Un économiste du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) invite le gouvernement burundais à faire des efforts pour maintenir les acquis de la paix et éviter l’éclatement des conflits fonciers qui pourraient dégénérer en guerre civile à l’instar de celle connue par le pays dans le passé.

Dans une interview accordée mardi, M. Daniel Gbetnkom, économiste principal au Bureau du PNUD au Burundi, a préconisé  » une approche concertée » dans la gouvernance foncière pour éviter une « guerre foncière » dans le futur.

« Il faut garder à l’esprit qu’à la faveur des conflits, certaines personnes se sont installés au Burundi sur des terres qui ne leur appartenaient pas. Et aujourd’hui elles ne peuvent pas justifier le fait que ces terrains leur appartiennent à partir des papiers fiables et crédibles. Cependant, la résolution des litiges fonciers liés à cette situation doit se faire de manière concertée « , a-t-il déclaré.

« J’insiste sur une approche concertée parce qu’il faudrait que la population puisse prendre part à toutes les négociations en vue d’une solution consensuelle à tous les problèmes qui se posent au niveau de la gestion foncière au Burundi pour éviter que le pays retombe sur ce que je pourrais appeler la guerre foncière », a expliqué mardi M. Gbetnkom en marge des travaux d’un atelier national de lancement du Projet d’amélioration de la gestion et de la gouvernance foncière (PAGGF) au Burundi.

M. Gbetnkom a invité les autorités burundaises à favoriser l’acquisition des titres fonciers en incitant les citoyens à établir les titres fonciers sur leurs terrains.

En agissant ainsi, a-t-il commenté, on aura attaqué le mal à la racine dans la mesure où, dans une bonne proportion, il y a des gens qui occupent des terrains sans papiers justificatifs.

« Sous cet angle, j’encourage le gouvernement burundais à donner un coup d’accélérateur au programme national d’inventaire des terrains domaniaux. Il me semble que cette opération peut avoir un impact positif sur le problème foncier au Burundi, car, avec cette inventaire, on pourra avoir une idée sur le volume total des terrains domaniaux si bien que l’Etat du Burundi pourra s’appuyer sur de tels résultats pour mener des investigations sur la part de l’utilisation privée de ces terrains domaniaux et celle de l’utilisation publique », a-t-il suggéré.

Selon l’expert, en regardant de près en amont la problématique foncière au Burundi, on découvre que l’autre épine est la forte densité démographique.

Par rapport à beaucoup d’autres pays africains, a-t-il expliqué, la densité de la population burundaise est très élevée dans la mesure où elle est estimée en moyenne à plus de 400 habitants par km2.

La deuxième épine, a ajouté M. Gbetnkom, est que de par l’histoire, plus de 90% de la population burundaise vit de l’agriculture qui, selon lui, reste extensive à travers l’utilisation de beaucoup de terres sur l’ensemble du territoire national pour pouvoir nourrir la population.

« Au fur et à mesure que le temps passe; et compte tenu de l’explosion démographique renforcée par le fait qu’en moyenne une femme burundaise donne naissance 6 enfants, un tel rythme d’évolution de la population, combinée à l’exigüité des terres dans un contexte d’une agriculture extensive, aggrave le problème de rareté des terres au Burundi », a souligné M. Gbetnkom.

D’après l’économiste du PNUD, une chose qui s’avère important pour le Burundi, est de limiter la possibilité de continuer avec l’agriculture extensive à travers l’adoption et d’utiliser les technologies modernes pour pouvoir travailler de telle manière que de petites portions de terres puissent nourrir la famille.

L’agriculture extensive, a-t-il fait remarquer, utilise beaucoup de terres pour un rendement faible, alors qu’avec l’agriculture intensive mettant en avant l’utilisation des technologies modernes, le Burundi peut travailler avec ses petits portions de terres et réussir à instaurer la sécurité alimentaire pour sa population.

A ses yeux, si le Burundi réussissait à combiner les deux pistes de solutions (baisse de la natalité et agriculture intensive), il y a lieu de penser que les autorités nationales seront embarquées sur une bonne trajectoire pour résoudre durablement la problématique foncière.