Burundi : Commémoration du héros de l’indépendance, Muganwa Rwagasore Louis

Entre mémoire, colonisation et histoire, le Burundi se souvient des acteurs d’Ingoma y’Uburundi, victimes de complots et de génocides planifiés.

Bujumbura, 13/10/2025 – À l’occasion des journées mémorielles des Barundi, S.E. Ndayishimiye Evariste, Général Major et Président du Burundi, participe à la commémoration du 64ᵉ anniversaire de l’assassinat du Muganwa Rwagasore Louis [1], fils du Mwami Mwambutsa Bangiricenge, Héros de l’indépendance du Burundi. En présence de toutes les hautes personnalités du pays, il dépose des gerbes de fleurs au Mausolée du Muganwa Rwagasore, situé à Vugizo, puis assiste à une messe à la Cathédrale Regina.

Entre 1959 et 1966, la Croix et la Bannière [2] décida de mettre fin à Ingoma [3], l’institution étatique millénaire des Barundi, afin d’instaurer un État néocolonial — la République — et de permettre à la Colonialité [4] de se poursuivre malgré l’indépendance acquise. L’Union Africaine considère depuis février 2025 cette entreprise comme un crime contre l’humanité et un génocide.

Pour réaliser ce plan macabre, en utilisant l’ outil raciste géopolitique coloniale du Conflit Interethnique- Hutu – Tutsi [5].crée en 1911 par l’Allemand Hans Meyer, certains acteurs Hima [6] burundais furent instrumentalisés,  Dans la tradition d’Ingoma y’Uburundi, les Hima, en tant qu’acteurs importants de l’Institution du Tambour Sacré Karyenda (Mukakaryenda), avaient pour tâche divine de préserver l’harmonie entre tous les myryango des Barundi [7]. La fin d’Ingoma y’Uburundi visait donc à éliminer tous les acteurs socles de cet État traditionnel.

Un génocide des Baganwa fut ainsi programmé : Muganwa Rwagasore fut assassiné le 13 octobre 1961, suivi des fils et neveux du Muganwa Baranyanka Pierre en 1963 (Muganwa Birori Joseph, Muganwa Ntidendereza Jean-Baptiste, Muganwa Nahimana Antoine, Muganwa Ntakiyica Henri, Muganwa Ntakiyica Jean-Baptiste). En 1964, Muganwa Kamatari Ignace, frère du Mwami Mwambutsa Bangiricenge, fut également assassiné. Simultanément, les génocides des Bataka et des Banyamabanga se poursuivaient (Ngendandumwe, Mirerekano, Benyuje…).

En 1965, la Croix et la Bannière tenta d’assassiner le Mwami Mwambutsa Bangiricenge, mais échoua. Elle détenait néanmoins son fils et organisa en 1966 l’intronisation du jeune Muganwa Ndizeye Charles, devenu Mwami Ntare Ndizeye. À cette cérémonie, on remarqua que tous les acteurs importants d’Ingoma y’Uburundi avaient déjà disparu. En novembre 1966, la fin d’Ingoma y’Uburundi fut déclarée et la République proclamée.

La seconde phase de cette entreprise consistait à instaurer une économie de marché (Capitalisme) [8] et à détruire l’Ubumu [9], le système socio-économique écologique des Barundi, culminant avec le génocide contre les Hutu du Burundi en 1972-1973 [10]. Entre 1966 et 1972, la Croix et la Bannière entama les génocides des enfants des Baganwa, des Bataka et des Banyamabanga, notamment en 1969, puis échoua en 1971 contre les Banyaruguru, des miryango importants liés également à l’institution d’Ingoma. En 1972, le fils du Mwami Mwambutsa Bangiricenge, devenu Mwami Ntare Ndizeye, fut lui aussi assassiné : le Régicide du Burundi.

Références :

[1] Harerimana Eric-Innocent, Umurundi, une identité inclusive, Ed. Iwacu, Bruxelles, 2025.
[2] Nahimana Karolero Pascal, Histoire du Burundi : Les grandes dates de l’histoire des Barundi et de l’État millénaire africain – Ingoma y’Uburundi, Bruxelles, Génération Afrique, 2024.
[3] Baranyanka Charles, Le Burundi face à la Croix et à la Bannière, Bruxelles, 2015. (La « Croix et la Bannière » désigne l’alliance historique entre le Vatican, la France — notamment via les Pères Blancs de Lavigerie —, l’Angleterre, l’Allemagne, la Belgique et les États-Unis — contre l’ordre traditionnel burundais depuis le XIXᵉ siècle.)
[4] Pini-Pini Nsasay, Tribunal de l’Histoire Africaine. Tome 1 : Réquisitoire contre l’Europe christianisée en hommage à E.D. Morel (1873–1924/2024), Collection Historiographie du Monde Contemporain / Éds Cheikh Anta Diop (Edi-CAD), Douala, 2024.
[5] Nahimana Karolero Pascal, Réfugiés du Burundi — Quand Ingoma s’est tu. Histoire géopolitique d’un peuple brisé par la Colonialité, Bruxelles, Génération Afrique, 2025.
[6] Rukindikiza Gratien, Les origines du peuple burundais : Amalgames et confusions, Paris, 2024.
[7] Nahimana Karolero Pascal, Réfugiés du Burundi — Quand Ingoma s’est tu. Histoire géopolitique d’un peuple brisé par la Colonialité, Bruxelles, Génération Afrique, 2025.
[8] Bigirimana Jean, Réinventer le Burundi : L’énergie, l’agriculture, les TIC et l’éducation comme fondements du futur, Bruxelles, Ed. Les éditions du Net, 2025.
[9] Nahimana Karolero Pascal, Histoire du Burundi : Les grandes dates de l’histoire des Barundi et de l’État millénaire africain – Ingoma y’Uburundi, Bruxelles, Génération Afrique, 2024.
[10] Ntibantunganya Sylvestre, Histoire d’un génocide occulté: Le Génocide des Bahutu du Burundi de 1972-1973, Ed. Sigumugani, 2025.
         Kubwayo Félix, Mémorandum sur les massacres répétitifs des Hutu du Burundi de l’indépendance à 1992 : Appel à la conscience mondiale, Bruxelles, 2025.

DAM, NY, AGNEWS, http://burundi-agnews.org, Lundi 13 octobre 2025 | Photo : Ntare Rushatsi House

Source : Nahimana P. , http://burundi-agnews.org, Lundi 13 octobre 2025 | Photo : Ntare Rushatsi House