Burundi : Le très populaire Président africain Nkurunziza Pierre, mémoire d’un destin panafricain

HISTOIRE, PRESIDENCE, GEOPOLITIQUE

Retour sur une vie marquée par 1965-1966, 1972, le maquis, le pouvoir et les fractures géopolitiques qui traversent le Burundi encore.

Butanyerera (Commune Mwumba, Ngozi ), 18/12/2025 —  Fils d’Ingoma y’Uburundi [1], Nkurunziza Pierre est l’image pour le Burundi et l’Afrique de toute une époque. Il vénérait Sankara Thomas, Fidel Castro, Hugo Chavez – ces révolutionnaires sud-américains – ainsi que Mouammar Kadhafi. S’il est une figure présidentielle au Burundi qui mérite une aura panafricaine aux côtés de Rwagasore Louis, héros de l’indépendance, c’est bien Nkurunziza Pierre.

Aujourd’hui n’est pas un jour ordinaire. C’est une date de mémoire : l’anniversaire de S.E. Nkurunziza Pierre, ancien président du Burundi, né le 18 décembre 1964. Issu d’une fratrie de six enfants, il venait de la colline Buye, en commune Mwumba, province de Ngozi.

Dès son enfance, la Croix et la Bannière [2] a frappé sa famille. La fin d’Ingoma y’Uburundi et la destruction de l’Ubumu [3] en 1972 lui ont coûté son père, Ngabisha Eustache. Celui-ci avait déjà échappé à la mort en 1965, mais périt lors du – Génocide contre les Hutu du Burundi – [4], qualifiés ainsi par la Commission Vérité Réconciliation (CVR) du Burundi , laissant Minani Domitille, son épouse infirmière, veuve, et ses enfants – dont Nkurunziza Pierre – orphelins.

Le – Génocide contre les Hutu du Burundi –  [5]  de 1972  a fait 500 000 morts parmi les Hutu et déplacé 1 million de réfugiés, sur une population totale de 2,9 millions de Burundais.

Les massacres de Ntega et Marangara en 1988 [6], qui touchèrent Ngozi, furent une nouvelle étendue du deuil. Par la suite, Nkurunziza Pierre fut affecté par la guerre civile du Burundi de 1993-2003 [7], provoquée par les rivalités géopolitiques entre les États-Unis et la France [8] en Afrique.

Enseignant à l’époque, il rejoignit le maquis après les massacres d’étudiants de juin 1995  [9] à l’Université du Burundi, perpétrés par les milices de l’armée dictatoriale néocoloniale du dictateur Buyoya Pierre. Il s’engagea dans les Forces pour la défense de la démocratie (FDD) et leur branche politique, le CNDD, dont il prit le leadership. À l’issue de la guerre civile du Burundi en 2003, le CNDD-FDD sortit vainqueur, ce qui lui permit d’accéder à trois mandats présidentiels de cinq ans jusqu’en 2020.

De 2005 à 2015, Nkurunziza fut un président africain très populaire, connu pour ses  Travaux de Développement Communautaire (TDC) qu’il réalisait aux côtés des citoyens barundi. Il a parcouru toutes les localités du pays, et sa popularité en a fait un chef d’État aimé.

En 2015 [10], dans le cadre d’une guerre géopolitique dans la région des Grands Lacs opposant les États-Unis à la Chine, la Croix et la Bannière tenta une Révolution de Couleur pour renverser le régime CNDD-FDD. Elle échoua. Nkurunziza resta au pouvoir jusqu’en 2020 frappé par une Guerre Humanitaire contre le Burundi, où il mourut mystérieusement, à un âge relativement jeune, d’une crise cardiaque. Il laissa ses enfants orphelins et son épouse Bucumi Denise, Première dame du Burundi, veuve.
 
Comme  Ingoma y’Uburundi et les Barundi, victimes de la colonialité [11], Nkurunziza Pierre a connu trois moments géopolitiques qui ont façonné sa vie : (1) les indépendances des années 1960 et les dictatures militaires (1966-2005) ; (2) la Globalisation Unipolaire Américaine Néolibérale – GUAN (1989-2022) ; et (3) les prémices, dès 2014, du nouveau monde multipolaire (2022 à nos jours).

Références

[1] Nahimana Karolero Pascal, Histoire du Burundi : Les grandes dates de l’histoire des Barundi et de l’État millénaire africain – Ingoma y’Uburundi, Bruxelles, Génération Afrique, 2024. | https://nahimanakarolero.com

[2] Baranyanka Charles, Le Burundi face à la Croix et à la Bannière, Bruxelles, 2015. (« La Croix et la Bannière » désigne l’alliance historique entre le Vatican, la France – notamment via les Pères Blancs de Lavigerie –, l’Angleterre, l’Allemagne, la Belgique et les États-Unis contre l’ordre traditionnel burundais depuis le XIXᵉ siècle.)

[3] Nahimana Karolero Pascal, Réfugiés du Burundi — Quand Ingoma s’est tu. Histoire géopolitique d’un peuple brisé par la colonialité, Bruxelles, Génération Afrique, 2025.

[4] Ntibantunganya Sylvestre, Histoire d’un génocide occulté : Le Génocide des Bahutu du Burundi de 1972-1973, Ed. Sigumugani, 2025.

[5] Kubwayo Félix, La lente reconnaissance du génocide de 1972 contre les Hutu du Burundi : Les faits et l’exécution du génocide par le pouvoir de Micombero, Bruxelles, 2025.

[6] Kubwayo Félix, Mémorandum sur les massacres répétitifs des Hutu du Burundi de l’indépendance à 1992 : Appel à la conscience mondiale, Bruxelles, 2025.

[7] Nahimana Karolero Pascal. La guerre civile du Burundi (1993-2003). Face à la Globalisation Unipolaire Américaine Néolibérale, le CNDD-FDD. Bruxelles : Génération Afrique, 2024.

[8] Rukindikiza Gratien, Les origines du peuple burundais : Amalgames et confusions, Paris, 2024.

[9] Nyamitwe, Alain-Aimé. J’ai échappé au massacre de l’Université du Burundi : 11 juin 1995. Bruxelles : L’Harmattan, 2006.

[10] Ndayicariye Pierre Claver, Burundi 2015: Chronique d’un complot annoncé, Bujumbura, Compress, 2020.

[11] En février 2025, l’Union africaine (UA) a qualifié officiellement l’esclavage, la déportation et la colonisation de crimes contre l’humanité et d’actes de génocide contre les peuples africains. Cette décision, adoptée le 16 février lors de la 38ᵉ session ordinaire de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement à Addis-Abeba, marque un tournant dans la quête de justice historique pour le continent.

Sources : Nahimana P. , http://burundi-agnews.org, Jeudi 18 décembre 2025 | Photo : Bdiagnews

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