Burundi : Il y a 30 ans, le Pr. Ruzenza Stanislas tombait sous les balles

JUSTICE, HISTOIRE

Trente ans après son assassinat, sa famille exige reconnaissance officielle et justice pour préserver la mémoire de ce professeur engagé.

Italie, 21/06/2025 – Trente ans ont passé depuis ce matin tragique du 21 juin 1995. En ce jour de mémoire, Rukundo Alain Blaise, fils du Professeur Ruzenza Stanislas, prend la plume depuis l’Italie [1] pour se souvenir, rendre hommage et réclamer justice.

Ce mercredi-là, vers neuf heures, l’Université du Burundi (UB) était pourtant sous surveillance des gendarmes. Mais cela n’a pas empêché un homme armé d’y pénétrer sans la moindre difficulté. Il s’est dirigé droit vers les bureaux du rectorat. Là, il est entré dans le bureau du Directeur de la Recherche, et sans hésiter, a tiré à bout portant sur le Professeur Ruzenza Stanislas. Il l’a abattu froidement, sous les yeux horrifiés de ses collègues.

Ce drame s’inscrivait dans un contexte déjà marqué par l’horreur. À peine dix jours plus tôt, le 11 juin 1995 [2], un massacre avait ensanglanté cette même université : une centaine d’étudiants tués par leurs camarades [3]. Une atmosphère de terreur et de haine régnait alors sur le campus.

Aujourd’hui, trois décennies après les faits, la famille du professeur continue de se battre pour que son nom ne soit pas effacé. Elle demande qu’une salle de l’Université du Burundi soit baptisée en son honneur, ou, à défaut, qu’une plaque commémorative soit apposée dans le bureau même où il a été assassiné. Un geste de reconnaissance pour le courage d’un homme que l’on n’a jamais protégé ni véritablement honoré.

Lettre intégrale de Rukundo Alain Blaise : [ https://burundi-forum.org/wp-content/uploads/2025/06/Hommage-au-Professeur-Stanislas-RUZENZA.pdf ]

Le Burundi, Ingoma y’Uburundi [4], est un État millénaire d’Afrique. Entre 1993 et 2003, il a été ravagé par une guerre civile, fruit d’un affrontement géopolitique entre la France et les États-Unis [5], instrumentalisant l’outil géostratégique colonial du conflit interethnique Hutu-Tutsi [6]. En juin 1995, le Professeur Ruzenza Stanislas et les étudiants de l’UB ont été tués non pour ce qu’ils avaient fait, mais pour ce qu’ils représentaient : des Hutu désignés comme tels dans un climat de haine et de suspicion.
Et aujourd’hui encore, les Barundi ne sont pas en paix. Ils continuent de vivre sous la pression d’une guerre permanente, celle imposée depuis le XIXe siècle par « la Croix et la Bannière » [7].

Références :
[1] Nahimana Karolero Pascal. Burundi : La diaspora burundaise : Du Monde, de Belgique et d’ailleurs – Histoire, trajectoires et ancrage. Bruxelles : Génération Afrique, 2025.
[2] Nyamitwe, Alain-Aimé. J’ai échappé au massacre de l’Université du Burundi : 11 juin 1995. Bruxelles : L’Harmattan, 2006.
[3] Burundi Agnews. (2025, juin 12). Burundi / Génocide : 11 juin 1995 – 30 ans après le massacre des étudiants à l’Université. Burundi AGNEWS. https://burundi-agnews.org/diaspora/burundi-genocide-11-juin-1995-30-ans-apres-le-massacre-des-etudiants-a-luniversite/
[4] Nahimana Karolero Pascal. Histoire du Burundi : Les grandes dates de l’histoire des Barundi et de l’État millénaire africain – Ingoma y’Uburundi. Bruxelles : Génération Afrique, 2024.
[5] Nahimana Karolero Pascal. La guerre civile du Burundi (1993-2003). Face à la Globalisation Unipolaire Américaine Néolibérale, le CNDD-FDD. Bruxelles : Génération Afrique, 2024.
[6] Nahimana Karolero Pascal. Camps de concentration du Burundi (1996 – 2002) : Les oubliés des collines – Mémoires d’un peuple enchaîné –. Bruxelles : Génération Afrique, 2025.
[7] Baranyanka Charles. Le Burundi face à la Croix et à la Bannière. Bruxelles, 2015.
(La « Croix et la Bannière » désigne l’alliance historique du Vatican, de la France – via les Pères Blancs de Lavigerie –, de l’Angleterre, de l’Allemagne, de la Belgique et des États-Unis contre l’ordre traditionnel burundais depuis le XIXe siècle.)

Sources : Nahimana P. , http://burundi-agnews.org, Samedi 21 juin 2025 | Photo : Ruzenza Stanislas

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