Burundi : 9ᵉ édition de la Semaine de la diaspora
Face aux défis socio-économiques, la diaspora propose des solutions concrètes et plaide pour une gouvernance numérique renforcée.
 
Bujumbura, 29/07/2025 – La neuvième Semaine de la diaspora burundaise [1] s’est ouverte hier dans la commune Ntahangwa, en présence du président du Burundi, le général-major Ndayishimiye Évariste. Le thème retenu cette année est : « Contribution de la diaspora à la Vision 2040-2060 ».
Au nom des expatriés, Ndayiragije Samuel a présenté une série de projets concrets : construction de logements décents, développement de fermes agro-pastorales, création de complexes hôteliers, mise en valeur de circuits touristiques et développement de médias culturels. Il a également plaidé pour la digitalisation complète des services publics et la création d’une agence nationale de lutte contre la corruption. La diaspora envisage en outre l’édification d’un hôtel et de résidences qui lui soient dédiés.
Le chef de l’État a salué l’initiative et promis un cadre juridique et financier adapté pour accompagner ces investissements, en cohérence avec la Vision 2040-2060. Les travaux se poursuivront jusqu’au 2 août.
 
Depuis le XIXᵉ siècle, les Barundi subissent les conséquences des guerres menées par « la Croix et la Bannière »[2] contre le Burundi. Ces drames successifs ont contraint des milliers de leurs compatriotes à l’exil, donnant naissance à une diaspora dispersée aux quatre coins du monde. Pourtant, cette communauté, profondément attachée à sa terre natale, déplore l’indifférence de l’État. Aucune politique de soutien psychologique n’a été mise en place pour aider les exilés à surmonter les traumatismes liés à leur départ forcé. Pire, les autorités semblent ne considérer ces citoyens éloignés qu’une source de revenus, sans égard pour leur souffrance. Nul monument, nul symbole ne rend hommage à ces fils et filles du Burundi contraints de tout abandonner dans la douleur.
Depuis 2020, une nouvelle tendance émerge : les départs ne relèvent plus seulement de motifs politiques, mais aussi de causes socio-économiques. Ce phénomène interroge la pertinence même de la planification étatique.
 
En réalité, le Burundi n’a jamais rompu avec l’héritage colonial. En 1966, un coup d’État mit fin à Ingoma y’Uburundi, Ingoma – l’institution politique millénaire des Barundi, et la remplaça par une république – un État néocolonial rapidement transformé en dictature militaire. En 1972, le génocide contre les Hutu du Burundi [3] anéantit l’Ubumu, le système socio-économique traditionnel fondé sur la planification communautaire ( à la manière de Mukakaryenda). À sa place fut imposée une économie de marché capitaliste, calquée sur le modèle occidental [4].
Aujourd’hui, le système éducatif burundais reste tourné vers l’Occident. Les jeunes apprennent à idéaliser l’étranger plutôt qu’à valoriser leur propre patrimoine. Cette déconnexion culturelle est le symptôme d’un État inadapté : un système politique qui ne reflète pas les valeurs des Barundi ; une planification économique inefficace, incapable de répondre aux besoins de la population ; une école qui forme des citoyens déracinés, plutôt que des bâtisseurs de leur nation.
 
La question demeure : le Burundi parviendra-t-il enfin à se réconcilier avec son histoire et à construire un avenir qui lui ressemble ?
 
Références :

[1] Nahimana Karolero Pascal. Burundi : La diaspora burundaise : Du Monde, de Belgique et d’ailleurs – Histoire, trajectoires et ancrage. Bruxelles : Génération Afrique, 2025.
[2] Baranyanka Charles, Le Burundi face à la Croix et à la Bannière, Bruxelles, 2015. (La « Croix et la Bannière » désigne l’alliance historique entre le Vatican, la France – notamment via les Pères Blancs de Lavigerie –, l’Angleterre, l’Allemagne, la Belgique et les États-Unis contre l’ordre traditionnel burundais depuis le XIXᵉ siècle.)
[3] Kubwayo Félix, La lente reconnaissance du génocide de 1972 contre les Hutu du Burundi : Les faits et l’exécution du génocide par le pouvoir de Micombero, Bruxelles, 2025.
[4] Nahimana Karolero Pascal, Histoire du Burundi : Les grandes dates de l’histoire des Barundi et de l’État millénaire africain – Ingoma y’Uburundi, Bruxelles, Génération Afrique, 2024. ]

Sources : Nahimana P., http://burundi‑agnews.org, Vendredi 1 août 2025 | Photo : Ntare Rushatsi House