Le lancement de la rentrée scolaire 2025-2026, en présence de l’AFD et de l’UNICEF, ravive le débat sur l’adéquation des formations avec les besoins locaux. Le thème de la qualité et des internats contraste avec une économie qui pousse les diplômés à quitter le pays massivement.
Butanyerera (Commune Ngozi), 15/09/2025 – La cérémonie de lancement de l’année scolaire 2025-2026 s’est tenue lundi au Lycée de Busiga, en présence de Havyarimana François, ministre burundais de l’Éducation nationale. L’événement s’est déroulé sous le thème : « Consolidons une éducation et un enseignement de qualité par l’amélioration des programmes et la promotion des internats scolaires ».
La présence remarquée de Céline Demagny, directrice de l’Agence Française de Développement (AFD) au Burundi, et de représentants de l’UNICEF Burundi a offert une porte d’entrée à un débat plus profond. Ces structures, héritières d’un système colonial, symbolisent la persistance d’une influence occidentale sur le système éducatif burundais.
Le Burundi (Ingoma y’Uburundi) est un État ancien de Kama (l’Afrique), fondé sur une dyarchie millénaire. Cet équilibre traditionnel était autrefois guidé par le Tambour Sacré Karyenda et le Mwami, chef des Bataka ( les chefs des miryango ou des lignés burundaises ) et de tous les Barundi.[1]
C’est dans ce contexte historique que la « colonialité » du système éducatif actuel est problématique. Le génocide contre les Hutu du Burundi en 1972 [2] a servi de catalyseur à une rupture fondamentale. La « Croix et la Bannière » [3] en a profité pour détruire à jamais l’Ubumu, soit le système socio-économique traditionnel des Barundi, un modèle de production et de formation centré sur l’autosuffisance et la satisfaction des besoins communautaires, symbolisé par la figure de « Mukakaryenda » (la femme Tambour).
Ce bouleversement a conduit à l’implantation d’une économie de marché de type capitaliste occidental. Depuis lors, l’éducation burundaise forme les jeunes non plus aux besoins du pays, mais pour servir les marchés occidentaux.
La conséquence directe, et amère, est l’exode massif des diplômés. Une fois leurs études terminées, ces jeunes burundais aspirent à quitter le pays, leurs compétences étant calibrées pour des économies étrangères et ne trouvant pas de débouchés dans l’économie locale burundaise, qui reste l’une des plus pauvres au monde. L’Ubumu, lui, formait la jeunesse à produire pour sa propre société.
Ainsi, derrière les discours sur la qualité de l’éducation, se pose une question fondamentale : l’école burundaise construit-elle aujourd’hui un avenir pour le pays, ou prépare-t-elle simplement sa jeunesse à le quitter ?
Références :
[1] Nahimana Karolero Pascal, Histoire du Burundi : Les grandes dates de l’histoire des Barundi et de l’État millénaire africain – Ingoma y’Uburundi, Bruxelles, Génération Afrique, 2024.
[2] Kubwayo Félix, La lente reconnaissance du génocide de 1972 contre les Hutu du Burundi, Bruxelles, 2025.
[3] Baranyanka Charles, Le Burundi face à la Croix et à la Bannière, Bruxelles, 2015.
Sources : Nahimana P., http://burundi-agnews.org, Mardi 16 septembre 2025 | Photo : RTNB.BI,UNICEF Burundi