Cinq mois après Angela Merkel, le vice-chancelier allemand Olaf Scholz a à son tour proposé ce mercredi 28 novembre de « mutualiser » le siège permanent de la France au conseil de sécurité de l’Organisation des nations unies (ONU).
Qui a dit que l’Allemagne avait une vision timorée du projet européen ? Nos voisins d’outre-Rhin nourrissent en réalité de très ambitieux desseins pour la construction européenne… surtout lorsque ceux-ci rejoignent leurs propres intérêts. Ainsi, le vice-chancelier Olaf Scholz, membre du parti social-démocrate (SPD) et numéro deux du gouvernement allemand, a relancé ce mercredi 28 novembre une proposition défendue de longue date par Berlin : la transformation du siège permanent de la France au conseil de sécurité des Nations unies en siège dévolu à l’Union européenne (UE).
« Si nous prenons l’Union européenne au sérieux, l’UE devrait également parler d’une seule voix au sein du Conseil de sécurité des Nations unies (…) À moyen terme, le siège de la France pourrait être transformé en siège de l’UE« , a lancé Scholz lors d’un discours sur l’avenir de l’Europe prononcé à Berlin. En pratique, cela consisterait pour la France à céder un important élément de puissance au niveau géopolitique : depuis 1945, seuls cinq pays disposent d’un fauteuil permanent au Conseil de sécurité, et du droit de veto qui lui est associé. Dix autres membres non permanents sont choisis et siègent deux ans – ce sera d’ailleurs le cas de l’Allemagne à partir de janvier 2019. Lot de consolation pour la France, gracieusement proposé par Olaf Scholz en contrepartie : réserver le poste de chef de la délégation de l’Union européenne auprès des Nations Unies à un natif de l’Hexagone.
Un rêve de longue date en Allemagne
Le projet de mutualisation du siège au conseil de sécurité semble emballer l’Allemagne : en juin dernier, Angela Merkel avait déjà évoqué la possibilité de mettre le veto français à disposition de dix Etats européens « tournant » et travaillant avec la Commission européenne. Le 6 octobre, lors d’une conférence à Harvard, c’était au tour de l’ambassadeur allemand à l’ONU, Christoph Heusgen, d’annoncer carrément des négociations entre lui et l’ambassadeur français François Delattre au sujet d’un siège franco-allemand au conseil de sécurité. Il avait vite été refroidi par Gérard Araud, l’ambassadeur français aux Etats-Unis, qui avait rappelé que la mesure était « politiquement inconcevable« . Olaf Scholz semble d’ailleurs conscient des difficultés de la tâche : il a reconnu qu’il restait « un certain travail de conviction à faire à Paris« .
Emmanuel Macron ne s’est pour l’heure pas encore prononcé sur la question. Mais depuis quelques semaines, il tient un discours plus sévère vis-à-vis de l’Allemagne. S’exprimant devant les députés du Bundestag le 18 novembre, il les avait notamment exhortés à sortir de « l’immobilisme » pour faire évoluer l’Union européenne. Car si nos voisins d’outre-Rhin sont très enthousiastes pour partager le siège de la France à l’ONU, ils sont beaucoup plus timides sur d’autres sujets, comme par exemple la question de la mutualisation des dettes de la zone euro…
Marianne