du mercredi 13 mai 2015.

Un autre volet du processus de paix, le respect des droits de l’Homme. Faire demi-tour après avoir marché si longtemps dans les exécutions extrajudiciaires, les arrestations arbitraires, les incarcérations à connotation politique et le maintien en prison de personnes ayant purgé leur peine. Dans son rapport intitulé « Prisonniers oubliés : la justice burundaise ignore la loi », publié mardi 28 novembre, l’Initiative pour les droits humains au Burundi (IDHB) constate que la hiérarchie inféode la loi à la force. Des directeurs de prison obéissent aux instructions de certains procureurs, autorités gouvernementales, agents du SNR ou hauts responsables du Cndd-Fdd de ne pas libérer les prisonniers politiques.

L’enjeu de ce processus de paix ne serait pas de servir de caution au gouvernement pour ouvrir les vannes du financement extérieur du budget de l’Etat, mais de rétablir la confiance entre les protagonistes politiques. Quid alors de la « promesse tenue par Dieu à l’endroit du parti de l’Aigle » ? S’asseoir dessus pour déterrer la possibilité d’alternance par une Ceni consensuelle qui ne souffrirait d’aucune contestation à la lecture du verdict des urnes. Celle pilotée par Prosper Ntahorwamiye, jusque-là secrétaire général et porte-parole du gouvernement et ancien porte-parole de la Ceni contestée sous Pierre Claver Ndayicariye, depuis mercredi 6 décembre, en est à mille lieues. A rester rivée aux seuls intérêts du parti au pouvoir, la vie politique se recroqueville et s’étiole de ce peu de portée.

Au regard d’une telle dynamique vertueuse de reconfiguration du politique dans la perspective d’une consolidation de la paix, les Vingt-sept seraient dans de bonnes dispositions pour lâcher les cordons de la bourse d’ici les législatives de 2025, à tout le moins en partie pour le pays le plus pauvre du monde. Lever un drapeau rouge face à la volonté du Rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l’Homme au Burundi d’investiguer sur place, retirer au Cnl le « privilège d’exister » dans la perspective des législatives de 2025 et ériger la capture d’Etat en mode de gouvernance ont douché les espoirs de l’UE après sa main tendue par l’abrogation de la suspension de son aide financière directe à l’administration et aux institutions burundaises, à compter du 8 mars 2022.

Vouloir construire les chemins d’une prospérité partagée implique plus de transparence, plus de redevabilité, plus de contrôle citoyen de l’action publique. Des paramètres d’une communauté de destin qui sont des applications de cette vérité intangible : la démocratie commence avec le dialogue.
Guibert Mbonimpa (Iwacu)