Au Rwanda, la famille d’Assinapol Rwigara, un important entrepreneur rwandais décédé en février lors d’un accident de la route, selon la police, est sortie de son silence. Femme et enfants du défunt contestent la version accidentelle et dénoncent un « assassinat ». Ils en appellent au président Paul Kagame pour diligenter une enquête.
Assis autour d’une table dans un des immeubles de Kigali dont Assinapol Rwigara était le propriétaire, sa veuve et ses quatre enfants oscillent entre tristesse et colère. La collision entre la voiture de l’entrepreneur avec un camion ce 4 février au soir est une machination, assurent-ils.
« Quand on est arrivés sur les lieux, la police était en train d’utiliser une dépanneuse pour enlever la voiture avec notre père toujours à l’intérieur et vivant, raconte Anne Rwigara, l’une des deux filles du défunt. Une fois sorti de la voiture, ils l’ont mis directement dans un sac mortuaire. Il était vivant, on le touchait, il était vivant. On leur disait : ‘On ne peut pas le mettre dans un sac, ça ne se fait pas’. Une ambulance est venue, mais elle a été renvoyée par la police. »
La jeune femme assure qu’une fois arrivé à la morgue du commissariat de police, son père présentait des blessures à l’arrière du crâne qu’il n’avait pas auparavant. Elle affirme également que selon l’autopsie, le décès de son père a été causé par ces blessures sans doute provoquées « par un couteau ». Toujours selon la jeune femme, des témoins auraient vu M. Rwigara attaqué par des hommes juste avant son accident.
Assinapol Rwigara avait fait fortune dans l’industrie et l’immobilier. Dans les années 1990, il avait largement financé le Front patriotique rwandais, alors rébellion, qui a pris le pouvoir à la suite du génocide en 1994. La famille dresse le portrait d’un patriote qui ne s’intéressait pas à la politique, mais qui depuis 1995 était régulièrement menacé en raison de ses affaires et de son indépendance. « C’est un homme qui travaillait pour lui-même. Qui a travaillé dur pour avoir tout ce qu’il avait aujourd’hui. Donc en regardant les faits des événements précédents, on sait que ce sont des gens hauts placés qui lui en ont toujours voulu pour tout ce qu’il avait accompli », estime Anne Rwigara.
La famille de M. Rwigara a envoyé une lettre au président rwandais Paul Kagame réclamant une enquête et une protection, car, disent-ils, ils se sentent en danger. Contactée par RFI la police n’a pas souhaité commenter ces accusations, mais maintient que M. Rwigara est bien mort d’un accident de voiture et qu’il est décédé sur le coup.