Une centaine d’ « assaillants » ont été capturés, d’autres se sont rendus dans les provinces Cibitoke-Kayanza entre le 10 et 13 juillet. En marge d’un point de presse tenu le 13 juillet à Bukinanyana, l’armée a exhibé une flopée de jeunes gens affamés, dociles.
Les présumés combattants rassemblés au poste de police Bukinanyana ©A.U/Iwacu

Les présumés combattants rassemblés au poste de police Bukinanyana ©A.U/Iwacu

Le premier détail qui saute aux yeux, les personnes présentées portent de simples habits, aucun uniforme. Ils sont de tous les âges, de toutes les ethnies. Uniquement des hommes et pour la plupart des paysans.

Le premier lot de prisonniers aperçu est composé de six jeunes gens détenus au camp militaire de Ndora.

Particulièrement à l’aise avec les questions des journalistes, et des militaires, un parmi eux ne se fait pas prier pour raconter leur périple jusqu’au Burundi et la raison de leur reddition. « Chez nous, c’est la paix. Malgré tous les mensonges dont on nous a abreuvés, on n’a pas voulu tuer nos frères », répète-t-il inlassablement.

L’histoire qu’ils racontent est très simple, avec des variations mineures: soit ils ont été approchés par des personnes qu’ils ne connaissent pas et se sont rendus au Rwanda avec une promesse de travail très rémunérateur, soit ils ont été arrêtés par des inconnus sur le territoire rwandais.

Ils auraient été ensuite conduits dans la forêt de Nyungwe où leur a été dispensée, de gré ou de force, une formation militaire de courte durée, pas plus de trois semaines. Leurs agents instructeurs étaient rwandais. Tous sont unanimes sur ce point.

Le deuxième lot, plus d’une centaine d’ « assaillants », est rassemblé au poste de police de la commune Bukinanyana. Accroupis en rang dans l’herbe, certains sont affables et répondent sans problème aux questions des journalistes, d’autres semblent apathiques, et lâchent juste une réponse laconique : « C’est simple, on a été roulés ». Plus de gêne que de peur dans leurs regards.

« Pas la mer à boire »

« Le matin du vendredi 10 juillet 2015, des assaillants attaquent la position militaire de Buyumpu en zone Rugazi, commune Kabarore de la province Kayanza, l’armée se défend », fait savoir le colonel Gaspard Baratuza, porte-parole de l’armée. Le bilan officiel est de 31 morts et 170 capturés côté ennemi, et 6 blessés du côté de l’armée. Un civil aurait succombé et un autre blessé.

Les présumés combattants, eux, révèlent avoir pénétré à 500 au Burundi depuis le 8 juillet. Ils ont été attaqués par les militaires le 10 juillet dans la forêt de la Kibira. « Ça tirait de partout et on ne savait plus où donner de la tête. Plus d’une centaine d’entre nous ont été fauchés, et nos chefs ont rebroussés chemin », susurre un d’entre eux, sous l’œil vigilant de militaires et de policiers.

Ces deniers se moquent parfois ouvertement des « rebelles ». « C’est vous qui étiez venus nous combattre ? Les gars, la guerre n’est pas la mer à boire.» Tous les détenus demandent de l’eau et quelque chose à grignoter. Ils viennent de passer trois jours sans boire ni manger.


Une quarantaine d’enfants capturés sur le champ de bataille

Des mineurs se sont rendus après les récentes attaques dans les provinces de Kayanza et Cibitoke. Les défenseurs des droits de l’Homme demandent leur libération immédiate.
Des enfants capturés

Des enfants capturés

Tous de sexe masculin et au nombre de 41, ces enfants dont l’âge est compris entre 15 et 17 ans sont dans la désolation totale. Ils sont pour le moment incarcérés dans l’une des salles du lycée Cibitoke situé au chef-lieu de cette province de l’Ouest.

La majorité de ces mineurs sont originaires des provinces de Ruyigi, Cankuzo, Ngozi et Kirundo.

D’après leurs témoignages, au départ, ils ne savaient pas qu’ils allaient s’engager dans un groupe armé. Ils indiquent, innocemment, qu’ils étaient à la recherche d’un travail décent pour gagner la vie. ‘Un homme est venu et m’a proposé un bon job et je suis parti avec lui’, indique un mineur de Kirundo, les larmes aux yeux.

Même son de cloche pour M.A, natif de Cankuzo. Selon ce gamin qui va avoir bientôt 15 ans, il est parti avec son voisin convaincu qu’il allait décrocher un bon job où il toucherait à la fin du mois une somme de 300 mille Fbu, sans toutefois lui indiquer l’endroit.

Ces enfants précisent qu’ils sont issus de familles pauvres, d’autres sont orphelins. Ils croyaient qu’ils allaient sortir de la misère, avec ces promesses d’emploi.

Tous les témoignages de ces mineurs concordent pour dire qu’ils se seraient inconsciemment retrouvés au Rwanda. De là, continuent les enfants, ils auraient subi une formation militaires accélérée de deux semaines seulement avant d’entrer au Burundi, à partir de forêt de la Kibira dans les provinces de Kayanza et Cibitoke. C’est dans cette dernière province que la plupart de ces enfants se sont rendus auprès des positions militaires sans tirer aucun coup de feu.

Globalement, comme ils l’indiquent sans ambages, ces enfants disent qu’ils ont été forcés d’entrer dans ce groupe armé et demandent de rentrer chez eux.

Enfants à relâcher

Un défenseur des droits de l’Homme présent lors de l’interrogatoire de ces enfants nous a confié que la qualification de participation aux bandes armées comme infraction retenue pour les autres rebelles capturés ne peut pas être appliquée pour ces enfants.

Pour lui, la responsabilité pénale pour ces mineurs est à relativiser vu qu’ils n’avaient pas l’âge de discernement au moment où les faits se sont produits.

Se référant à la Convention Internationale relative aux droits de l’Enfant et aux différents textes nationaux et internationaux ratifiés par le Burundi, activistes des droits des enfants présents à Cibitoke plaident pour leur libération.

D’après eux, la place de ces enfants n’est pas la prison mais bel et bien à l’école. Ils disent que ces enfants sont traumatisés et devraient à tout prix passer à un centre de rééducation avant d’être réintégrés dans leurs communautés.