Terrible semaine, une fois encore, pour les Congolais. Ceux de Beni (nord du Nord-Kivu, à l’est du pays) qui subissent une nouvelle vague de cruels massacres attribués aux ADF, des rebelles ougandais dont une partie serait devenue islamiste. Et ceux du reste de la République, tétanisés par les récits effrayants de massacres à la machette et de maisons incendiées en provenance de Beni, et par les photos affreuses de victimes qui circulent sur les réseaux sociaux.
Cette nouvelle vague de violence a été déclenchée par une offensive de l’armée congolaise contre les ADF dans les forêts autour de Beni, depuis le 5 novembre, offensive à laquelle ces miliciens répondent en quittant la forêt investie par l’armée pour se glisser dans les localités, où ils tuent des civils en représailles, voire pour forcer l’armée à quitter « leurs » forêts afin de venir protéger les civils.
Un mouvement de panique s’observe sur place, où des populations fuient leur domicile dans l’espoir de se protéger. Il est accentué par le peu de confiance envers l’armée, guère réputée pour son respect des citoyens et accusée, dans un passé récent, d’être l’auteur d’une partie au moins des massacres attribués aux ADF. Exaspérés par la peur, de nombreux Kivutiens ont manifesté contre les casques bleus de l’Onu cette semaine – avec violence à Béni (quatre morts) – stigmatisés pour leur immobilisme, tandis que l’Onu assure qu’elle ne peut intervenir si l’armée congolaise ne lui demande pas.
Cette terreur est aggravée par des intervenants anonymes sur les réseaux sociaux – effrayés eux-mêmes ou tentant de manipuler les foules? – qui encouragent à s’en prendre à telle ou telle catégorie de personnes qu’ils accusent d’avoir partie liée avec les tueurs; aucun indice sérieux ne vient soutenir cette accusation, sinon une antipathie envers le groupe stigmatisé.
Il est urgent que les autorités s’efforcent de ramener le calme et s’intéressent réellement au martyre des populations du Kivu. A plusieurs reprises, depuis le début des massacres à Beni, en 2014, l’armée a annoncé avoir capturé des ADF.. Comment se fait-il, dans ces conditions, qu’on en sache si peu sur qui ils sont réellement et ce qu’ils veulent? Quand le président Félix Tshisekedi mettra-t-il en œuvre sa promesse d’établir à Beni le quartier-général de l’armée pour l’est du pays? Pourquoi l’armée congolaise n’a-t-elle pas demandé l’appui de la Monusco pour ces opérations?
Le Congo, et sa partie nord-est en particulier, vivent des heures dangereuses, de celles où un rien suffit à créer une catastrophe destructrice comme un incendie en période de sécheresse.
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Commentaire par Marie-France Cros – La Libre