Une thérapie comparable à la tri-thérapie employée pour soigner le sida
Une petite équie de chercheurs israéliens pense qu’elle pourrait avoir trouvé un traitement totalement efficace contre le cancer. Une thérapie pourrait être mise sur le marché dans les tout prochains mois.
Cette promesse, c’est celle de Dan Aridor, président de la société israélienne Accelerated Evolution Biotechnologies (AEBI). « Notre traitement contre le cancer sera efficace dès le premier jour, il ne durera que quelques semaines et n’aura pas ou peu d’effets secondaires, et il aura un coût bien inférieur à celui de la plupart des autres traitements sur le marché », dit-il.
Une thérapie reposant sur des phages et des peptides
Selon les dirigeants d’AEBI, la thérapie de toxine à cibles multiples MuTaTo développée par leur entreprise fonctionne de la même manière qu’un antibiotique qui serait ciblé contre le cancer. Elle repose sur la technologie SoAP, qui vise à introduire le code ADN d’une protéine, comme un anticorps, dans un bactériophage (ou « phage ») – un virus qui infecte les bactéries. Les chercheurs peuvent utiliser ces bactériophages modifiés pour détecter les interactions avec d’autres protéines, des séquences d’ADN et de petites molécules.
Cette technique est très voisine de celle qui a permis à George P. Smith (Etats-Unis) et Sir Gregory P. Winter (Royaume-Uni) de remporter le Prix Nobel 2018 pour leur travaux sur « l’expression des phages dans les peptides et les anticorps ».
Cependant, AEBI travaille sur une combinaison de plusieurs peptides (des composés formés d’au moins deux acides aminés reliés entre eux par une sorte de chaîne, la liaison peptidique), et non des anticorps. Ces peptides sont associés à une toxine peptidique pour s’attaquer à chaque cellule de cancer. Les chercheurs utilisent une combinaison d’au moins 3 peptides pour contourner le problème de la mutation des cellules cancéreuses, qui neutraliserait l’effet du traitement sur ces dernières. « Au lieu d’attaquer un récepteur à la fois, nous en attaquons trois à la fois ; même le cancer ne peut pas muter trois récepteurs en même temps », explique le Dr Ilan Morad, qui est aussi CEO d’AEBI.
La cellule cancéreuse est éliminée avant d’avoir pu s’adapter au traitement
De même, de nombreux cancers développent des mécanismes pour lutter contre les médicaments. Les cellules expulsent le principe actif du médicament, ou le modifient pour le neutraliser. Mais selon le professeur, avec l’approche MuTaTo, la cellule cancéreuse est éliminée avant d’avoir pu produire un antidote contre la toxine de la thérapie.
De nombreux traitements actuels se concentrent sur les cellules des tumeurs à développement rapide, mais éludent les cellules souches du cancer, à croissance bien plus lente. Ces cellules souches laissées indemnes, ont muté pour survivre au traitement. Elles continuent donc de se multiplier, et peuvent reformer une nouvelle tumeur, résistante au traitement dès l’arrêt des traitements.
Un taitement qui éradique toutes les cellules cancéreuses, y compris les cellules souches
Or, la stratégie d’attaques multiples de MuTaTo permet d’éradiquer complètement toutes les cellules cancéreuses, y compris les cellules souches. Le traitement permet également de ciber de très grosses molécules telles que des anticorps, que les traitements classiques échouent souvent à atteindre.
Enfin, le Dr Morad affirme que la thérapie d’AEBI permet d’éviter ou d’atténuer de façon importante les redoutables effets secondaires induits par la plupart des thérapies actuelles (en particulier les chimiothérapies) contre le cancer, tels que les nausées.
Une similitude avec la tri-thérapie employée contre le Sida
Selon Morad, le traitement mis au point par AEBI est comparable à la tri-thérapie employée pour soigner le SIDA. Celle-ci s’appuie également un cocktail de trois médicaments différents qui attaquent le virus à différents stades de sa réplication. « Nous avions l’habitude de donner plusieurs médicaments aux patients atteints du sida, mais nous les administrions un par un. Mais pendant le traitement, le virus mutait, et le SIDA recommençait à attaquer. Ce n’est que lorsque les patients ont commencé à utiliser un cocktail, qu’ils ont commencé à stopper la maladie », rappelle le Dr Morad.
Cependant, il précise qu’il existe tout de même une distinction importante entre les deux traitements : les malades du SIDA soignés avec la tri-thérapie deviennent des porteurs sains du virus HIV. Mais ils sont condamnés à poursuivre la tri-thérapie jusqu’à la fin de leur vie, pour éviter toute rechute. Ce n’est pas le cas avec le traitement MuTaTo, et généralement, le patient peut arrêter le traitement après quelques semaines.
Ces traitements élaborés avec la thérapie MuTaTo seront aussi personnalisés. Une biopsie sera réalisée sur le patient pour déterminer avec précision quel sera le cocktail le plus adapté dans son cas personnel.
Le cancer est la seconde cause de mortalité dans le monde
Aebi a déjà réalisé des premiers essais avec des souris auxquelles ont avait inoculé des cellules cancéreuses humaines, et obtenu des résultats prometteurs. La société israélienne envisage maintenant de procéder à une série d’essais cliniques qui pourraient prendre quelques années, avant de déboucher sur la mise sur le marché d’un traitement contre le cancer.
Chaque année, 18,1 millions de personnes à travers le monde se font diagnostiquer un cancer. Encore aujourd’hui, cette maladie est responsable d’un décès sur six dans le monde, ce qui en fait la seconde cause de mortalité, derrière les maladies cardiovasculaires.